10/10/2014

La jeune Pakistanaise, réfugiée en Grande-Bretagne après avoir frôlé la mort dans un attentat taliban, ne cesse de défendre le droit à l'éducation pour tous, filles et garçons.

La jeune Malala lors d'une conférence JUSTIN TALLIS/AFPLa jeune Malala lors d'une conférence JUSTIN TALLIS/AFP

Cible des talibans

Long voile traditionnel tombant sur ses cheveux bruns foncés, joues rondes et teint hâlé, regard franc et lumineux, voix flûtée, Malala a vu sa vie basculer il y a deux ans, le 9 octobre 2012, à Mingora, capitale de sa vallée natale de Swat, joyau naturel du nord-ouest pakistanais.
Ce jour-là, deux tueurs talibans font irruption à l'arrière du petit bus qui la ramène de l'école. Après avoir demandé laquelle des jeunes filles présentes était Malala, le premier lui tire une balle dans la tête à bout portant. Le projectile ricoche sur le coin gauche du crâne et ressort par la nuque. Dans le coma, entre la vie et la mort, l'adolescente est évacuée dans un hôpital de Birmingham, en Angleterre, où elle reprend conscience six jours plus tard.
L'autobiographie de Malala"Où étais-je ? Qui m'avait amenée ? Où étaient mes parents ? Mon père était-il encore en vie ? J'étais terrifiée. La seule chose que je savais c'est qu'Allah m'avait bénie en m'accordant une nouvelle vie", raconte l'adolescente dans son autobiographie, "Moi, Malala" (Calmann-Levy, 2013), best seller publié dans plus de cinq langues. L'adolescente s'en sort. Un miracle. 

Symbole de la lutte contre l'obscurantisme taliban

Son histoire a bouleversé une partie de l'opinion publique. Depuis cinq ans, la plus jeune femme jamais nobélisée a fait de l'école pour tous – filles et garçons – son combat. Dans son livre, comme elle l'avait fait dès 2009 sous pseudonyme sur le blog en ourdou de la BBC "Journal d'une écolière pakistanaise", Malala Yousafzaï témoigne de l'emprise de talibans dans sa vallée pakistanaise. Elle y évoque notamment les flagellations publiques, la destruction des écoles pour filles, l'interdiction de la télévision, de la danse et de la musique.
Jusqu'à la décision de sa famille de fuir en 2009, comme un million d'autres personnes, alors que des combats font rage entre talibans et troupes pakistanaises. 
Réfugiée en Grande-Bretagne où elle a pu être soignée après l'attentat et retrouver une vie normale, Malala tente de retrouver une vie normale. Mais elle continue d'attribuer à son existence une mission particulière :
J'ai été épargnée pour une raison, celle d'utiliser ma vie pour aider les gens", écrit-elle dans son autobiographie.
Son plaidoyer à la tribune de l'ONU en faveur de l'accès à l'éducation pour les filles le 12 juillet 2013 marque une fois encore les esprits. Elle y déclare que "les extrémismes ont peur des livres et des stylos. Le pouvoir de l'éducation les effraie". Son discours est salué par une standing ovation de l'Assemblée. 

Une ado normale

A Birmingham, les difficultés ne sont pas absentes. Malala raconte dans son ouvrage souffrir du mal du pays et avoir du mal à s'adapter à la vie britannique. Les jeunes Anglaises qui sortent le soir légèrement vêtues, les garçons qui sympathisent ouvertement avec les filles dans les cafés... Tout cela n'avait encore rien de naturel pour la jeune Pakistanaise il y a un an. Mais force est de reconnaître les avantages : "Je vois des femmes qui occupent des emplois que nous ne pouvions pas imaginer à Swat", s'enthousiasme-t-elle. 
Un an avant de recevoir le Nobel, Malala Yousafzaï recevait le Prix Sakharov pour la liberté de pensée, remis par le Parlement européen. Au micro de France Inter, elle traçait ainsi son avenir : "Je deviendrai Premier ministre du Pakistan et j'œuvrerai à l'éducation de chaque enfant". Son héroïne s'appelle Benazir Bhutto, ancienne Premier ministre pakistanaise. L'histoire de Malala ne fait que commencer. 
C.L. et M.B. avec AFP