Mundialito. Les Marocains payent l’addition
et la FIFA fait des profits
et la FIFA fait des profits
Le Maroc a organisé les deux dernières
éditions de la Coupe du monde des clubs FIFA (Mundialito) de 2013 et 2014.
L’organisation de cette compétition a été marquée par de nombreux scandales :
absence de transparence financière, dilapidation de l’argent public,
dégradation de l’image du Maroc. Seul
gagnant de la compétition : La FIFA.
Par Salaheddine Lemaizi, militant d’ATTAC
Maroc*2/3/2015
A l'origine, les responsables marocains
ont présenté cette compétition comme étant une occasion pour « vendre l’image
du pays ». Financièrement, les officiels promettaient un « léger déficit ». Au
coup de sifflet final de cette compétition, aucun des objectifs de départ n’a
été atteint et la facture est lourde. Le gouvernement, à travers le budget
général ou par l’intermédiaire d’entreprises publiques, ont déboursé 70
millions USD pour les beaux yeux de la FIFA qui s’en sort avec un bénéficie
minimum de 15 millions USD pour
l’édition 2013. Ces bénéfices devraient doubler pour l’édition 2014.
Prévisions hors jeu
Les prévisions du Comité d’organisation
local (COL) étaient très optimistes. Les recettes en merchandising et
restauration devaient atteindre 160 millions de DH. Elles tablaient sur un taux
d’occupation des stades de 75%, soit 60 millions de DH (MDH) pour chacune des
deux éditions. 100 000 touristes ont été annoncés pour chaque édition. 25 000
supporters du Bayern Munich devaient faire le déplacement au Maroc, ils
dépenseront 800$/personne.
Les bénéfices attendus pour les deux
éditions ont été estimés à 1 milliard de DH. Pour faire ces projections
surestimées, le MJS a dû commander une étude au cabinet Capital consulting.
Cette étude n’a jamais été rendue publique, seuls ces quelques chiffres ont été
annoncés par le COL.
Pour rassurer l’opinion publique, le MJS
a affirmé que le coût de l’organisation de cette compétition pour l’État ne
dépassera pas 80 MDH pour les deux éditions. Le reste de la facture allait être
supporté par des entreprises sponsors. Le COL a fait appel à quatre entreprises
publiques (l’Office national de chemin de fer, Office national marocain du
tourisme, Maroc Télécom [appartenant à l’État à hauteur de 34 %] et la
Marocaine des jeux et des sports). Ces sponsors ont été repris pour l’édition
2014, ils ont déboursé 25 MDH pour les deux éditions.
7 fois plus que le budget initial
Les cahiers des charges draconiens de la
FIFA interdisent aux sponsors locaux d’être en concurrence avec les sponsors
internationaux (Toyota, Adidas, Coca-Cola, Emirates, Visa et Sony). À cause de
ce règlement, le COL a dû retirer à la dernière minute la Marocaine des jeux et
des sports comme sponsor national, soit une perte de 4 MDH pour cette
entreprise publique. Lors de l’édition de 2014, le transfert d’un match de
Rabat à Marrakech est supporté encore une fois uniquement par le Maroc. Le COL
passe à la caisse : 2 MDH de frais supplémentaires.
Au final, les pertes pour le Maroc se
sont alourdies de manière vertigineuse, surtout après le retrait par la FIFA de
320 MDH déposés par le Maroc comme garantie pour l’organisation de cette
compétition. Le coût de la compétition (éditions 2013 et 2014) était au départ
de 80 millions de DH. Au bout du compte, le Maroc a du débourser 560 millions
de DH (70 millions USD), soit 7 fois plus qu'annoncé au départ.
Impunité
Faute d’un bilan financier officiel pour
les deux éditions, le gouvernement se perd dans des déclarations
contradictoires. Si dans la première édition, le ministre de la Jeunesse et des
Sports se réjouissait que « l’organisation du Mundialito a coûté presque zéro
dirham ». Un an après il revient sur ces projections : « On a affiché la barre
trop haut. J’ai tablé sur 100 000 visiteurs, mais on avait réussi à drainer
entre 30 000 et 40 000 visiteurs seulement » . Malgré les nombreux scandales
(qualité des travaux des stades, transparence des marchés, conflits d’intérêts,
etc.…), aucun bilan n’a été annoncé, l’impunité sévit toujours. Mohamed
Ouzzine, ministre de la Jeunesse et des Sports, Karim Akkari, secrétaire
général du même département, Abdelilah Akram, vice-président du COL en 2013 et
Karim Allem, président du tournoi de la
même édition ont tous été limogés de leurs fonctions, sans que les résultats des
enquêtes les concernant ne soient rendus publics. En vérité aucun suivi
judiciaire n’a été effectué et les
coupables s’en mettent plein les poches au détriment d’une infrastructure
défaillante à tous les niveaux.
Nos priorités
Pendant ce temps, la FIFA quitte le
Maroc heureuse avec des valises remplies de dollars. Le cas de la Coupe du
Monde des clubs de 2013 et 2014 est un exemple parmi tant d’autres, où ces
instances internationales du sport (FIFA, CIO, CAF, etc…) se servent des
caisses de l’Etat comme des vaches à lait, comme l’écrit Fabien Ollier : « Le sport de masse censé profiter de la
manne financière généré par le « sport-spectacle », prouve par sa dépendance
toujours plus dispendieuse à l’égard des subventions publiques, qu’il peut
toujours compter sur les hommes politiques en mal d’acclamations sportives[…]
Les clameurs des stades et les vibrations de masse sont l’écho sordide d’un
capitalisme prédateur anti-démocratique plutôt que la résonance joyeuse d’une
fête humaniste ».
Les 560 MDH dépensés par l’État et ses
entreprises peuvent paraitre « dérisoire » du point de vue des
finances publiques, sauf que cet argent pouvait être investi, spécifiquement la
contribution étatique, dans la rénovation des infrastructures sportives de
proximité, les Maisons de jeunes, le soutien au sport scolaire et amateur, mais
là encore l’État avait d’autres priorités et le citoyen a trinqué une nouvelle
fois.
S.L.
* ATTAC Maroc (Association pour
la Taxation des transactions en aide aux citoyens au Maroc) est membre du
réseau international CADTM (Comité pour l’annulation de la dette du tiers
monde). www.attacmaroc.org --- www.cadtm.org
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