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samedi 10 mai 2014

Point hebdomadaire n°61 sur la campagne de parrainage des prisonniers d’opinion au Maroc



Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue des Suisses  92000 Nanterre

Point hebdomadaire n°61 sur la campagne de parrainage des prisonniers d’opinion au Maroc

Le campus universitaire Dhar El-Mahraz de Fès a connu récemment des affrontements violents qui ont conduit malheureusement à la mort, le 25 avril 2014, du jeune étudiant Abderrahim El-Hasnaoui. L’ASDHOM, tout en présentant ses condoléances à la famille du défunt, condamne toute violence, d’où qu’elle vienne. L’université doit rester un lieu de transmission du savoir et de la confrontation des idées dans la paix et en toute sérénité. Et si nous revenons sur ces évènements dramatiques, ce n’est certainement pas pour abonder dans la déferlante médiatique et judiciaire qui leur a succédé pour montrer du doigt accusateur une partie des antagonistes et son syndicat estudiantin l’UNEM.
 Nous le faisons pour poser des questions car il y a eu mort d’homme et nous exigeons de la justice, si tant est qu’il y en ait une au Maroc, d’y répondre. L’atteinte à l’intégrité physique et à la vie d’une personne est un crime qui doit être puni. La justice doit être capable de déterminer et identifier en toute indépendance et équité à qui profite le crime. Sinon, à la jeune victime Abderrahim El-Hasnaoui, elle ne ferait qu’ajouter d’autres victimes d’une machine judiciaire qui se serait emballée pour être utilisée à des fins non avouées. Nous craignons que cette justice se laisse influencer par les sorties médiatisées et la participation du chef du gouvernement marocain en personne et les larmes de son ministre de l’Education nationale aux funérailles du défunt El-Hasnaoui. Une première au Maroc. Avant lui, trois autres jeunes étudiants, Maâti Boumli, Benaissa Ait El-Jid et Mohamed Fizazi, assassinés aux universités d’Oujda et de Fès, n’ont pas eu droit à ce traitement. Les deux premières victimes appartenaient au courant basiste de l’UNEM d’obédience marxiste-léniniste.
Est-ce que le fait que la victime El-Hasnaoui appartenait de son vivant à l’organisation « Renouveau estudiantin », affiliée au PJD, parti islamiste au gouvernement depuis les élections de 2011, y serait pour quelque chose ? Nous laissons à la justice le soin de répondre à cette question et nous l’invitons à répondre à d’autres questions que nous sommes d’ailleurs en droit de nous poser. 

Un bref retour sur les événements dramatiques de Fès s’impose.
Ces violences ont opposé le 24 avril 2014 les étudiants de l’UNEM-Fès, essentiellement de la Voie Démocratique Basiste (Marxiste-léniniste), à ceux du Renouveau estudiantin (islamistes du PJD) au moment où ces derniers se préparaient à accueillir une conférence sur le dialogue entre les islamistes et la gauche marocaine. L’un des conférenciers et animateurs de cette conférence n’est autre que Abdelali Hami-Eddine, à qui les militants de l’UNEM reprochent d’être l’un des assassins de leur camarade Benaissa Ait El-Jid. Son procès d’ailleurs court toujours. Pour alerter la présidence de l’université de Fès et l’emmener à annuler l’évènement, ils ont publié quelques jours avant un communiqué pour dire leur mécontentement de le voir revenir sur le lieu du crime qui reste impuni. La présidence, consciente des risques, n’a toutefois pas interdit la tenue de cette conférence, contrairement à il y a quelques mois où, aidée par les autorités locales, avait interdit une conférence sur le mouvement 20-Février, que devait organiser l’UNEM-Fès, en invoquant « l’atteinte à l’ordre public ».
Après les affrontements condamnables, Abderrahim El-Hasnaoui, blessé gravement au pied, a été transporté aux urgences de l’hôpital où il a subi une opération. Le communiqué des médecins, publié le lendemain, et les examens médicaux indiquent que l’opération a réussi, qu’aucun organe vital n’était touché et que son état de santé se stabilisait. Qu’est-ce qui explique alors sa mort annoncée quelques heures après ? On comprend dès lors que des médecins de Fès se sont offusqués, sous couvert d’anonymat. Ils considèrent que cette affaire, politisée et entourée de zones d’ombre, met en cause leur compétence et salit leur image.
Les arrestations opérées rapidement après les affrontements et avant la mort du défunt n’ont touché qu’un groupe des antagonistes. Pourquoi pas l’autre ? Et pourquoi ces arrestations pour violences, et qui vont être suivies d’accusation grave requalifiée de « meurtre avec préméditation », ont touché des anciens prisonniers politiques de l’UNEM-Fès qui n’étaient pas présents le jour des affrontements tel que Mohamed Ghalout qui a coupé définitivement avec l’université de Fès ?
Les opérations de police se sont poursuivies au-delà de Fès, dans d’autres universités du pays, comme à l’université de Marrakech, où un groupe de criminels non identifié s’est attaqué aux militant(e)s de l’UNEM. C’est dans ce climat de peur et de terreur qui rappelle ce nouveau phénomène étrange dit « Tcharmil », secouant la société marocaine, que les ministres de l’Intérieur et de l’Education nationale ont décidé mardi 6 mai d’autoriser les interventions policières au sein des universités marocaines. Le « pompier pyromane » n’est-il pas en train de mettre le pays à feu et à sang pour justifier ses interventions musclées et son approche sécuritaire ?
Nous restons vigilants et nous mettons en garde les autorités marocaines contre cette escalade de violence et contre toute tentative de son exploitation pour venir à bout de tout mouvement de protestation populaire et pacifique. Assimiler les militant(e)s de l’UNEM, du mouvement 20-Février, du mouvement des diplômés chômeurs et les défenseurs des droits de l’Homme à de vulgaires criminels n’est pas acceptable. Nous refusons qu’ils soient victimes de procès non équitables, montés de toutes pièces, où ils sont généralement accusés à tort de « violences à l’encontre d’agents de l’Etat, rassemblements armés et non autorisés, destruction de biens publics, désobéissance, etc. »
L’ASDHOM continuera donc à défendre ces victimes d’atteinte aux droits qu’elle considère comme des prisonniers d’opinion en les proposant au parrainage dans le cadre de sa campagne de solidarité internationale lancée en 2012 (voir le site www.asdhom.org).
Nous consacrons le reste de ce point aux récentes arrestations et condamnations qui témoignent de la volonté des autorités marocaines de s’attaquer aux droits les plus élémentaires.

Groupe UNEM-Fès : Suite aux affrontements violents du 24 avril 2014, sujet principal de ce point, plusieurs arrestations et enlèvements, suivis de procès avec de lourdes accusations, vont toucher les seuls militants de l’UNEM-Fès appartenant au courant la Voie Démocratique Basiste. Au total, 9 militants ont été arrêtés et placés à la prison locale Ain Kadous, portant ainsi le nombre de prisonniers de l’UNEM-Fès à 21. Il s’agit de Mohamed Ghalout, Omar Taybi, Mohamed Janati, Abderrazak Aârab, Belkacem Benâzza, Oussama Zantar, Abdennabi Chaoul, Yacine Lamsih et Zakaria Manhich. Brahim Lahboubi et la sœur de Yacine Lamsih sont poursuivis en liberté. A ceux-là s’ajoutent les douze (voir point précédent), déjà condamnés à 4 mois de prison ferme, et qui mènent une grève de la faim d’une semaine à partir du 29 avril pour dénoncer leurs conditions de détention et affirmer leur attachement à l’UNEM qui se bat contre la réforme qui prévoit, entre autres, l’instauration des droits d’inscription (2000 DH).

Groupe Ouarzazate-Microcrédits : Le 26 avril, la caravane internationale de solidarité avec les victimes des dérives du microcrédit a été interdite de passer la nuit à l’hôtel de Rich sur ordre des autorités locales. La journaliste Anaëlle Verzaux de France Inter était sur place. Nous vous invitons à écouter son reportage diffusé dans le cadre de l’émission « Là-bas si j’y suis » :  http://www.franceinter.fr/emission-la-bas-si-jy-suis-microcredit-comment-se-faire-des-perles-avec-la-sueur-des-pauvres
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Par ailleurs et s’agissant des procès intentés aux syndicalistes de Ouarzazate, trois d’entre eux ont été condamnés le 6 mai par la Cour d’appel de Ouarzazate, après avoir annulé la décision de première instance, à des peines allant de 6 mois à un an de prison ferme. Omar Oubouhou, secrétaire général régional de la CDT et Nasri Bouslham, trésorier du même syndicat, ont écopé de 6 mois et une amende. Tandis que Hamid Majdi, le secrétaire adjoint, a, lui, écopé d’un an de prison ferme. Rappelons que Hamid Majdi avait déjà été innocenté dans un autre procès à Marrakech pour « trafic de drogue ». Il figure toujours dans nos listes de parrainés. L’acharnement jusqu’au bout !

Groupe Berchid-AMDH : Hind Bharti et Mohamed Dyan, deux membres de la section Berchid de l’AMDH ont été condamné(e)s le 28 avril 2014 à de la prison ferme après leur soutien aux victimes d’expulsion de leurs maisons. 3 mois pour Hind, mère d’un enfant, et 4 mois pour Mohamed, en plus d’une amende de 1000 Dh chacun.

Groupe Sahraouis-Guelmim-Laâyoune : Le juge d’instruction près la Cour d’appel d’Agadir a décidé le 2 mai de placer le défenseur des droits de l’Homme sahraoui, Abdelkhalek Markhi, en prison sans désigner laquelle à sa famille. Il est poursuivi depuis le 29 avril 2014 pour les mêmes chefs d’accusation que les six de Guelmim qui avaient manifesté leur soutien aux militants d’Assa après le démantèlement du campement Tizimi en septembre 2013. Leur procès à eux a été reporté du 29 avril au 26 mai 2014.
A Laâyoune, le tribunal a condamné, le 7 mai 2014, le prisonnier politique sahraoui, Abdeslam Loumadi, à 10 mois de prison ferme dans un procès inéquitable devant quelques observateurs espagnols.

Pour clore ce point sur une note optimiste, l’ASDHOM félicite le prisonnier politique Abdelhalim Bakkali de recouvrer enfin sa liberté après deux ans de prison ferme, passés entre la prison d’Al-Hoceima et celle de Tanger. Ses camarades de l’ANDCM et du mouvement 20-Février de Béni Bouayach s’apprêtent à fêter son retour parmi eux les 12 et 13 mai.

Bureau exécutif de l’ASDHOM
Paris, le 9 mai 2014

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