Ce texte a été proposé au journal Le Soir (Belgique)… La Rédaction voulait que je qualifie au nom d’une « honnêteté factuelle », le Mouvement du 20 février de « très minoritaire ». J’ai refusé en lui livrant mon argumentation (trop longue à étaler ici). Le texte a été refusé par le journal Le Soir, et moi, je persiste et signe…, en ajoutant ici quelques passages. Le texte était adressé à l’opinion belge et européenne.(* voir l'échange sur facebook)
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Le Printemps arabe
L’exception marocaine…
Lorsque la Constitution marocaine a été promulguée, des personnalités gravitant autour du Palais royal (El Yazami, et la koutla du Palais), ont fait une offensive de charme ici en Europe pour promouvoir « le changement apporté par le roi ». Il leur fallait convaincre le monde de l’avancée profonde de la démocratie et de l’État de Droit. « Le Maroc est une exception » et va surprendre le monde entier. D’aucuns parlaient d’une Constitution inédite supplantant bien loin derrière elle, les pays du Nord (sic)… Et les artisans (dont fait partie le prétentieux intello de service Tozy), de cette Constitution « historique » de demander opiniâtrement de la lire pour la juger. Savent-ils déjà qu’il était facile de berner les Occidentaux dès les premières lignes ?
Car dès le Préambule, les chancelleries occidentales ont déjà déposé le feuillet et diffusé la bonne nouvelle à la Une de leurs médias. C’est que tout y est : « État de droit démocratique » ; « État moderne, ayant pour fondement les principes de participation, de pluralisme et de bonne gouvernance » ; « société solidaire où tous jouissent de la sécurité, de l’égalité des chances, du respect de leur dignité et de la justice sociale… » ; L’État « s’engage à souscrire aux principes, droits et obligations énoncés dans leurs chartes et conventions respectives », et « réaffirme son attachement aux droits de l’Homme ». Dès la page qui suit, « Article premier », on parle de « monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale ». Cet Article évoque « la séparation, l’équilibre et la collaboration des pouvoirs », et va jusqu’à parler de « la démocratie participative » et des « principes de bonne gouvernance », de la « responsabilité et de la reddition des comptes ». Partant, nos journalistes belges à la RTBF, dès le lendemain, partageaient avec les Marocains résidant en Belgique, la bonne nouvelle. Et de bonne foi, leurs voix laissaient deviner de chaleureuses félicitations. Mais le chapitre de la royauté qui met entre les mains du roi, tous les leviers du pouvoir ? Silence radio !
C’est sous cette nouvelle donne que le débat s’est invité en Belgique. Philippe Moureaux (acteur important du parti socialiste), par exemple avait choisi la partie visible de l’iceberg, en organisant avec l’Ambassadeur à Bruxelles et « les représentants du royaume du Maroc », une rencontre pour soutenir ce miracle de « l’exception marocaine ». Une soirée qui a été d’ailleurs chahutée par les Marocains du Mouvement du 20 février.
Le Mouvement du 20 février / le refus décisif
Pourtant le Mouvement du 20 février existe et s’installe au Maroc dans la durée. Son historique est étalé sur une pléthore de vidéos à travers le Facebook et le Net : Wikipédia et blogs en nombre. Ce mouvement qui manifeste tous les 20 du mois, actif depuis le 20 février, organise réunions et sit-in, activités culturelles et travail régulier de conscientisation, avec une formidable maturité. Toutes les manifestations sont pacifiques et civilisées, même réprimées périodiquement avec arrestations, blessés et mort d’homme. Il rejette l’oppression politique, la corruption, l’impunité et exige la libération des prisonniers politiques, une Constitution démocratique, des réformes sociales (santé ; enseignement ; logement et travail). A tel point que les partis politiques traditionnels réunis autour de huit partis (ce qu'on a appelé ironiquement le G8), ont adopté quelques slogans et parlent (chose inimaginable avant), de « dignité » ; « liberté » ; « mauvaise gouvernance » ; « corruption » et « reddition des comptes »… C’est qu’ils sont en campagne électorale pour le 25 novembre. Élections que le Mouvement du 20 février boycotte. Et il l’a dit et crié devant l’Ambassade du Maroc et la Bourse à Bruxelles ce 20 novembre. Partout au Maroc et en Europe, ce 9ème jour de protestation unit les Marocains de tous les pays. Plusieurs sections du Mouvement du 20 février sont fondées par la jeunesse marocaine issue ou non de l’immigration (au Pays-Bas, en France, au Canada, aux USA, en Espagne, en Suisse…).
Qui, dès lors, prétend étouffer la voix du Mouvement du 20 février ? Lorsque Joëlle Milquet, vice-Première ministre du gouvernement fédéral belge et ministre de l’Emploi et de l’Égalité des chances, soutenait, au festival international du film indépendant de Bruxelles, les révolutions arabes et celle du Maroc si elle survenait, Choumicha, une représentante du régime, vedette d’un programme à la télévision marocaine et membre du jury, avait crié au scandale. L’élite du royaume est partout et gare aux lignes rouges. Et les questions fusent. Pacte tacite pour empêcher toute dissonance divergente ? Soumission, au nom de « Notre ami le roi » (titre du célèbre livre de Gilles Perrault) pour une complaisance immorale ? Allons-nous répéter la bourde de Michèle Alliot-Marie qui désirait envoyer à « notre ami Ben Ali » « le savoir faire français » pour mater le peuple tunisien ?
Le Mouvement du 20 février qui a ses poètes, ses chanteurs (un jeune rappeur est en prison), ses caricaturistes, ses journalistes, ses intellectuels…, est devenu une solide réalité dans le paysage de la société marocaine. Résolument opposé à un régime inopérant et répressif depuis des décennies et dont le géniteur principal, Hassan II disait à la télévision française (le 23 mai 1979) des élites qui continuent à ignorer la morale civile et à mépriser le contrat sociale : « Tous les nantis de toutes les sociétés sont des gens repus et ingrats, mais les miens, alors, c’est pire, parce qu’ils sont dans un pays sous-développé. Si encore ils étaient repus à l’échelle de notre standing, mais ils le sont à l’échelle de l’Allemagne, de la France ! »
Le régime parle de lui-même et de sa déliquescence ! L’héritage faramineux que laisse Hassan II à son fils, fait de ce dernier non seulement un propriétaire terrien (12 000 hectares), mais aussi un entrepreneur et un banquier…
Le peuple marocain était à la recherche d’une révolution depuis l’Indépendance. Aujourd’hui qu’il est encadré et organisé derrière l’exceptionnel Mouvement du 20 février, il tient le bout de la corde et il ne lâchera plus, dans le contexte actuel des révolutions… jusqu’à faire dégager le despotisme et instaurer un État de Droit !
Mohammed Belmaïzi
22/11/2011
merci pour votre blog pour plus de maroc akhbar
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