La question sahraouie empoisonne le Forum social
Par Julien Vlassenbroek depuis Dakar, RTBF, 8/2/2011
Des militantes des droits des femmes sahraouies ont été agressées au Forum Social Mondial (FSM). La question sahraouie, qui oppose le Maroc aux indépendantistes, a pourri le climat du Forum social mondial.
L'atelier "Sahara occidental, la dernière colonie africaine" qui devait avoir lieu hier, n'a pu se tenir qu'aujourd'hui. Et encore, dans des conditions plus qu'électriques.
Pour rappel, la question du Sahara occidental oppose le Maroc (qui revendique la souveraineté sur ce territoire depuis le départ des Espagnols en 1976) au groupe indépendantiste du Front Polisario. Ce dernier a fondé la République arabe sahraouie démocratique (RASD) sur environ un cinquième du territoire du Sahara occidental.
Des violences gâchent la fête
Organisé dans le cadre du Forum Social Mondial, l'atelier qui a catalysé les tensions devait permettre aux représentantes de l'Union nationale des femmes sahraouies (UNFS) de témoigner de leur situation. Mais elles ont été prises à parti et violentées par des ressortissants marocains.
Selon Pierre Galand, ancien sénateur socialiste belge, qui a assisté à la scène, il ne s'agissait pas de participants. D'après lui, il s'agit de gens "pilotés par l'ambassade" du Maroc. Information qu'il nous a été impossible de recouper, par ailleurs. Un journaliste marocain, sous couvert d'anonymat, prétend, lui, que ces agressions ont été "orchestrées par le ministère de l'Intérieur marocain". L'une des représentantes sahraouies avance, elle, que "des gens ont été payés pour casser toute initiative visant à sensibiliser à la cause sahraouie".
Quoi qu'il en soit, il est certain que ces violences ont pourri l'ambiance autour de ce thème et ont complètement dénoté dans l'ambiance fraternelle de rencontre et de dialogue qui règne sur le Forum social mondial.
La question de la sécurité des participants se pose
Ne s'estimant plus en sécurité sur le Forum, les représentantes sahraouies ont demander "qu'on assure leur sécurité". Résultat : aujourd'hui l'atelier était reprogrammé, cette fois avec un nombre conséquent de membres de la sécurité. Ces derniers ont empêché de nombreuses personnes de rentrer dans l'auditoire où se tenait la conférence-débat.
S'il a bien permis que l'atelier se tienne jusqu'à son terme, ce dispositif de sécurité n'a pas suffi à assurer un déroulement dans de bonnes conditions. Plein comme un oeuf, le local est vite devenu le théâtre de tentatives d'intimidations, avant que les personnes les plus véhémentes ne se fassent expulser manu militari. Vraiment pas l'esprit Forum social, en somme.
"Je suis là pour témoigner pacifiquement"
Avec une grosse heure de retard la conférence peut enfin commencer, couvée par le brouhaha des échanges animés et des cris venant de l'extérieur.
"Je suis là pour témoigner pacifiquement", commence la première intervenante. Pendant une demi-heure, ces femmes vont exposer les tortures et les violations des droits humains dont elles ont été victimes. Avant d'être interrompues par un participant qui se présente comme "Marocain et docteur en droit international" : "Le drapeau que vous arborez (celui du Sahara occidental, NDLR) est interdit, enlevez-le !", lance-t-il avant d'être pris à partie par la sécurité.
Finalement, la conférence peut aller jusqu'à son terme dans une ambiance tendue mais sans heurt.
"Pas un jour sans que l'on constate des violations graves des droits des sahraouis par les autorités marocaines", résumera l'une des conférencières. Et même au Forum social mondial, pourtant incontestable espace de dialogue et d'ouverture, les femmes sahraouies ont dû braver les intimidations pour faire entendre leur voix.
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