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samedi 28 novembre 2015

Les chiffres alarmants des violences faites aux femmes au Maroc



 |  Par Solène Paillard, 26/11/2015
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ÉGALITÉ - En matière de lutte contre les violences faites aux femmes, des progrès notables ont été enregistrés mais de nombreux défis demeurent.
Tel est le constat émis par Leila Rhiwi, représentante du bureau multi-pays de l’ONU Femmes pour le Maghreb à l'occasion de la Journée mondiale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes tenue mercredi 25 novembre, au moment où un sit-in était organisé par plusieurs associations féministes devant le Parlement à Rabat.
Parmi les axes d'amélioration, "la promotion de l'accès des femmes à la justice, la lutte contre l'impunité des auteurs de violences, la mise en place d'une politique préventive (…) et une remise en question des modèles comportementaux masculins", a énuméré Leila Rhiwi.

Des chiffres qui inquiètent
Dévoilés par la Fédération de la ligue démocratique des droits des femmes (FLDDF), les chiffres des violences faites aux femmes pour l’année 2014 sont alarmants: l’association a enregistré 2.472 plaintes et 8.432 actes de violences. Parmi elles, la violence psychologique (insultes, critiques permanentes, humiliation...) est prépondérante, totalisant 47 % des cas.
Vient ensuite la violence économique (confiscation du salaire, des documents administratifs ou encore le non-versement des pensions alimentaires) avec 27 % et la violence physique, 15 %. Enfin, la violence juridique, qui englobe notamment le mariage des mineurs et la polygamie (7 %) et la violence sexuelle (4 %).

"En revanche, nous n’avons pas connaissance du nombre de femmes qui décèdent sous les coups de leur mari pour deux raisons : d’une part, certains meurtres ont été fait passer pour des suicides, d’autre part, le ministère de la Justice refuse de nous fournir les chiffres alors que la Constitution nous garantit formellement le droit à l’information", dénonce Fouzia Assouli, présidente de la Fédération de la ligue démocratique des droits des femmes (FLDDF), contactée par le HuffPost Maroc.

La loi du silence
Au sein du couple, plus de 6 Marocaines sur 10 ont été victimes de violences conjugales, soit un peu plus de 6 millions de femmes. Autre chiffre parlant: seulement 3 % des femmes osent porter plainte et à peine 1 % des hommes coupables de violences sont poursuivis pénalement, d'après les résultats de l’enquête nationale sur la prévalence de la violence à l’égard des femmes pour l’année 2010, publiés par le Haut commissariat au plan (HCP).

Que dit la loi?
Initié en 2013, le projet de loi contre la violence faite aux femmes "ne traite pas la violence conjugale en tant que telle, mais comme une violence parmi d'autres. Il fait par exemple la confusion entre la violence à l’égard des femmes et celle dont sont victimes les enfants. Ce sont deux choses totalement différentes que le gouvernement n’a pas prises en compte", fustige Fouzia Assouli. Sans compter que la question du viol conjugal et de la prostitution n’a pas été soulevée par ce projet de loi. Présenté en novembre 2013, ce texte n’a d’ailleurs toujours pas été examiné par le Secrétariat général du gouvernement.
D'autres projets de loi visant à criminaliser le harcèlement sexuel ont du reste été présentés ces dix dernières années, mais restent souvent bloqués.
"Aucun des projets déposés depuis 2006 n’a été adopté jusqu’à aujourd’hui, et il y a un flou total sur la question du harcèlement sexuel", avait récemment indiqué au HuffPost Maroc Nouzka Skalli, ancienne ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité reconnue pour son combat pour l’émancipation des femmes au Maroc.
"Une interprétation religieuse"
Fouzia Assouli déplore des lacunes en termes de formation auprès des autorités publiques et des assistantes sociales. "La sensibilisation ne se fait pas seulement à travers les médias. C’est la société toute entière qui doit être informée", préconise-t-elle. Des carences qui renforcent une mentalité patriarcale: "Il y a des blocages auprès des décideurs sur l’évolution des rapports homme-femme, comme dans d’autres pays. Sauf qu’au Maroc, nous peinons énormément à faire évoluer ces positions", souligne Nouzka Skalli.

L’approche des droits humains censée être privilégiée par la justice est substituée à une "interprétation religieuse" des violences faites aux femmes, déplore encore Fouzia Assouli de la FLDDF. "Elles ne sont pas considérées comme une atteinte à l’intégrité physique et psychique, mais comme une violation des mœurs. Quand on viole une femme par exemple, c’est avant tout le vœu de chasteté que l’on entache, et non la dignité de la personne. Il s’agit d’une conception très conservatrice."
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