Le 6 février 2015, la France et le Maroc ont signé un nouveau
protocole de coopération judiciaire. Un accord de quelques lignes,
anodin à première vue, mais pourtant extrêmement lourd de conséquences
pour les victimes de torture au Maroc.
Début février, la France et le Maroc ont scellé leur réconciliation
après un an de brouille diplomatique résultant de plusieurs plaintes
déposées par des victimes en France pour des actes présumés de torture
contre des agents des services de sécurité marocains. Le
gouvernement français, soucieux de rétablir de bonnes relations avec le
Maroc quoiqu’il en coûte, n’a pas hésité à sacrifier les droits de
l’homme sur l’autel de la réconciliation.
Ainsi, début février 2015, le ministre de l’Intérieur Bernard
Cazeneuve a annoncé que le chef de la Direction Générale de la Sécurité
du Territoire marocain (DGST), Abdellatif Hammouchi, serait
prochainement décoré de la Légion d’honneur, malgré sa mise en cause
dans plusieurs plaintes pour torture déposées en France. Une annonce
vécue comme une insulte par les victimes ayant porté plainte contre M.
Hammouchi.
Plus grave encore, le 6 février 2015, la France et le Maroc ont signé un protocole amendant la Convention d’entraide judiciaire en matière pénale franco-marocaine. Un accord de quelques lignes, anodin à première vue, mais pourtant extrêmement lourd de conséquences.
Questions/réponses : pourquoi l’accord judiciaire France-Maroc est inacceptable
Ce protocole soulève de fortes interrogations au regard de sa
légalité et de sa compatibilité avec la Constitution française ainsi
qu’avec les engagements internationaux souscrits par la France. Tel que
rédigé, il porte atteinte au droit à un recours effectif des victimes
françaises et étrangères de crimes commis au Maroc. De plus, il entre en
contradiction avec l’obligation qui pèse sur la France de traduire en
justice toute personne présumée des crimes les plus graves qui se trouve
sur son territoire, sur le fondement de la compétence
extraterritoriale.
Le projet de loi portant ratification du Protocole
vient d’être soumis à l’examen de l’Assemblée nationale, en procédure
accélérée. Le gouvernement entend le faire adopter dans les plus brefs
délais. (…)
Rappel des faits : la lutte de l’ACAT contre la torture au Maroc
La brouille diplomatique remonte au 20 février 2014. Ce jour-là, un juge d’instruction français chargé d’enquêter sur une des plaintes pour torture déposées par l’ACAT
aux côtés de victimes alléguant avoir été torturées au Maroc, a demandé
l’audition du directeur marocain de la Direction Générale de la
Sécurité du Territoire (DGST), M. Abdellatif Hammouchi, alors présent
sur le territoire français. M. Hammouchi était accusé de complicité de
torture par deux victimes défendues par l’ACAT.
Cette seule demande d’audition a provoqué l’ire du Maroc qui a suspendu sa coopération judiciaire avec la France et a adopté des mesures de rétorsion
contre l’ACAT et les victimes ayant porté plainte en France, y compris
des poursuites judiciaires devant la justice marocaine pour diffamation
et dénonciation calomnieuse.
Dès lors, le gouvernement français n’a eu de cesse de chercher à
renouer les liens avec l’État marocain, au point de faire primer
ouvertement ses intérêts diplomatiques sur le respect des droits de
l’homme.
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