Par Zineb El Rhazaoui,3/3/2011
Coups de matraques et de pieds sont la réponse des autorités marocaines aux citoyens qui dénoncent les crimes contre l’humanité du guide de Tripoli. Un sit-in organisé par un réseau d’associations des Droits de l’Homme le mardi 21 février 2011 à 17h devant le centre culturel libyen à Rabat a été violemment réprimé par les forces anti émeutes marocaines.
Insultes, coups, mépris, rien n’a été épargné à ceux qui sont venus dénoncer le dictateur libyen. «Ils m’ont volé mon portable et violenté devant mon fils», affirme Mohammed Ennouhi, Président de l’Instance marocaine des Droits Humains.
Des représentants de l’Association Marocaine des droits de l’Homme (AMDH) ont été convoqués à 15h (deux heures avant la tenue du sit-in), au bureau de Mohamed Regraga, Gouverneur et adjoint au préfet de Rabat, qui leur a signifié que la manifestation était interdite par ordre écrit. « Nous lui avons répondu que cette interdiction était illégale, étant donné qu’elle viole le droit de manifester, il a rétorqué que les ordres viennent d’en haut, et que cela est donc au-dessus des lois », explique Youssef Raissouni, membre de l’AMDH convoqué à la réunion. Sachant que les gouverneurs et les préfets sont directement nommés par le roi, ces « ordres d’en haut » ne peuvent donc venir que du cabinet royal.
Aux yeux des militants et des journalistes présents au sit-in, Mohammed VI démontre de la sorte que non seulement il ne compte pas condamner l’action génocidaire de la dictature libyenne, mais qu’il sera prêt à lui renouveler son amitié. Si de nombreux diplomates libyen en poste à l’étranger ont d’ores et déjà annoncé leur désolidarisation avec le régime de Tripoli et leur ralliement à la révolte populaire, l’ambassadeur de Kadhafi à Rabat n’en a rien fait.
Selon le journaliste indépendant et analyste politique Ali Amar, «par son silence face à ces événements historiques qui secouent la région, par sa répression contre les manifestations anti Ben Ali, puis anti Kadhafi au Maroc, et par sa totale déconsidération des messages que le peuple marocain lui a transmis pendant la marche du 20 février qu’il a qualifiés de démagogiques, il se fait l’allié objectif des dictateurs arabes».
Il est à rappeler que le Maroc est l’asile traditionnel des dictateurs africains : Mubutu Sese Seko, ex-potentat du Zaïre, un des chefs d’Etat les plus sanguinaires d’Afrique, décédé paisiblement à Rabat après une longue carrière de dictateur, Dadis Camara qui a été accueilli à l’Hôpital Cheikh Zayed à Rabat après avoir été blessé au crâne, et Obiang Nguéma, le pétro-dictateur dont la sécurité est assurée par les Marocains et qui investit massivement au royaume chérifien. Trois exemples édifiants d’une longue liste d’alliés inconditionnels reçus avec les honneurs par Rabat.
La réaction de l’Etat marocain semble incompréhensible de la part d’un régime qui prétend être démocrate dans sa communication officielle. Depuis le début de la fronde tunisienne, l’Etat marocain a déployé une puissante machine de propagande à coups de censure et de détournement des faits pour tuer dans l’œuf une fronde de plus en plus inévitable au royaume chérifien.
«Les autorités marocaines mentent même à leurs propres agents, pendant que nous-nous faisions tabasser par les merdas (ndlr : appellation donnée par les Marocains aux forces auxiliaires à cause de la couleur douteuse de leurs uniformes), leurs supérieurs leurs criaient que nous sommes un groupe d’homosexuels et de mécréants qui ne font pas le ramadan», raconte Saddik lahrach, membre du Forum Vérité et Justice présent au sit-in de solidarité. Le régime de Mohammed VI démontre dorénavant qu’il n’hésitera pas à recourir à la violence, ni à appeler à la haine et livrer à la vindicte populaire ceux qui osent le critiquer. Tout ceci, en exigeant évidemment d’être considéré comme un grand démocrate.
Article écrit pour GuinGuinBali
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