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vendredi 8 février 2013

Driss Benali, un dernier rendez-vous avec l’histoire, plein d’amertume !

 par


Driss Benali s’est éteint, comme il avait vécu, dans cette discrétion qui confinait à la timidité et qui l’avait fait aimer de tous. Visiblement amoindri par le combat qu’il livrait, depuis plusieurs mois, contre la maladie, il n’en était pas moins apparu l’œil vif et le verbe acéré, pour parler de notre économie, lors de la dernière Université du PSU :
- «  Une économie plombée par la rente……….où le marché joue un rôle de résidu et non de
 soutien ! »
Une pique à l’intention de ceux qui persistent encore à encenser le modèle économique marocain et en vanter l’exception, avant de poursuivre, en allusion au système mafieux, mis en place par le makhzen, pour récompenser ses thuriféraires et exclure ses contempteurs :
- «  N’ont recours au marché que ceux qui n’ont pas de soutien…………Le Maroc est  un régime néopatrimonial qui distribue des privilèges à ceux qui soutiennent le pouvoir, sans que ces revenus ne génèrent de valeur ajoutée.»
Pour sa dernière prestation publique, Benali, aura donc troqué sa proverbiale habileté sémantique et son art de la dissertation, pour une charge, toute grimace dehors,  contre le fléau de « la rente qui plombe l’économie » de notre pays.
Dans la bouche de ce talentueux professeur d’économie, dont la compétence n’avait d’égal que son peu de goût pour les lambris de la politique, le discours a valeur de condamnation de plus d’un demi-siècle de turpitudes du régime marocain, pour s’acheter et la compromission de ses « co-venturers » et quelques années supplémentaires de vie.
Autant  de combines occultes que la tyrannie s’est toujours évertuée à dissimuler à ses administrés, par l’intimidation et la répression des moyens de l’information. Elle ignorait que viendrait Internet qui redonnerait une seconde vie à la presse libre et un second souffle aux voix de la liberté.
Alors, chaque jour qui passe égrène, son chapelet d’actualités sordides, illustrant si bien le propos du défunt. Un carnet de boue malodorante qui se feuillette les narines pincées, comme l’histoire de ces trois ingénieurs, Abdelmajid AluizMohamed Reda, et Mohammed Achik, pris dans les filets de la tourmente judiciaire, pour avoir,  pour les deux premiers, osé  dénoncer un ping-pong incestueux, à coups de centaines de milliers de dirhams de primes illégales, entre un ministre des finances et un directeur de la trésorerie du royaume, coupable également d’avoir tenté une forfaiture, lors de l’établissement de la loi de finance. Le  troisième ingénieur est pris à partie, pour avoir courageusement pris fait et cause, pour les deux premiers.
Une tragédie, somme toute, bien marocaine qui me fait inévitablement penser que la réalité vient de rattraper la fiction et le Maroc d’aujourd’hui, de ressembler étrangement à celui des « Trois Mousquetaires », qui comme chacun le sait étaient quatre, à ferrailler contre l’hydre malfaisante du pouvoir. Qui, en effet, aura oublié le quatrième, un autre ingénieur, Ahmed Benseddik, happé par une insupportable injustice, pour avoir dénoncé la gabegie et la corruption.
Deux histoires pour le prix d’une et que la MAP, cette PRAVDA marocaine, dénoncée par la cour des comptes, pour son penchant à écouter la voix de Son Maître, plutôt que celle de l’honneur du journaliste, préférera taire à tout jamais, à défaut de la tordre pour défendre l’indéfendable.
Elle ne racontera jamais l’ignominie menée tambour battant et sous je ne sais quelle menace d’apocalypse  par un Nourredine bensouda, roublard et arrogant,  parce que proche du chef de l’Etat et revanchard parce que démasqué.

Elle ne dira jamais, que ce jour-là, ce représentant indigne de la fonction publique, s’est rendu coupable d’abus de pouvoir, de menaces, d’insultes, de voies de faits, d’enlèvement et séquestration illégale, de violation de domicile, de perquisition illégale, de vol qualifié commis par  une autorité hiérarchique sur un subalterne. Autant de délits et de crimes qui auraient conduit leur auteur, derrière les barreaux  pour quelques années, si le Maroc avait été un pays de droit, comme ils disent.
A l’heure où ces lignes s’écrivent, les « Trois mousquetaires » jetés en pâture à une justice aux ordres, n’ont toujours pas trouvé la sortie de l’enfer. Le quatrième y a, quant à lui, tout simplement renoncé, après avoir lutté des années durant  !
Les autres histoires dont  la MAP ne risque pas de se faire l’écho relèvent de la prédation pure et simple. Une sinistre opération confiscatoire, où le régime continue de ne prêter qu’aux riches. Les siens. Ceux que les fils du peuple ont baptisés « krouch lahram », « les ventripotences du pêché ».
Benali en a rappelé l’initiateur, Hassan II, grand prédateur devant l’éternel et qui, interrogé à propos de la corruption, avait eu cette déclaration lapidaire qui donna sans doute, le signal de la curée que l’on sait :
-« L’essentiel est qu’elle soit faite en dirham ! »
Portefeuilles ministériels, directions d’offices, présidences de sociétés étatiques ou semi-étatiques, agréments de transports, de pêche ou de carrières, tout y passe. Les révélations se suivent et se télescopent à donner le tournis et la nausée aux cœurs les plus accrochés, quand il ne s’agit pas de haine et de détestation du système.
La corruption dont « il » disait qu’elle se faisait en dirhams a gonflé, forci et s’est sophistiquée, au point de se faire en dollars ou en euros et les rentiers qualifiés à juste titre de parasites par Driss Benali poussent l’outrecuidance jusqu’à dissimuler tout revenu au fisc, après en avoir fait de même avec leur propre identité, derrière une cascade complexe de sociétés off-shores ou des prête-noms si grossiers, qu’ils en deviennent insultants.
Et comme un malheur n’arrive jamais seul, les parasites qui gangrènent l’économie nationale, et ceux qui gangrènent l’administration publique de leur incompétence, sont souvent les mêmes. Un constat accablant qui fait dire au défunt :
-«  Les français, on peut tout leur reprocher, mais ils ont laissé le sens de l’Etat dans ce pays ! »
Le Maroc a perdu un économiste de talent. La gauche marocaine l’un de ses plus brillants penseurs. L’homme disait qu’il aurait juste souhaité vivre dans un Maroc plus libre, tolérant et qui respecte le droit à la différence. Il part, sans avoir vu ce vœu exaucé et le cœur lourd d’un regret qu’il n’a pas hésité à exprimer à la fin de son intervention, celui d’avoir vu le « Mouvement du vingt février » rater son rendez-vous avec l’histoire, par médiocrité de ses élites. L’histoire en jugera.
Repose en paix l’ami !

"La lumière sera ou l'humanité se perdra !"

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