GENÈVE, 27 AVR 2010 | La France a été mise sur le gril mardi à Genève par dix experts onusiens du Comité contre la torture, qui ont questionné ses représentants sur la surpopulation carcérale, les droits des demandeurs d'asile ou les bavures policières.
AFP | 27/04/2010
Sur la surpopulation carcérale, avec un taux d'occupation des prisons françaises de 110,9%, l'ambassadeur de France auprès des Nations unies, Jean-Baptiste Mattéi, a affirmé que le nombre accru d'aménagements de peine et le placement de condamnés sous surveillance électronique avait permis d'améliorer la situation.
"Je reste un peu perplexe sur les chiffres. Ne faudrait-il pas accélérer un peu ces mesures alternatives ?", s'est toutefois demandé l'expert italien Bruno Alessio.
L'experte américaine Felice Gear a pour sa part réclamé des détails sur les fouilles corporelles intégrales lors de gardes à vue et en prison.
Des questions ont aussi été posées sur les suicides en prison, l'usage du pistolet à impulsions électriques Taser par les forces de l'ordre ou la technique d'immobilisation dite du "decubitus ventral" qui a provoqué des décès lors d'arrestations.
"La législation pénale est aujourd'hui orientée vers (...) une approche qui met en premier lieu la sécurité, la prévention, la lutte contre la criminalité", a regretté Essadira Belmir, une juge marocaine qui siège au Comité.
"On dirait que chaque fois qu'il y a un fait divers, on réglemente", a-t-elle ajouté, regrettant "une inflation législative où domine en fait l'aspect sécurité sur les droits de la personne".
Mme Belmir s'est aussi inquiétée de la protection des droits des mineurs demandeurs d'asile dans les zones d'attente des aéroports. "Souvent ils sont menacés, ils doivent signer des PV. Des enfants de 6 à 12 ans, signer des PV, vous vous rendez compte!", s'est-elle exclamée.
Alors que la France a reçu en 2009 48.000 demandes d'asile dont plus de 10.000 ont été accordées, les droits et la protection des requérants d'asile, la possibilité de faire appel des rejets et décisions d'éloignement par exemple, ont également fait l'objet de nombreuses questions.
Enfin, les droits pendant la garde à vue des personnes suspectées de terrorisme, trafic de drogue ou criminalité organisée ont été examinés.
"Les personnes accusées de terrorisme sont pratiquement tenues au secret parce qu'elles n'ont accès ni à un avocat, ni à leur famille ni à un médecin" pendant 72 heures, a souligné l'experte chypriote Myrna Kleopas.
Or s'ils devaient se produire, "la plupart des cas de torture et de mauvais traitements se produiraient pendant les trois premiers jours justement", s'est-elle inquiétée.
"L'enregistrement vidéo est justement une garantie contre la torture alors pourquoi le rendre exceptionnel dans le cadre des interrogatoires de suspects de terrorisme ?", a demandé M. Alessio.
"Les difficultés qui persistent, dont nous avons conscience, ne font que renforcer notre volonté de poursuivre le combat exigeant contre la torture", a affirmé l'ambassadeur Mattéi, en présentant un rapport qui fait état "d'avancées substantielles" depuis 2005.
Le Comité contre la torture émettra des recommandations en mai.
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