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samedi 6 février 2010

« Les Étoiles de Sidi Moumen » un roman chaleureux et glaçant qu’on ne lâche pas… et qui ne vous lâche pas …


Par Marie-Jo Fressard, SOLIDMAR, 6/2/2010
L’écrivain marocain Mahi Binebine s’est imprégné pendant cinq ans de cet environnement fait de violence, de laideur, de boue, de poussière, d’ordures nauséabondes, mais aussi de chaleur humaine, de fraternité et de moments de franche rigolade, qui cohabitent dans l’un des plus misérables bidonvilles du Maroc : Sidi Moumen, pudiquement dissimulé aux yeux des étrangers derrière un mur de pisé, comme le sont tous les bidonvilles du prestigieux royaume.
En 2003 les photos de ce bidonville s’étalaient dans la presse, même –exceptionnellement -dans la presse française : voilà le terreau où s’ épanouissent les kamikazes, auteurs des attentats meurtriers dans les hôtels de luxe marocains.
Mahi Binebine en a fait un roman passionnant et terrifiant qui permet de comprendre pourquoi et comment une bande de « durs » a pu être insidieusement endoctrinée pour être amenée à docilement commettre l’irréparable : tirer sur le fil du gilet pour se faire exploser…
Les Étoiles de Sidi Moumen, c’est le nom de l’équipe de foot la plus redoutable et la plus gagnante des bidonvilles qui ceinturent Casablanca. L’histoire de cette équipe est racontée par Moh qui veut être appelé Yachine, comme son idole, au point de devenir Yachine, vivant et mort, sans regret d’avoir eu une courte vie « content d’être loin des tôles ondulées, du froid, des égouts éventrés et de tous les miasmes qui ont habité mon enfance »
Il nous parle de Yemma, sa mère, sévère et tendre, crainte et adorée par ses nombreux fils (elle a mis au monde 14 garçons en 14 ans, un record !), de son frère protecteur Hamid, capable de tuer pour le venger. Les morts « accidentels » sont enterrés dans la décharge. Personne ne s’en inquiète : tant de personnes quittent le bidonville sans prévenir…
Nous découvrons un à un les copains et leur vie de misère : le beau Nabil, fils de Tamou la prostituée,qui aura honte de sa mère « je suis un fils de pute ! », Fouad le seul qui est allé à l’école, Ali qui n’est noir que parce qu’il travaille dans le charbon, Khalil qui avait une vie plus facile « avant », et d’autres encore. Délinquance de survie : bagarres, vols, viols, drogue, sniffe, pédophilie… « Au commencement il y a eu la décharge et la colonie de garnements qui germait dessus. La religion du foot, les bagarres incessantes, les vols à l’étalage et les courses effrénées, les avatars de la débrouille, le haschich, la colle blanche et les errances qu’ils entraînent, la contrebande et les petits métiers, les coups à répétition qui pleuvent, les fugues et leurs rançons de viols et de maltraitance… Au milieu de tout ce chaos étincelait un joyau tombé du paradis : Ghislane, ma tendre et belle amie. On ne sait pas comment elle avait atterri à Sidi Moumen, mais elle détonnait dans notre décor. Une fausse note à l’envers.» Yachine en tomba éperdument amoureux.
Le feu mis un jour au commissariat de police les libéra du commissaire appelé « doberman » qui, heureusement pour lui n’était pas présent ce jour. « Le commissariat de police ne fut pas reconstruit, et nul n’en souffrit outre mesure. Les différends entre les gens se réglaient alors soit par la médiation des vieux, soit à coups de poing à la décharge. Mais la vie à Sidi Moumen reprit peinardement son petit bonhomme de chemin. »
Puis ce fut un jour la rencontre de Hamid avec Abou Zoubeïr, et le début de l’endoctrinement programmé qui petit à petit a gagné toute l’équipe. Et tout changea. Yemma se félicita d’abord du changement : Hamid, l’enfant terrible ne se droguait plus, il a trouvé du travail, il est devenu sérieux. « Mais il n’était plus là. (…)il ne rentrait qu’à l’heure du dîner. Morte aussi l’ambiance joyeuse qu’il avait l’habitude de répandre à table, les histoires rocambolesques qui faisaient tant rire Yemma. »
Fini le foot, finies les bagarres et les rigolades. Toute l’équipe est prise en main par Abou Zouheïr et ses amis à qui ils veulent ressembler. Ils se laissent pousser la barbe, font leurs cinq prières, parlent de la grandeur de Dieu autour d’eux …. Zouheïr et ses amis leur organisent des vacances dans le Moyen Atlas, à eux qui n’ont jamais dépassé le mur du bidonville. En pleine nature, près du beau lac Dayet Aoua, dans une ambiance tantôt joyeuse, tantôt pieuse, leur préparation au "départ" se peaufine, et bientôt, lorsqu’ils comprendront quelle sera leur " mission ", ils l’accepteront tout naturellement... 
Les Etoiles de Sidi Moumen, roman de Mahi Binebine, Flammarion, janvier 2010. 17, 10 €
Biographie de Mahi Binebine
Mahi Binebine, romancier, peintre et sculpteur marocain, est né en 1959 à Marrakech.
En 1980, il s' installe à Paris et fait des études de mathématiques qu'il enseigne durant huit ans.
Il est passionné de peinture et d'écriture.
Il passe 6 ans à New York, ses peintures et sculptures sont réunies au musée Solomon R. Guggenheim.
On peut voir se œuvres en différents lieux à travers le monde   : Biennale de Venise, Galerie Ott, Düsseldorf, Museum of Contemporary Art, Washington D.C (1998), Tinglado4 Mll de Costa, Tragone, Palais des Congrès, Grasse (2001), Société Générale Marocaine des Banques, Musée de Marrakech (2002)...
 Espace Bellville , Paris; Mohssem Culturel D'Asilah (2000), Musée de Marrakech (2003), Puerto de las Artes , Huelva; Borj Al Arabe Dubaï (2001)...
Mahi Binebine a publié plusieurs romans notamment : Le sommeil de l'esclave(1992) qui a reçu le prix Méditerranée , Cannibales (1999), L'écriture au tournant, Les Funérailles de lait (1994), L'Ombre du poète (1997), Pollens (2001) qui a obtenu le prix de l'Amitié Franco-Arabe ...
Il vit à Marrakech depuis 2002.
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1 commentaire:

  1. j'ai lu ce livre, vraiment c est un livre qui traite les parties marginale du maroc et comment la marginalisation conduit a la violence

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