REPORTERS WITHOUT BORDERS
COMMUNIQUE DE PRESSE / PRESS RELEASE
Par Soazig Dollet, 30.06.2011
Alors que les Marocains s’apprêtent à voter pour le référendum sur le projet de révision de la Constitution, le 1er juillet prochain, le ministre de l’Information, Khalid Naciri, a obtenu, le 21 juin dernier, le licenciement de deux journalistes de Dubaï TV : Jalal Makhfi, correspondant de la chaîne au Maroc, et son frère, Omar, rédacteur en chef principal basé à Dubaï.
Le licenciement des deux journalistes est intervenu deux jours après l’allocution télévisée du ministre au sujet du discours de Mohamed VI, le 17 juin, dans lequel le monarque marocain avait annoncé la tenue de ce référendum.
"Nous dénonçons l’intervention personnelle du ministre marocain de l’Information afin d’obtenir la tête de deux journalistes. Il est inadmissible qu’un représentant de l’Etat utilise son pouvoir de la sorte. On est bien loin des promesses de réformes démocratiques annoncées par Mohamed VI dans son discours du 17 juin. Il est temps que le Maroc tourne la page de ces pratiques archaïques d’interférence du politique dans la sphère médiatique et judiciaire s’il veut que ces principes démocratiques affichés deviennent une réalité", a déclaré Reporters sans frontières.
L’organisation a joint par téléphone Omar Makhfi, à Dubaï :
"Le 19 juin, le mouvement du « 20 février » avait appelé à l’organisation de manifestations pour protester contre la tenue du référendum. Durant le journal télévisé, le présentateur a interrogé Jalal Makhfi, au téléphone depuis Rabat, sur les réactions au Maroc suite au discours du roi. Ce dernier a alors fait mention de ces manifestations, en citant le communiqué du mouvement, le plus neutralement et professionnellement possible. La chaîne a par la suite contacté le ministère pour avoir le point de vue des autorités. Mais au lieu de répondre aux questions du commentateur, Khalid Naciri s’en est pris au correspondant, l’accusant d’être pro-"20 février". Après l’interview, le ministre a appelé la coordinatrice des interviews de la chaîne pour lui dire qu’il allait demander des comptes politiques au journaliste. Or, en regardant à nouveau l’interview, on n’a rien trouvé de contraire à l’éthique professionnelle. Mais on a décidé d’appeler le ministre, pour lui permettre de s’exprimer cette fois sur la constitution, loin de la polémique avec le correspondant. Il a donc pu s’exprimer une seconde fois sur l’antenne."
"Le ministre a alors appelé l’ambassade des Emirats arabes unis à Rabat pour se plaindre du correspondant au Maroc de Dubaï TV. Le 21 juin, deux jours plus tard, le directeur de l’information de la chaîne m’a annoncé que j’étais licencié, ainsi que mon frère. La chaîne n’y est pour rien. Le directeur de l’information lui-même était bouche bée en me lisant la note du département des ressources humaines. La décision a pris effet immédiatement : dès le lendemain, j’étais au chômage. Mais la chaîne a été réglo à mon égard. Aujourd’hui, on est le 29 juin, et je n’ai toujours pas reçu d’explication sur le fait que j’avais également été licencié, alors même que je travaille depuis huit ans à Dubaï TV, et que mon contrat venait d’être renouvelle le 11 juin dernier. La seule chose qu’on trouve à me dire, à l’oral : ‘on n’a rien à vous reprocher’", a-t-il ajouté.
Avant de conclure : "Ce qui est grave, c’est que l’affaire ne soit pas restée au niveau médiatique. C’est la première fois qu’un ministre utilise son statut de représentant de l’Etat pour régler des comptes personnels et licencier un journaliste qu’il ne trouve pas à son goût".
Lire : http://fr.rsf.org/emirats-arabes-unis-quand-le-ministre-de-l-information-30-06-2011,40557.html
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MOROCCO : Moroccan information minister has two Dubai TV journalists fired
Reporters Without Borders is appalled to learn that Moroccan information minister Khalid Naciri obtained the dismissal of Dubai TV chief editor Omar Makhfi and his brother, Jalal, the station’s Morocco correspondent, on 21 June because Jalal referred on the air to opposition calls for protests against tomorrow’s referendum in Morocco on a proposed constitutional reform.
The journalists were fired two days after the minister gave a televised address about King Mohammed’s 17 June speech announcing the referendum.
“We condemn the Moroccan information minister’s personal intervention in order to obtain the heads of these two journalists,” Reporters Without Borders said. “It is unacceptable that a government representative should behave in this manner. This is a long way from the democratic reforms that King Mohammed announced on 17 June.”
The press freedom organization added: “It is time that Morocco turned the page on the archaic practice of political interference in the media and judicial spheres if it wants its proclaimed democratic principles to become a reality.”
Reached in Dubai, Omar Makhfi told Reporters Without Borders:
“The 20 February opposition movement issued a call on 19 June for demonstrations against the holding of the referendum. During the news programme, the presenter interviewed our Morocco correspondent, Jalal Makhfi, by telephone about the reactions in Morocco to the king’s speech. Our correspondent referred to the demonstrations and quoted the opposition movement’s communiqué in a completely neutral and professional manner. The station then contacted the minister for the government’s viewpoint. But instead of answering the commentator’s questions, Khalid Naciri attacked our correspondent, accusing him of being pro-20 February.
“After the interview, the minister called the station’s interview coordinator and told her he was going to demand a political accounting for the journalist. We took another look at the interview and found no violation of professional ethics. But we called the minister to allow him to express his views on the constitution, without the dispute with our correspondent getting in the way. As a result, he was able speak on the air a second time.
“The minister then called the United Arab Emirates embassy in Rabat to complain about Dubai TV’s Morocco correspondent. Two days later, on 21 June, the station’s news director told me that my brother and I had been fired. The station had no role in this. The news director was flabbergasted when he read me the note from the department of human resources. It took effect immediately. The next day, I was unemployed. But the station was honest with me.
“It is now 29 June and I still have not been told why I was fired, although I worked for Dubai TV for eight years and my contract had just been renewed, on 11 June. All they did was tell me verbally: ‘We have no criticism to make against you.’ What’s serious is that this matter did not remain at the media level. It is the first time that a minister has used his status as a government representative to settle a personal score and obtain the dismissal of a journalist he did not like.”
To read : http://en.rsf.org/united-arab-emirates-moroccan-information-minister-has-30-06-2011,40558.html
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Arabic : http://arabia.reporters-sans-frontieres.org/article.php3?id_article=3206
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Naciri-Gate : L’homme par qui tous les scandales arrivent
Jalal Makhfi et Omar Makhfi, respectivement correspondent de la chaîne Dubai TV et Rédacteur en chef à la même chaîne, ont été licenciés suite à des pressions exercées par le ministre de la Communication et le porte-parole du Gouvernement Khalid Naciri. Voilà les faits tels qu’ils ont été rapportés par Omar Makhfi dans une lettre adressée à la presse.
Par Leila Ait Bouzid pour Mamfakinch ! 28/6/2011
Le 21 juin 2011, Omar Makhfi reçoit une lettre de la direction de sa chaîne l’informant de la fin de son contrat après 8 ans de carrière. Son frère Jalal a été également licencié. Ces deux licenciements n’ont pas été justifiés par écrit, mais les responsables de la chaîne diront à Omar Makhfi «avoir subi des pressions de la part du Maroc».
L’affaire remonte au 19 juin, lorsque la chaîne de Dubai prend attache en direct avec son correspondant lui demandant de l’informer de l’avenir des manifestations du mouvement du 20 février après le discours royal du 17 juin. Jalal Makhfi, comme le montre la vidéo, décrit la situation sur le terrain en total respect des règles du métier et sans complaisance envers une partie ou une autre.
Le présentateur du journal télévisé donnera par la suite la parole au ministre de la Communication lui demandant, toujours en direct, d’expliquer les nouveautés de la nouvelle constitution, telles qu’énoncés par le Roi du Maroc. Au lieu de répondre à la question, le ministre s’est violemment pris au correspondant l’accusant d’avoir détourné la réalité à cause de son appartenance au mouvement du 20 février (voir vidéo).
Il a ensuite appelé la chaîne pour «griller» Jalal Makhfi, menaçant de «le poursuivre politiquement» !
Sous la pression du Maroc, la chaîne de Dubai finit donc par licencier Jalal El Makhfi et même son frère qui a subi les dommages collatéraux de la colère ministérielle même s’il n’avait aucun lien avec le mouvement du 20 février.
La ministre marocain a utilisé sa puissance transfrontalière pour sanctionner deux journalistes marocains dans l’exercice de leur métier. C’est une première. Même le régime syrien, malgré les attaques virulentes dont il fait l’objet, n’a pas recouru à ce genre de pratiques dans ses relations avec les correspondants.
Les journalistes Marocains considèrent que les agissements de Khalid Naciri sont en contradiction flagrante avec la liberté d’expression édictée dans la nouvelle Constitution qui sera soumise au vote vendredi prochain.
A l’heure où ce post a été écrit, le ministre de la Communication n’a émis aucune réaction alors que sur Facebook, l’indignation est à son comble. Les internautes marocains se demandent si l’appartenance au mouvement du 20 février était un délit susceptible de sanction dans les yeux du Maroc.
Les deux frères sont lauréats de l’Institut Supérieur de l’Information et de la Communication de Rabat. Jalal a exercé dans de nombreux magazines marocains avant de travailler en tant que free lance pour la chaîne de Dubaî. Omar Makhfi, son frère aîné, y était Rédacteur en chef depuis 2003 et il est également formateur agrée par la BBC. Avant Dubai TV, il était rédacteur en chef à la chaîne iranienne Al Alam. Il faisait partie de la première vague de journalistes marocains recrutés par les chaînes de Golfe grâce à la notoriété journalistique marocaine. Avant, Omar a travaillé à 2M, à l’Economiste et à Maghrib Al Yaoum.
http://www.mamfakinch.com/naciri-gate-lhomme-par-qui-tous-les-scandales-arrivent/
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