Je suis fière de me joindre à plus de 250 survivants et descendants de survivants de la Shoah pour condamner « le massacre des Palestiniens à Gaza » et « le génocide en cours contre le peuple palestinien ». Notre déclaration de solidarité appelle à « une cessation immédiate du siège et du blocus contre Gaza » et à un « boycott économique, culturel et académique total à l’encontre d’Israël ».
Nous pensons que « plus jamais », la leçon maintes fois répétée issue de l’Holocauste d’Hitler, « doit signifier plus jamais pour qui que ce soit! » – surtout les Palestiniens.
Nous protestons également contre la publicité en pleine page dans le New York Times
et ailleurs du Sioniste Elie Wiesel qui maintient que les Palestiniens
sont responsables des morts des centaines d’enfants palestiniens de Gaza
tués par des bombes israéliennes. « Rien ne peut justifier de bombarder
des refuges de l’ONU, des maisons, des hôpitaux et des universités, »
disons-nous. Wiesel, un lauréat du prix Nobel et survivant de la Shoah,
accuse le groupe de résistance palestinienne Hamas d’avoir prétendûment
rejoint un « culte morbide » de « sacrifice d’enfants » parce que le Hamas a tiré des roquettes vers Israël. En réalité, c’est Israël qui a délibérément bombardé des zones résidentielles densément peuplées, affirme Raji Sourani,
directeur du Centre Palestinien pour les Droits de l’Homme. Parmi les
cibles israéliennes se trouvait une école de l’ONU à Rafah qui servait
de refuge – une attaque que même le State Department US a qualifiée
comme « horrible » et « honteuse ».
La ‘Doctrine de Gaza’
Sourani parle des actions d’Israël comme de la « Doctrine de Gaza »
– une « politique de punition collective » dans laquelle « la force
disproportionnée est utilisée pour provoquer la terreur chez la
population civile afin d’exercer une pression politique » sur leur
gouvernement. « Bombarder les résidences densément peuplées de Gaza est
un crime de guerre », dit-il.
Une telle punition collective était la réponse standard des Nazis
aux actes de résistance à leur règne génocidaire durant la Seconde
Guerre Mondiale. Quand des résistants tchèques ont assassiné Reinhard
Heydrich, l’un des principaux architectes de la Shoah juive, les Nazis ont massacré plus de 1300 personnes en représailles.
Les Nazis se sont livrés à de tels actes
en France où je vivais alors, enfant. En juin 1944, le village
d’Oradour-sur-Glane, à quelques 150 kilomètres du lieu où j’étais cachée
à l’époque, fut attaqué par un détachement de Waffen-SS allemands
sur les bases de fausses informations selon quoi un officier allemand y
était retenu captif. En l’espace de quelques heures, 600 civils furent
tués.
Les combattants juifs étaient une force
en pointe de la résistance armée en France, comme ils l’ont été dans
d’autres pays à travers l’Europe. Et même quand les Juifs étaient isolés
dans des ghettos et dans des camps de concentration, ils ont malgré
tout trouvé des moyens de combattre.
Dans la fameuse révolte du Ghetto de
Varsovie en 1943, seulement 750 combattants, munis d’armes primitives
introduites avec de la nourriture le long de tunnels creusés à la main,
ont tenu pendant un mois, avant que les Nazis lourdement armés
n’anéantissent la résistance, bombardant et rasant le ghetto jusqu’au
sol.
Il y a eu des représailles nazies à
travers l’Europe. Ils ont tué 205 enfants à Oradour – mais personne n’a
jamais accusé les résistants héroïques d’être un « culte morbide de
sacrifices d’enfants ».
La solidarité face à la plus grande adversité
À l’époque de ces événements, j’ai été
marquée à vie par les Nazis. Mon histoire est un exemple de
l’établissement de la solidarité face à la plus grande adversité.
En 1942, la police française a commencé à
rassembler les résidents juifs par dizaines de milliers – hommes,
femmes et enfants – et à les livrer aux Nazis pour être tués à Auschwitz, le camp de la mort en Pologne. Parmi les victimes s’est trouvée ma mère, qui est morte à Auschwitz
en 1943. L’objectif des Nazis était de rassembler, déporter et tuer
tous les Juifs de France – comme se faisait à travers l’Europe. Mais au
sein de cet abominable massacre, une vague de dégoût est montée en
France contre les attaques sur les Juifs. Par le biais des efforts
d’organisations sociales comme d’initiatives individuelles, des milliers
de Juifs ont été cachés. En tout, les trois-quarts des Juifs français
ont échappé à la Shoah.
Le premier grand raid de 1942 a pris les
organisations juives de France par surprise. Ce n’est qu’alors que la
population juive a réalisé que ses enfants devaient être cachés. Ils ont
embrassé le slogan, « Sauvez les enfants en les dispersant ». Des
recherches ont été initiées pour trouver des havres sûrs, des faux
papiers ont été fabriqués, et le transport a été organisé dans une
atmosphère d’urgence et de désespoir. Plus de 10000 enfants juifs ont
été soustraits à leurs familles et cachés. J’étais parmi eux. En 1943,
quand j’avais 2 ans, une organisation de la Résistance m’a prise en
charge et placée dans une famille de paysans en Auvergne, une région
agricole du centre-sud de la France.
Récemment, je suis retournée en Auvergne
avec mon compagnon, John Riddell, pour apprendre comment j’avais été
sauvée. J’ai parlé à des personnes en Auvergne qui se souvenaient de ces
années. Les enfants juifs étaient placés discrètement, loin des villes
et parfois dans des hameaux reculés. Pourtant ils vivaient ouvertement,
allant à l’école et à l’église.
Pourquoi n’ont-ils pas été trahis par la
police? Les villageois les ont protégés, mettant ainsi leurs propres
vies et celles de leurs familles en danger. Malgré ces dangers, les
paysans ont recueilli les enfants avec amour au sein de leurs
communautés tissées de liens solides.
Les enfants ont été sauvés, dans la
plupart des cas, par les actes non pas de héros individuels mais de
communautés entières, qui les ont cachés non pas dans des caves mais en
plein jour. Ils ont été sauvés par une résistance qui embrassait non
seulement les combattants du maquis, mais ceux qui mettaient en place
des réseaux civils pour défier des décrets anti-juifs, et, d’une autre
manière, par ceux qui ont détourné le regard, qui n’ont pas posé de
questions, et qui – même si hostiles à la présence de Juifs – ne les ont
pas trahis.
La Résistance accueillait les Français
et les immigrés; les Chrétiens, les Juifs et les Musulmans; et les
réfugiés d’Espagne, d’Italie et des territoires occupés par les Allemands. C’était une solidarité issue de l’expérience sociale commune de fermiers, de travailleurs et de ceux qu’ils influençaient.
Cessez le blocus de Gaza
La situation à Gaza n’est pas comme
celle qu’ont connue les Juifs d’Europe sous Hitler. Le gouvernement
israélien a converti le territoire en plus grand camp de concentration
au monde, aux issues scellées et soumis à un bombardement régulier et
meurtrier. Pour le peuple de Gaza, il n’y a pas d’endroit où mettre
leurs enfants à l’abri; pas de campagne accueillante où ils pourraient
trouver refuge.
Pas étonnant qu’à Gaza, selon les termes de Raji Sourani,
« un cessez-le-feu ne suffit pas. Nous réclamons la justice. Nous
réclamons d’être traités comme des êtres humains. Nous réclamons la fin
de la fermeture de la bande de Gaza. »
Et dans les termes de l’auteur et journaliste londonien Tariq Ali, nos politiciens « doivent comprendre qu’il n’y a pas d’équivalence entre la résistance palestinienne et l’occupation
israélienne. Quand un pays est occupé, une résistance émerge. Si vous
voulez qu’il n’y ait plus de tirs de roquettes, plus de tunnels qui
soient creusés, sortez de Gaza. »
Mais le peuple de Gaza n’est pas tout seul. Pour citer Barnaby Raine, organisateur étudiant d’un Bloc Juif contre le Sionisme s’adressant à un rassemblement de solidarité
à Londres le 9 août, « Des gens de toutes origines, de tous horizons,
tout autour du monde, nous nous rassemblons et disons par nos milliers,
« Nous sommes tous des Palestiniens. »
Aujourd’hui, les peuples du monde
s’expriment sans équivoque dans leur dénonciation de l’apartheid et du
massacre israélien. Ils expriment ceci lors de manifestations
géantes répétées arborant des pancartes et des banderoles appelant à:
Cessez le massacre à Gaza, levez le siège de Gaza, liberté pour la
Palestine.
Plusieurs gouvernements – Bolivie,
Brésil, Chili, Cuba, Salvador, Nicaragua, Pérou et Venezuela – ont pris
des mesures contre l’assaut israélien, comprenant un boycott et des
sanctions.
Aujourd’hui, notre dignité humaine est
mise au défi par la cruauté d’Israël envers les Palestiniens. Les
Palestiniens appellent à un mouvement mondial de solidarité. Nous devons
prendre la parole pour leur droit à défendre leurs vies et leur patrie.
Nous soutenons leur appel à susciter une pression économique sur Israël
avec une campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS).
Les doléances de cette campagne sont:
Pour le droit des Palestiniens à rentrer dans leur patrie, l’égalité des
droits pour les Palestiniens en Israël et la fin de l’occupation
israélienne. Aujourd’hui la campagne de boycott engrange un soutien
croissant sur plusieurs continents.
Redoublons nos efforts pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions contre l’apartheid israélien.
Libérez Gaza! La Palestine sera libre!
Suzanne Weiss est une survivante de la Shoah basée à Toronto, au Canada. Elle est membre de la Coalition Contre l’Apartheid Israélien (CAIA) et Pas En Notre Nom: Des Voix Juives Opposées Au Sionisme.
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