Ban Ki-moon se rendra finalement en Algérie selon le calendrier prévu
initialement en dépit du forcing des autorités marocaines pour un report
de cette visite au mois de juillet prochain. Cette visite prévue du 7
au 9 mars prochain intervient sur fond de tension entre Alger et Rabat
mais mènera quand même le secrétaire général de l’ONU à Tindouf dans les
camps de réfugiés sahraouis où est ardemment espérée une avancée
notable dans le règlement du dernier conflit de décolonisation au monde.
Abla Chérif - Alger (Le Soir) - De ce fait, le déplacement de Ban
Ki-moon est perçu comme un véritable évènement sur au moins deux points.
D’abord parce qu’il a décidé de faire de lui-même le point sur le
dossier sahraoui, de s’enquérir des violations des droits de l’Homme à
El-Ayoun (territoire occupé du Sahara occidental) et de présenter son
rapport au Conseil de sécurité en avril prochain. Ensuite parce qu’il a
fait face et déjoué toutes les manœuvres marocaines tendant à lui faire
d’abord annuler puis reporter son déplacement dans la région et plus
particulièrement encore à El-Ayoun. Mohammed VI n’a pas hésité à lui
demander de manière officielle (par lettre) de reporter sa visite
provoquant ainsi la colère du secrétaire général de l’ONU qui a menacé
de se rendre uniquement dans les camps de réfugiés sahraouis, à Tindouf,
si le roi persistait dans sa demande.
L’affaire a pris des proportions telles qu’elle a poussé tous les
membres du Conseil de sécurité de l’ONU à afficher leur soutien à Ban
Ki-moon afin d’aboutir à une solution politique à un conflit qui n’a que
trop duré. La position du Conseil de sécurité s’est fait entendre
publiquement de façon à contre-carrer l’offensive marocaine et dévoiler
son objectif, à savoir gagner du temps jusqu’à parvenir à la fin du
mandat de Ban Ki-moon qui arrive à échéance à la fin 2016. Fait nouveau,
l’appui à cette tournée a été exprimé y compris par la France dont les
positions se rapprochent habituellement des thèses marocaines sur le
sujet, et en dépit de la récente visite de Mohammed VI à Paris où il
s’est entretenu avec François Hollande.
Tous ces éléments laissent donc
supposer l’existence d’une volonté d’entamer un tournant nouveau dans le
traitement du dossier de décolonisation du Sahara occidental, volontairement maintenu dans l’impasse depuis 1991, date de la signature
d’un cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario pour
l’organisation d’un référendum d’autodétermination sous les auspices de
l’ONU et de l’OUA. Près de trente années après, aucune avancée n’a été
enregistrée. Le dossier sahraoui demeure au stade premier, otage de
manœuvres marocaines décriées par une bonne partie de la communauté
internationale. C’est le signe d’échec aussi et surtout des différents
secrétaires généraux des Nations-Unies qui se sont succédé. Boutros
Ghali et même Kofi Annan ont très peu œuvré pour l’aboutissement du
processus de décolonisation, mais voilà que Ban Ki-moon semble réaliser
«l’urgence d’une solution» car, déclarait-il récemment encore, «la
persistance de ce conflit pourrait constituer une bombe à retardement».
Parviendra-t-il à une solution là où d’autres ont échoué ? Sa volonté et
le soutien des quinze membres permanents du Conseil de sécurité
constituent à cet effet des atouts majeurs à même de déboucher sur une
issue historique.
A. C.
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