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samedi 19 juillet 2014

Point n°64 sur la campagne de parrainage des prisonniers politiques et d’opinion au Maroc


Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue des Suisses  92000 Nanterre

Point n°64 sur la campagne de parrainage des prisonniers politiques et d’opinion au Maroc

Ahurissant ! Du jamais vu dans les annales judiciaires au Maroc. Les autorités marocaines innovent en termes de chefs d’accusation pour poursuivre des militant(e)s. Leur dernière trouvaille : À Tanger elles ont réussi à transformer une victime d’enlèvement et de torture en une accusée d’ « allégations mensongères ». Pour le même prix et en lien avec le même dossier, elles vont même jusqu’à arrêter et poursuivre un autre militant pour « avoir aidé la première personne à inventer son histoire » et pour « entraves du cours de la justice ». Rien d’étonnant si l’on croit les dernières déclarations des ministres marocains de l’Intérieur, M. Hassad, et de la Justice, M. Ramid, qui disent tout mettre en œuvre pour s’attaquer à tout un chacun qui accuserait « à tort » les autorités marocaines de tortures. Le ministre de l’Intérieur a également accusé ouvertement les ONG marocaines des droits de l’Homme de vouloir porter atteinte à l’intégrité de ces autorités en véhiculant des mensonges et en délivrant à l’opinion publique de faux rapports sur l’état des libertés au Maroc. Pour lui, les ONG marocaines des droits de l’Homme répondraient à des agendas extérieurs qui mettent en danger « l’intégrité territoriale du Maroc ». La réaction des associations de défense des droits de l’Homme au Maroc n’a pas tardé à venir. Après la réunion du Comité marocain contre la torture, tenue le 1er juillet, d’autres ONG appellent en urgence à une réunion pour apporter la réponse adéquate à ces déclarations d’un autre temps. L’ASDHOM condamne fermement ces déclarations et accusations dangereuses et se joint aux autres associations au Maroc pour dénoncer ces manœuvres et intentions liberticides.
Revenons à ce qui s’est passé à Tanger.
Le 27 avril 2014, la jeune Wafa Charaf, militante tangéroise de l’AMDH, du mouvement 20-Février et du parti la Voie démocratique, déclarait avoir été enlevée, séquestrée plusieurs heures et torturée avant d’être abandonnée au bord d’une route à 12 km du centre de Tanger. Elle venait de participer à un rassemblement d’ouvriers de la zone franche de Tanger. Elle a depuis déposé plainte pour enlèvement et tortures. Elle va être constamment harcelée par le commissariat. Ses parents aussi, chose qu’elle n’a pas pu supporter au point qu’elle ait été hospitalisée d’urgence dans un hôpital psychiatrique. Elle sera arrêtée le 9 juillet au domicile de ses parents et traduite en état d’arrestation devant le tribunal de première instance de Tanger, lundi 14 juillet, pour avoir « fomenté » son histoire d’enlèvement et de tortures. Elle n’était pas la seule à être jugée dans cette affaire. La Brigade nationale de la police judiciaire, dépêchée de Casablanca, a conclu, après enquête et recherches (sic), qu’elle n’était pas seule à pouvoir monter de toutes pièces une telle accusation contre la police marocaine ! Il lui fallait un complice et la Brigade va vite le trouver en la personne de Boubker El-Khamlichi, responsable local du parti la Voie démocratique, retraité et ancien prisonnier politique des années 80 (groupe des 26 marxistes-léninistes d’Ilal Amam) et qui continue à militer activement notamment avec les Subsahariens installés dans la région ou encore avec les ouvriers qui veulent s’organiser en syndicat. Arrêté ou plutôt enlevé le 10 juillet, il va passer 24 heures au commissariat, qui a essayé de nier au début cette arrestation lorsque sa famille et ses amies sont venus demander de ses nouvelles, avant qu’il soit présenté au procureur du roi. Ce dernier décide de le poursuivre en liberté pour « entraves du cours de la justice ». Boubker El-Khamlichi dont la santé est très fragile des faits des séquelles des années de plomb est traduit au tribunal lundi 14 juillet en compagnie de la jeune Wafa Charaf qui, elle, est déjà placée en détention à la prison locale de Tanger. Leur procès a été reporté au 4 août prochain et le juge a refusé d’accorder la liberté provisoire à Wafa.
L’ASDHOM considère que les vrais raisons de ces deux arrestations sont politiques. Les autorités marocaines mettent en exécution les intentions affichées plus haut par les ministres de l’Intérieur et de la Justice et s’attaquent à tout citoyen épris de justice et de liberté qui veut défendre ses droits.
L’ASDHOM apporte tout son soutien à Wafa Charaf et à Boubker El-Khamlichi et demande aux autorités marocaines d’arrêter immédiatement toute poursuite à leur encontre. Elle les intègre tout naturellement à ses listes de victimes à parrainer.
Dans ce point, nous nous intéressons aussi à d’autres informations préoccupantes que nous recevons des autres groupes de parrainés. Et si nous le faisons, c’est pour informer nos parrains et marraines et l’opinion publique en général de l’amère réalité des prisonniers politiques et d’opinion au Maroc. Ceci est notre devoir ; n’est-ce pas Messieurs les ministres de l’Intérieur et de la Justice ?

Groupe Mineurs Imider-Syndicalistes-Ouarzazate
7 juillet : Après le jugement en première instance du 24 avril à l’encontre des trois militants d’Imider (voir points précédents), la Cour d’appel de Ouarzazate vient d’alourdir les peines en les faisant passer de 6 mois pour Omar Moujane et Brahim El-Hamdaoui et de 12 mois pour Abdessamad Madri à 3 ans de prison ferme et 60 000 dirhams chacun. Ces trois militants appartiennent au « Mouvement sur la voie de 96 » qui milite contre les conditions d’exploitation des mines d’argent d’Imider par la Société métallurgique d’Imider, une filiale de Managem (holding de la famille royale), et dénonce le pillage des richesses naturelles et le problème de la pollution engendrée. Ils sont accusé de « constitution d’une bande criminelle », « vol d’argent et commercialisation », « rassemblement non autorisé », « perturbation de la voie publique » ou encore « coups et blessures prémédités ». Rien que ça !
10 juillet : Dans la série des procès intentés au militant politique et syndicaliste, Hamid Majdi (CDT-PSU), le tribunal de première instance de Ouarzazate l’a condamné à un mois de prison ferme et 500 dirhams d’amende pour « entrave à la liberté de travail » (voir points précédents). Onze autres militants syndicalistes ont écopé de la même peine. Taki Ben Hassi a, quant à lui, écopé de 2 mois de prison ferme et de 500 dirhams d’amende.

Groupe UNEM-Fès-Taza-Marrakech
5 juillet : Les forces de l’ordre interviennent violemment pour disperser les étudiants et militants de l’UNEM qui occupent la faculté des sciences à Fès. Elles arrêtent l’un d’eux qui observe une grève de la faim. Mustapha Méziani est à son 44ème  jour de grève de la faim. Il vient d’être hospitalisé dans un état grave (vomissements de sang et évanouissements). Il a été présenté au tribunal le 11 juillet dans un état détérioré du fait de sa grève de la faim et placé en détention à la prison Ain Kadous avec le groupe des onze.
5 juillet : L’AMDH-section de Marrakech- interpelle le ministre de la Justice et l’Administration générale des prisons sur l’état du groupe UNEM-Marrakech (groupe dit d’Aziz El-Bour), qui mène une grève de la faim depuis le 27 juin pour l’amélioration des conditions de détention et leur regroupement.
14 juillet : Arrestation à Taza d’Azzedine Erroussi, un militant de l’UNEM-Taza. Une condamnation par contumace à un an de prison ferme avait été prononcée à son encontre lors d’un procès en appel (cassation) dans un ancien dossier. Rappelons qu’il avait purgé en 2010 une peine d’emprisonnement de 5 mois au cours desquels il avait observé une grève de la faim de 135 jours où il avait frôlé la mort. Nous n’avons pas de nouvelles quant à ta présentation au tribunal prévue le 15 juillet.

Groupe Sahraouis
5 juillet : Le procureur du roi décide de placer en détention, à la prison Lakhal de Laâyoune, le blogueur sahraoui Mahmoud Elhaissan (voir point précédent) et le jeune sahraoui Abdelkarim Bouchalka. Ils seront présentés au juge le 21 juillet 2014. C’est la première fois d’un procureur décide le placement en détention avant même que les prévenus ne soient traduits devant un juge pour savoir de quoi ils sont accusés ! 
8 juillet : La Cour d’appel de Laâyoune confirme la condamnation du prisonnier politique sahraoui, Abdessalam Loumadi, à 10 mois de prison ferme, prononcée le 7 mai dernier pour avoir participé à des manifestations réclamant l’autodétermination au Sahara occidental.  
11 juillet : Libération des journalistes et blogueurs sahraouis Sidi Sbai et Mohamed Jemour. Ils ont quitté la prison locale de Tiznit où ils avaient purgé une peine de 5 mois pour avoir voulu assisté à l’accueil à Ifni d’un autre prisonnier politique sahraoui, Mohamed Amzouz, le 11 février dernier.

L’ASDHOM suspend, le temps des vacances, ses points et vous promet de les reprendre en septembre avec un point « spécial fête de l’Humanité ».

Le bureau exécutif
Paris, le 17 juillet 2014


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