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mardi 8 mars 2016

Pour le 8 Mars : Quelques poèmes de Saida Menebhi pour les femmes du Maroc et du monde



Quelques poèmes de Saïda Menebhi, décédée en prison le 11 décembre 1977 à la suite d'une grève de la faim


Nous marchions
La tête haute, le regard perdu
Tu parlais d’un monde merveilleux
Qui viendrait car nous le voulons.
Dans ce monde, disais-tu,
Les enfants ne connaîtront plus la misère,
Les mamans n’abandonneront plus leurs bébés,
Les femmes ne seraient plus battues,
Méprisées, avilies.
Nous marchions, encore et toujours
Comme des fous et des damnés,
Lorsque nous sommes arrivés,
Déjà je rêvais.

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Fasciste, Fasciste,
Mille fois fasciste.
Un million de fois,
Je voudrais le répéter
Jusqu’à tant
Que je serai rassasiée.
Je suis un volcan en activité,
Et mes laves,
Sur tous les fascistes de Pinochet,
Je veux les cracher.
Fascistes et peureux,
Si vous croyez nous avoir
C’est plus de force que nous avons.
Quand vous nous réprimez
La porte en bois est insuffisante.
Mettez donc un mur,
c’est tout à fait admissible
Étant donné votre nature.
Mais la honte sera sur vos fronts
Demain, lorsque nous vaincrons.
Les mots m’échappent
Comme un feu
Et me brûlent les lèvres.
Criez, n’acceptez plus,
Vous qui êtes là
Derrière la porte en bois.
Nous, nous continuerons
À combattre, à refuser,
jusqu’à l’abattoir.
Et nos têtes,
Sur la lame,
Et jamais, jamais
Dans nos yeux
La crainte, ils verront.
Jamais, la maladie du silence
Ne nous atteindra.
Vous, mes sœurs
Troupeaux de bêtes,
C’est cela que vous semblez.
Et moi, les mains liées,
La gorge nouée, la nausée me prend,
De tous les fascistes et leurs pions.
Oh, vous qui ne comprenez pas,
Je me sens fatiguée,
Les épaules courbées
Par trop de souffrance,
De privation et de répression.
Mais nos pensées et l’envie de lutter,
Ni les années de prison,
Ni leur porte de bois
Et leurs griffes,
Ne me les enlèveront.
Je mourrai marxiste-léniniste.

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La prison, c’est laid
Tu la dessines, mon enfant
Avec des traits noirs
Des barreaux et des grilles.
Tu imagines que c’est un lieu sans lumière,
Qui fait peur aux petits.
Aussi, pour l’indiquer
Tu dis que c’est là-bas.
Et tu montres avec ton petit doigt
Un point, un coin perdu
Que tu ne vois pas.
Peut être la maîtresse t’a parlé
De prison hideuse,
De maison de correction,
Où l’on met les méchants
Qui volent les enfants.
Dans ta petite tête
S’est alors posé une question :
Comment et pourquoi,
Moi, qui suis pleine d’amour pour toi
Et tous les autres enfants,
Suis-je là-bas ?
Parce-que je veux que demain,
La prison ne soit plus là…

————————————————
Le vent de mon pays
Souffle, hurle, gronde
Sur la terre humide qu’il balaie.
Il trace des figures,
Il grave un passé
Le mien, le tien, celui de chacun.
Son bruit me rappelle une symphonie
Celle que tu susurrais à mon oreille chaque nuit
Avant, il y a longtemps déjà
Aujourd’hui, ce soir, cette nuit.
Seules les empreintes de la vie
Me reviennent à l’esprit.
Et la pluie tenace, le vent têtu,
Reviennent comme chaque année,
Et me ramènent à toi,
Aussi loin que tu sais.
Me rappellent encore,
Que j’ai un corps, que j’ai une voix,
Que j’élève en offrande à toi.

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