C'est un conflit gelé en plein cœur du Maghreb. Mardi 28
avril, le Conseil de sécurité des Nations unies a prolongé, comme il le
fait chaque année, le mandat de la Minurso, la force de l'ONU au Sahara
occidental. Adoptée à l'unanimité, la résolution invite les deux camps à
« s'engager dans une phase de négociations plus intensive et plus substantielle » : cela fera quarante ans cette année que le conflit, au coeur de la rivalité algéro-marocaine, empoisonne la vie de la région.
Le
territoire de l'ancienne colonie espagnole, annexé (à 80 %) par le
Maroc en 1975, est revendiqué depuis par le Front Polisario soutenu par
l'Algérie. Depuis la signature d'un cessez-le-feu en 1991, les
négociations piétinent. Rabat propose un plan d'autonomie rejeté par le
Front Polisario qui exige un référendum d'autodétermination avec le
soutien d'Alger. « Si rien n'avance, c'est que le statu quo semble préférable au risque d'un échec pour chacune des parties », souligne Luis Martinez, directeur de recherche au Centre d'études et de recherches internationales.
Côté marocain, la défense de l'« intégrité territoriale »
a été érigée en cause nationale directement portée par la monarchie.
Depuis longtemps, les autorités ont favorisé les investissements et
l'installation de Marocains du nord dans la région. La question
sahraouie figure en bonne place dans les priorités de la politique
étrangère du royaume : alors que le pays a quitté l'Union africaine en
1984 après qu'elle eut reconnu la République arabe sahraouie
démocratique (RASD), il développe une ambitieuse politique africaine
pour rompre son isolement diplomatique et géographique (la frontière
algéro-marocaine est fermée depuis 1994).
Blocage
La
fermeté est aussi de mise à Alger. Le pays souffre moins du blocage que
son voisin. Il permet en revanche de freiner les ambitions régionales de
son rival. Surtout, en soutenant le Front Polisario, l'Algérie se pose
en défenseur du droit à l'autodétermination à l'échelle du continent.
Les
Occidentaux sont peu enclins à troubler ce statu quo : le Maroc et
l'Algérie sont deux partenaires clés dans la lutte contre le terrorisme.
En outre, Rabat s'est depuis longtemps assuré de solides soutiens, au
premier rang desquels Paris. En 2013, un projet de résolution préparé
par les États-Unis proposait d'élargir le mandat de la Minurso à la
situation des droits de l'homme. Le Maroc avait obtenu son abandon. Il
n'en a plus été question depuis.
Régulièrement, des voix s'élèvent
pour dénoncer les conséquences de ce blocage. Le conflit a empêché
toute concrétisation de l'Union du Maghreb arabe lancée en 1989. Il
entrave également la coopération sécuritaire régionale. « Il est
temps de tenir compte des nouvelles dynamiques régionales : de
l'émergence des sociétés civiles aux questions sécuritaires »,souligne
Khadija Mohsen-Finan, enseignante à l'université Paris-I et
coordinatrice d'un dossier sur les quarante ans du conflit pour le site
Internet Orient XXI.
Depuis plusieurs années, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon sonne l'alarme. « La
frustration croissante parmi les Sahraouis et l'expansion des réseaux
criminels et extrémistes dans la région Sahel-Sahara présentent des
risques accrus pour la stabilité et la sécurité de la région », a-t-il répété début avril.
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