Réflexions d'un observateur marocain...
Par Mohamed Hifad, 15/5/2011
Par Mohamed Hifad, 15/5/2011
Le dernier attentat de Marrakech , comme au moment de la guerre de l’Irak, vient rappeler de nouveau aux villes touristiques comme Marrakech , Agadir et Essaouira , que le tourisme est une industrie du vent, volatile, dangereuse et peu fiable. Les unités hôtelières commencent à donner des congés pour leur personnel puis viendra le tour des salaires divisés par deux , ce qui sera suivi par cinq ou six mois d’arriérés et finalement de nouveaux conflits sociaux portés devant les tribunaux .
Hassan II , poursuivant la politique des Français du temps du protectorat, s’est contenté de développer les villes côtières. Si les colons se contentaient de la côte, c’est par stratégie militaire car ils ne pouvaient pénétrer sans danger vers l’intérieur du pays. Et si Hassan II adopte la même stratégie, c’est pour d’autres raisons : il a réservé tous les grands projets durables pour les zones arabophones et le tourisme pour les zones amazighophones. Son but est clair : ces amazighs resteront toujours pauvres, analphabètes, croyants fanatiques par ses soins et toujours aveuglément soumis. S’ils veulent jouir d’infrastructures, d’instruction et de quelques droits élémentaires, ils doivent aller dans les bidonvilles des grandes villes qui garantissent leur arabisation rapide et forcée.
Il aura suffi d’un simple attentat pour plonger de nouveau ces villes dans les soucis, les faillites et l’enfer pour le personnel hôtelier, les bazaristes , les petits artisans enfin toute une chaine de services liés au tourisme. Nous verrons bientôt de nouveau nos pauvres artisans vendre leur matériel au marché aux puces.
Vous me direz qu’il y a une agriculture moderne dans le Souss. Oui , mais une agriculture de la tomate, de l’orange et le tourisme qui consomment énormément d’eau au point où la nappe aujourd’hui est quasi épuisée et c’est une agriculture qui ne peut pas faire vivre le paysan en cas de conflits, de troubles. Il ne va pas manger la tomate et l’orange tous les jours. Souss était un grand exportateur de blé au début du siècle dernier. On nous casse les oreilles avec ce concept d’agriculture solidaire où chaque région doit produire quelque chose de particulier et être complémentaire avec d’autres régions. Oui pour la solidarité , mais chaque région doit assurer pour elle-même un minimum vital au cas où elle serait coupée du reste du pays pour une raison ou l’autre. Quand je vois qu’on réserve pour Doukkala , zone arabophone actuellement, la production du blé et de la viande et la tomate , l’orange et le tourisme pour le Souss , cela me donne froid au dos. Nos concitoyens agissent envers nous exactement comme la France et l’Europe le font avec le Maroc. On réserve la production du blé pour la France et l’Europe et on donne des crédits pour les paysans marocains de Souss et d'ailleurs à condition de produire de la tomate et de l’orange donc à épuiser leur nappe phréatique , assécher leur pays et les mettre en état d’assistés en ce qui concerne leur aliment de base à savoir le blé ou le pain .Nos responsables aujourd’hui, sous prétexte de l’unité, entendre par là l’unité forcée et artificielle , ont fait dépendre dangereusement une région de l’autre. Oui pour l’unité du pays mais chaque région doit conserver un espace vital au sein de son territoire qui lui assure son autonomie alimentaire et réserver le surplus pour la production solidaire.
Compter uniquement sur le tourisme c’est être réduit à la mendicité perpétuelle. Je pense qu’à l’avenir celui qui veut obtenir l’autorisation d’ouvrir un restaurant ou un hôtel doit avoir obligatoirement d’autres sources de revenus , d’autres projets rentables dans des domaines autres que le tourisme pour qu’il puisse payer son personnel durant les périodes creuses et résister le temps qu’il faut jusqu’à ce que la situation redevienne normale ou payer une assurance pour palier cette malheureuse lacune ou situation.
Également un festival qui permettait à une unité touristique de trouver son équilibre ne peut fonctionner dans des circonstances comme celles que nous sommes en train de vivre en ce moment. Que cela soit celui de Mawazine, de Gnawa ou autre, l’organiser en ce moment en plein milieu de la contestation populaire et révolutionnaire , constitue une provocation , une insulte pour la misère des gens et une déclaration de guerre. Je ne serai pas étonné si on faisait exploser une scène à Rabat , à Essaouira ou à Fès. Ces festivals ne profitent qu’à une petite minorité d’étrangers dans toutes les villes pré-citées ,à l’Etat( qui a une politique anti-populaire) et aux grandes villes qui profitent de ces rentrées en devises. Pour les villes concernées , c'est loin d'être le cas , en particulier Essaouira qui a fait gagner à l’Etat des milliards d’euros et de dollars et qui n’a nullement profité de ces rentrées. Un petit moussem avec les troupes locales sera moins couteux , spécifiquement marocain , moins agressif et à la limite acceptable en ce moment crucial de l’histoire du pays et de la région. Je ne veux pas voir à Essaouira des voitures de luxe à un million de dirhams venues d’autres villes du Maroc insulter ma misère de propriétaire d’une bicyclette .
La révolution est dans l’air du temps et les responsables marocains ne veulent pas voir la réalité en face ou en sont incapables , aveuglés par leur vie de palais ! Ils le comprendront une fois que cela sera trop tard et ne servira plus à rien comme d’habitude ! On les aura avertis à temps et qu'ils ne viennent pas organiser des manifestations contre le terrorisme qu'ils créent de leurs propres mains sans le savoir. Qu'ils en prennent donc leur entière responsabilité!
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