Le second mandat du Sud-Coréen, à la tête des Nations unies depuis 2007, s'achève en fin d'année. Peut-être est-ce le moment de s'interroger sur le rôle du secrétaire général ?
Cherchez bien sur photo de famille de la Conférence de Paris sur le Proche-Orient,
vous reconnaîtrez peut-être Ban Ki-moon. Pas si sûr, car, à quelques
mois de la fin de son second mandat de cinq ans à la tête des Nations
unies, le diplomate sud-coréen reste un illustre inconnu du grand
public, une figure centrale et néanmoins transparente de la vie
internationale.
L’hebdomadaire britannique "The Economist" le qualifiait
récemment de "pire secrétaire général" de l’histoire de l’organisation
née en 1945 sur les décombres de la Seconde Guerre mondiale. C’est sans
doute excessif (souvenez-vous de Kurt Waldheim…),
et surtout immérité pour un homme justement choisi il y a dix ans parce
qu’il ne risquait pas de faire trop d’ombre aux grandes puissances, les
cinq membres permanents du Conseil de Sécurité.
Mais le fait est que son bilan est maigre, particulièrement à une époque où les tensions montent, en Afrique centrale et orientale, au Proche et au Moyen-Orient, ou encore en Asie, autour de la mer de Chine méridionale. Dans tous ces conflits, l’ONU peine à exister, quand elle n’est pas simplement ignorée ou bafouée par les protagonistes.
La procédure, si peu transparente, est entre les mains des cinq détenteurs historiques du droit de veto – Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie –, qui finissent généralement par s’entendre sur le plus petit dénominateur commun. Aucun d’entre eux n’a envie de voir un secrétaire général de l’ONU susceptible de s’opposer à lui, ou même, plus modestement, d’avoir une autonomie de pensée et d’action.
70 ans de l'ONU : ils jugent les Casques bleus
Une campagne de la société civile internationale, baptisée "1 for 7 billion" (un homme ou une femme pour représenter 7 milliards d’êtres humains), propose de changer les règles de recrutement du secrétaire général. Elle souhaite y ajouter la voix des citoyens du monde, pour permettre un choix fondé sur le mérite plutôt que sur les arrière-pensées diplomatiques des grandes chancelleries, et suggère un mandat unique de sept ans au lieu de deux mandats de cinq ans.
Le monde est entraîné vers de nouvelles "guerres froides", aux confins de l’Europe ou dans les mers chaudes d’Asie, et les grandes puissances ne veulent pas voir se réduire leurs prérogatives. L’heure n’est vraiment pas au "gouvernement mondial", pas même aux idéaux fondateurs des Nations unies qui, il est vrai, n’ont véritablement existé que quelques mois, comme me le disait un jour l’un de ses premiers diplomates, le Britannique Brian Urquhart.
L’absurdité des rotations géographiques fait que ce serait cette fois au tour de l’Europe de l’Est de fournir le secrétaire général, qui serait pour la première fois une femme. Mais le monde a besoin, et mérite beaucoup mieux qu’une sélection par quotas pour accommoder les antipathies de cinq grands pays. La France s’honorerait de casser ce consensus néfaste, et de proposer un autre processus, ouvert et citoyen. Mais là encore cette idée est utopique : la France, comme les autres, pense que son intérêt exige un secrétaire général qui ne fasse pas de vagues et qu’on reconnaisse à peine sur les photos de famille. Le monde ne s’en portera pourtant pas mieux.
Pierre Haski
François Hollande, entouré de Ban Ki-moon et du ministre des Affaires étrangères
Jean-Marc Ayrault. (Kamil Zihnioglu/AP/SIPA)
Jean-Marc Ayrault. (Kamil Zihnioglu/AP/SIPA)
Mais le fait est que son bilan est maigre, particulièrement à une époque où les tensions montent, en Afrique centrale et orientale, au Proche et au Moyen-Orient, ou encore en Asie, autour de la mer de Chine méridionale. Dans tous ces conflits, l’ONU peine à exister, quand elle n’est pas simplement ignorée ou bafouée par les protagonistes.
Une procédure opaque
A l’heure où le processus de sélection du successeur de Ban Ki-moon est lancé, peut-être est-ce le moment de s’interroger sur le rôle et la personnalité du secrétaire général, et sur la place de l’ONU dans un monde multipolaire qui tourne mal ?La procédure, si peu transparente, est entre les mains des cinq détenteurs historiques du droit de veto – Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie –, qui finissent généralement par s’entendre sur le plus petit dénominateur commun. Aucun d’entre eux n’a envie de voir un secrétaire général de l’ONU susceptible de s’opposer à lui, ou même, plus modestement, d’avoir une autonomie de pensée et d’action.
70 ans de l'ONU : ils jugent les Casques bleus
Une campagne de la société civile internationale, baptisée "1 for 7 billion" (un homme ou une femme pour représenter 7 milliards d’êtres humains), propose de changer les règles de recrutement du secrétaire général. Elle souhaite y ajouter la voix des citoyens du monde, pour permettre un choix fondé sur le mérite plutôt que sur les arrière-pensées diplomatiques des grandes chancelleries, et suggère un mandat unique de sept ans au lieu de deux mandats de cinq ans.
Nouvelles "guerres froides"
Mais ces propositions, ou celles des "Elders" (les Anciens), un groupe d’ex-dirigeants politiques dont fait partie le prédécesseur de Ban Ki-moon, le Ghanéen Kofi Annan, sont pour le moment à ranger au rayon des utopies.Le monde est entraîné vers de nouvelles "guerres froides", aux confins de l’Europe ou dans les mers chaudes d’Asie, et les grandes puissances ne veulent pas voir se réduire leurs prérogatives. L’heure n’est vraiment pas au "gouvernement mondial", pas même aux idéaux fondateurs des Nations unies qui, il est vrai, n’ont véritablement existé que quelques mois, comme me le disait un jour l’un de ses premiers diplomates, le Britannique Brian Urquhart.
L’absurdité des rotations géographiques fait que ce serait cette fois au tour de l’Europe de l’Est de fournir le secrétaire général, qui serait pour la première fois une femme. Mais le monde a besoin, et mérite beaucoup mieux qu’une sélection par quotas pour accommoder les antipathies de cinq grands pays. La France s’honorerait de casser ce consensus néfaste, et de proposer un autre processus, ouvert et citoyen. Mais là encore cette idée est utopique : la France, comme les autres, pense que son intérêt exige un secrétaire général qui ne fasse pas de vagues et qu’on reconnaisse à peine sur les photos de famille. Le monde ne s’en portera pourtant pas mieux.
Pierre Haski
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