Rabat.- Mustapha Adib, un ex-capitaine des Forces armées royales (FAR),
condamné à deux ans de prison et expulsé de l’armée pour avoir osé
dénoncer la corruption de ses supérieurs, écrit une lettre au roi
Mohamed VI.
Appel adressé à Mohamed VI, roi du Maroc
de la part de Mustapha ADIB Ex-Capitaine de l’armée marocaine :
Soyez intelligent et pro-réactif pour l’intérêt effectif de tous.
Mohamed VI,
Comme vous le savez et comme le sait maintenant la majorité du peuple
marocain, le bilan de la dynastie alaouite, dont vous êtes le
représentant, est très négatif. Durant les règnes successifs des
monarques alaouites, jamais les Marocains n’ont été respectés par leurs
dirigeants. Ces derniers les ont toujours considérés comme un peuple
inférieur, de second rang. Certains monarques en étaient tellement
convaincus qu’ils avaient même livré le Maroc à l’étranger – le
Protectorat – avec pour seul souci de rembourser leurs dettes
personnelles contractées auprès de pays étrangers. Ces monarques
pensent, pour des raisons mystérieuses, que le Maroc est leur propriété,
et que les Marocains sont leurs esclaves.
Le pire est que, même à notre époque, aucun monarque n’a eu le
courage de reconnaitre les nombreux torts de cette dynastie qui s’est
distinguée par de multiples faits de corruption, de dérives et de
crimes. Aucun monarque n’a pu ou su réconcilier cette dynastie avec le
peuple marocain, comme si celui-ci n’avait pas d’autre alternative que
de passer sa vie à se soumettre à ses desiderata et à ses caprices et à
vivre dans l’humiliation et l’indignité.
Ainsi, durant le règne de Hassan II, le peuple marocain en a vu de
toutes les couleurs : dahirs à profusion, constitution taillée sur
mesure, pouvoir absolu du roi, répression féroce du peuple, disparitions
forcées des opposants, corruption généralisée, dilapidation de l’argent
public par le palais et ses affidés, clientélisme omniprésent, etc.
Quand le peuple voulait exercer son droit légitime de manifester, Hassan
II n’hésitait pas à donner l’ordre à l’armée de l’époque, gendarmerie
comprise, de tirer à balles réelles sur des manifestants désarmés. Des
centaines de personnes sont mortes ainsi, des milliers d’autres
blessées, sans compter les disparus.
Avant même que vous ne montiez sur le trône, le makhzen a tenté de
donner de vous l’image d’un futur roi différent des autres : roi des
pauvres, roi anti-corruption, roi anti-favoritisme et clientélisme, roi
ouvert d’esprit, et j’en passe. Bref, le souverain qui allait
réconcilier le peuple avec la dynastie alaouite.
Aujourd’hui, les Marocains n’ont plus de doute : tout cela n’était
qu’une mascarade du makhzen destinée à vous assurer une transition
maitrisée. Force est de constater que rien n’a fondamentalement changé
pour eux et pour leur vie quotidienne.
Mohamed VI,
En tant que citoyen très attaché à mon pays, je ne souhaite pas voir
des Marocains manifester comme en ce moment dans d’autres pays arabes et
mourir par centaines. Je ne souhaite pas non plus revenir aux jours
sombres du règne de Hassan II. Enfin, je ne voudrais pas que vous vous
retrouviez dépassé par de graves événements. C’est pourquoi, sans
préavis, j’ai décidé de lancer un double appel, à vous-même et à l’armée
marocaine, en espérant que vous prendrez personnellement les décisions
adéquates, loin des « conseils » de ceux qui tirent déjà profit de la
situation actuelle. Loin également des conseils des partisans de
méthodes sécuritaires archaïques.
Si ma démarche devait conduire à mon arrestation ou pire encore,
sachez que j’en serais honoré. Car comme des dizaines de millions de mes
compatriotes, je ne supporte plus les nombreuses injustices causées par
votre régime et ses vautours.
Mohamed VI,
Je vous invite à prendre sans tarder les mesures attendues par
l’immense majorité des Marocains, en vous priant instamment de ne pas
tergiverser ou recourir à toutes sortes de prétextes ou d’excuses
destinées à gagner du temps. Je vous demande ainsi d’annoncer sans
délais :
1- Le début de consultations pour une nouvelle Constitution, ou, au
moins, une réforme profonde de l’actuelle Constitution, en prenant en
compte les aspirations légitimes du peuple marocain et notamment, la
séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Il faudra y
reconnaitre la suprématie de la Constitution nationale ainsi que celle
des Conventions Internationales sur le droit interne en cas de conflit.
2- Le début de consultations pour une réforme radicale de notre
système judiciaire qui ne répond ni aux attentes des Marocains, ni à
celles de nos partenaires étrangers. C’est toute la crédibilité du Maroc
qui est également en jeu.
3- L’arrestation immédiate des personnes impliquées dans les affaires
de corruption et de violation des Droits de l’Homme au Maroc, et le gel
de tous leurs avoirs au Maroc et à l’étranger, en vue de les présenter à
la justice. Ces arrestations ne doivent épargner aucune personne,
quelle que soit son degré de proximité ou de collaboration avec la
famille royale.
Mohamed VI,
Des décisions en ce sens, même si elles doivent être suivie d’autres,
notamment celles relatives au social et à l’économie, contribueraient à
calmer les esprits et à rétablir la confiance. Il est temps que vous
choisissiez clairement et courageusement votre camp : celui du peuple.
Vous devez bien le comprendre, Mohamed VI : choisir son camp après la
révolte sera certainement trop tard. Un bon chef d’état est celui qui,
en voyant la révolution se préparer, la provoque lui-même. Et il n’y a
pas de honte en cela.
Vive un Maroc libre !
Vive un Maroc juste !
Vive un Maroc fraternel !
Vive le Maroc !
Vive un Maroc juste !
Vive un Maroc fraternel !
Vive le Maroc !
– Ex-Capitaine de l’armée de l’air au Maroc ;
– Ancien détenu d’opinion suite à la dénonciation de la corruption au sein de l’armée
– Site internet : http://www.adib.fr
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