Association
de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue
des Suisses 92000 Nanterre
|
Point n°64 sur
la campagne de parrainage des prisonniers politiques et d’opinion au
Maroc
Ahurissant ! Du jamais vu dans les
annales judiciaires au Maroc. Les autorités marocaines innovent en termes de
chefs d’accusation pour poursuivre des militant(e)s. Leur dernière trouvaille :
À Tanger elles ont réussi à transformer une victime d’enlèvement et de torture
en une accusée d’ « allégations mensongères ». Pour le même prix et en lien avec
le même dossier, elles vont même jusqu’à arrêter et poursuivre un autre militant
pour « avoir aidé la première personne à inventer son histoire » et pour
« entraves du cours de la justice ». Rien d’étonnant si l’on croit les dernières
déclarations des ministres marocains de l’Intérieur, M. Hassad, et de la Justice, M. Ramid, qui disent tout mettre en œuvre
pour s’attaquer à tout un chacun qui accuserait « à tort » les autorités
marocaines de tortures. Le ministre de l’Intérieur a également accusé
ouvertement les ONG marocaines des droits de l’Homme de vouloir porter atteinte
à l’intégrité de ces autorités en véhiculant des mensonges et en délivrant à
l’opinion publique de faux rapports sur l’état des libertés au Maroc. Pour lui, les ONG marocaines des droits de l’Homme
répondraient à des agendas extérieurs qui mettent en danger « l’intégrité
territoriale du Maroc ». La réaction des associations de défense des
droits de l’Homme au Maroc n’a pas tardé à venir. Après la réunion du Comité
marocain contre la torture, tenue le 1er juillet, d’autres ONG
appellent en urgence à une réunion pour apporter la réponse adéquate à ces
déclarations d’un autre temps. L’ASDHOM condamne fermement ces déclarations et
accusations dangereuses et se joint aux autres associations au Maroc pour
dénoncer ces manœuvres et intentions liberticides.
Revenons à ce qui s’est passé à
Tanger.
Le 27 avril 2014, la jeune
Wafa Charaf, militante tangéroise
de l’AMDH, du mouvement 20-Février et du parti la Voie démocratique, déclarait
avoir été enlevée, séquestrée plusieurs heures et torturée avant d’être
abandonnée au bord d’une route à 12 km du centre de Tanger. Elle venait de
participer à un rassemblement d’ouvriers de la zone franche de Tanger. Elle a
depuis déposé plainte pour enlèvement et tortures. Elle va être constamment
harcelée par le commissariat. Ses parents aussi, chose qu’elle n’a pas pu
supporter au point qu’elle ait été hospitalisée d’urgence dans un hôpital
psychiatrique. Elle sera arrêtée le 9 juillet au domicile de ses parents et
traduite en état d’arrestation
devant le tribunal de première instance de Tanger, lundi 14 juillet, pour avoir « fomenté »
son histoire d’enlèvement et de tortures. Elle n’était pas la seule à être jugée
dans cette affaire. La Brigade nationale de la police judiciaire, dépêchée de
Casablanca, a conclu, après enquête et recherches (sic), qu’elle n’était pas
seule à pouvoir monter de toutes pièces une telle accusation contre la police
marocaine ! Il lui fallait un complice et la Brigade va vite le trouver en la
personne de Boubker El-Khamlichi,
responsable local du parti la Voie démocratique, retraité et ancien prisonnier
politique des années 80 (groupe des 26 marxistes-léninistes d’Ilal Amam) et qui
continue à militer activement notamment avec les Subsahariens installés dans la
région ou encore avec les ouvriers qui veulent s’organiser en syndicat. Arrêté
ou plutôt enlevé le 10 juillet, il va passer 24 heures au commissariat, qui a
essayé de nier au début cette arrestation lorsque sa famille et ses amies sont
venus demander de ses nouvelles, avant qu’il soit présenté au procureur du roi.
Ce dernier décide de le poursuivre en liberté pour « entraves du cours de la justice ». Boubker El-Khamlichi dont la santé est très
fragile des faits des séquelles des années de plomb est traduit au tribunal
lundi 14 juillet en compagnie de la jeune Wafa Charaf qui, elle, est déjà placée en
détention à la prison locale de Tanger. Leur procès a été reporté au 4 août
prochain et le juge a refusé d’accorder la liberté provisoire à
Wafa.
L’ASDHOM considère que les vrais raisons de
ces deux arrestations sont politiques. Les autorités marocaines mettent en
exécution les intentions affichées plus haut par les ministres de l’Intérieur et
de la Justice et s’attaquent à tout citoyen épris de justice et de liberté qui
veut défendre ses droits.
L’ASDHOM apporte tout son soutien à Wafa Charaf et à Boubker El-Khamlichi et demande aux
autorités marocaines d’arrêter immédiatement toute poursuite à leur encontre.
Elle les intègre tout naturellement à ses listes de victimes à
parrainer.
Dans ce point, nous nous
intéressons aussi à d’autres informations préoccupantes que nous recevons des
autres groupes de parrainés. Et si nous le faisons, c’est pour informer nos
parrains et marraines et l’opinion publique en général de l’amère réalité des
prisonniers politiques et d’opinion au Maroc. Ceci est notre devoir ; n’est-ce
pas Messieurs les ministres de l’Intérieur et de la
Justice ?
Groupe Mineurs
Imider-Syndicalistes-Ouarzazate
7
juillet : Après le jugement en première
instance du 24 avril à l’encontre des trois militants d’Imider (voir points précédents), la Cour d’appel de
Ouarzazate vient d’alourdir les peines en les faisant passer de 6 mois pour
Omar Moujane et Brahim El-Hamdaoui et de 12 mois pour
Abdessamad Madri à 3 ans de prison
ferme et 60 000 dirhams chacun. Ces trois militants appartiennent au « Mouvement
sur la voie de 96 » qui milite contre les conditions d’exploitation des mines
d’argent d’Imider par la Société métallurgique d’Imider, une filiale de Managem
(holding de la famille royale), et dénonce le pillage des richesses naturelles
et le problème de la pollution engendrée. Ils sont accusé de « constitution
d’une bande criminelle », « vol d’argent et commercialisation », « rassemblement
non autorisé », « perturbation de la voie publique » ou encore « coups et
blessures prémédités ». Rien que ça !
10
juillet : Dans la série des procès
intentés au militant politique et syndicaliste, Hamid Majdi (CDT-PSU), le tribunal de
première instance de Ouarzazate l’a condamné à un mois de prison ferme et 500
dirhams d’amende pour « entrave à la liberté de travail » (voir points précédents). Onze autres militants
syndicalistes ont écopé de la même peine. Taki Ben Hassi a, quant à lui, écopé
de 2 mois de prison ferme et de 500 dirhams
d’amende.
Groupe
UNEM-Fès-Taza-Marrakech
5
juillet : Les forces de l’ordre
interviennent violemment pour disperser les étudiants et militants de l’UNEM qui
occupent la faculté des sciences à Fès. Elles arrêtent l’un d’eux qui observe
une grève de la faim. Mustapha
Méziani est à son 44ème jour de grève de la faim. Il
vient d’être hospitalisé dans un état grave (vomissements de sang et
évanouissements). Il a été présenté au tribunal le 11 juillet dans un état
détérioré du fait de sa grève de la faim et placé en détention à la prison Ain
Kadous avec le groupe des onze.
5
juillet : L’AMDH-section de Marrakech-
interpelle le ministre de la Justice et l’Administration générale des prisons
sur l’état du groupe UNEM-Marrakech (groupe dit d’Aziz El-Bour), qui mène une grève de la
faim depuis le 27 juin pour l’amélioration des conditions de détention et leur
regroupement.
14
juillet : Arrestation à Taza d’Azzedine Erroussi, un militant de
l’UNEM-Taza. Une condamnation par contumace à un an de prison ferme avait été
prononcée à son encontre lors d’un procès en appel (cassation) dans un ancien
dossier. Rappelons qu’il avait purgé en 2010 une peine d’emprisonnement de 5
mois au cours desquels il avait observé une grève de la faim de 135 jours où il
avait frôlé la mort. Nous n’avons pas de nouvelles quant à ta présentation au
tribunal prévue le 15 juillet.
Groupe
Sahraouis
5
juillet : Le procureur du roi décide de
placer en détention, à la prison Lakhal de Laâyoune, le blogueur sahraoui
Mahmoud Elhaissan (voir point précédent) et le jeune sahraoui
Abdelkarim Bouchalka. Ils seront
présentés au juge le 21 juillet 2014. C’est la première fois d’un procureur
décide le placement en détention avant même que les prévenus ne soient traduits
devant un juge pour savoir de quoi ils sont accusés !
8
juillet : La Cour d’appel de Laâyoune
confirme la condamnation du prisonnier politique sahraoui, Abdessalam Loumadi, à 10 mois de prison
ferme, prononcée le 7 mai dernier pour avoir participé à des manifestations
réclamant l’autodétermination au Sahara occidental.
11
juillet : Libération des journalistes et
blogueurs sahraouis Sidi Sbai et
Mohamed Jemour. Ils ont quitté la
prison locale de Tiznit où ils avaient purgé une peine de 5 mois pour avoir
voulu assisté à l’accueil à Ifni d’un autre prisonnier politique sahraoui,
Mohamed Amzouz, le 11 février
dernier.
L’ASDHOM suspend, le temps des
vacances, ses points et vous promet de les reprendre en septembre avec un point
« spécial fête de l’Humanité ».
Le bureau
exécutif
Paris, le 17 juillet 2014
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire