Regroupées au sein du collectif BDS Maroc, 22 associations marocaines ont appelé au boycott des dattes israéliennes pendant le mois de ramadan. Si elles peuvent compter sur le soutien de nombreux Marocains, ces associations se heurtent à la réalité d'un commerce informel difficile à tracer.
C’est un sujet qui se pose tous les mois de ramadan mais, cette année, le collectif BDS Maroc (Boycott, désinvestissement, sanctions)
a décidé de mettre le paquet. Depuis un mois, il mène des campagnes de
sensibilisation dans les marchés de gros de Casablanca, Rabat, Salé et
Marrakech afin de demander aux commerçants de retirer de leurs étals les
dattes d’origine israélienne, un produit dont la consommation connaît
un pic pendant le mois sacré. « Nous essayons de les sensibiliser à
l’enjeu politique de la commercialisation de ce genre de produits qui
cautionne et soutient la guerre menée par l’armée israélienne contre les
Palestiniens de Gaza. Nous les exhortons aussi à être très attentifs à
leur origine, souvent camouflée », explique Sion Assidon, membre
fondateur du collectif BDS Maroc.
Un succès mitigé
Ancien prisonnier politique, figure de
proue du mouvement associatif au Maroc, il est l’un des opposants
acharnés contre la normalisation des relations entre le Maroc et Israël.
Depuis plusieurs années, il mène campagne contre toute
commercialisation de produits israéliens dans le royaume. Face à des négociations de paix qui sont au point mort, il estime que le levier de pression économique permet aux Palestiniens d’inverser le rapport de forces avec leur voisin.
À en croire le mouvement BDS Maroc, la
campagne de boycott des dattes israéliennes a visiblement fait son effet
auprès d’un public marocain largement acquis à la cause palestinienne.
Après trois semaines de sensibilisation, ces dattes ne circulent plus
dans les marchés de gros, assure le mouvement. En tout cas, pas dans des
emballages où on peut facilement identifier leur origine. « Car il y a
de fortes chances, poursuit le mouvement, qu’elles aient été sorties de
leurs boîtes et stockées dans l’attente de les vendre en vrac dans les
souks !».
Problème de traçabilité
Les initiateurs de la campagne de boycott
s’abstiennent de crier victoire car il savent qu’il ont à faire à un
commerce informel, soumis à une multitude d’intermédiaires. La plupart
des dattes israéliennes, de qualité supérieure, arrivent au Maroc à
travers les circuits de contrebande qui transitent par l’enclave
espagnole de Ceuta ou via des importateurs établis au Maroc, dont un à
Tanger et qui commercialise les marques King Soloman et Jordan River,
cultivées en Israël.
Pour faire face à ce problème de
traçabilité, les 22 associations, membres du collectif de boycott, ont
adressé une lettre à l’Office national de la sécurité sanitaire des
produits alimentaires (ONSSA), faisant valoir un enjeu de santé
publique. Ils lui ont demandé de prendre des mesures strictes en vue
d’arrêter l’importation de ces dattes qui inondent le marché marocain
durant le mois de ramadan.
Le commerce avec Israël, un sujet tabou
Le commerce avec Israël est un sujet
tabou au Maroc, ce dernier ayant interrompu ses relations diplomatiques
avec Tel Aviv en 2000, date à laquelle le bureau de liaison israélien à
Rabat a été fermé. Depuis, leurs relations sont entrées dans la
discrétion. Entre 2014 et 2015, leurs échanges commerciaux ont même
triplé, avec une balance excédentaire pour Israël. Selon les chiffres du
Bureau israélien central des statistiques (BCS), les importations en
provenance d’Israël se sont élevées à 23 millions de dollars en 2015
-essentiellement des produits phytosanitaires et électroniques- contre
10,6 un an auparavant. Il lui a vendu pour 15,6 millions de dollars-
dont des conserves de poisson et des pâtes alimentaires- contre 6,6
millions en 2014.
Nadia Lamlili
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