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lundi 1 octobre 2012

Soixante-septième conférence des Nations Unies: le discours de trop

par Salah Elayoubi, /10/2012



Brocardant l’Organisation des Nations Unies,  De Gaulle en disait, sur le ton du mépris, qu’elle était ce «Grand Machin». Vendredi 28 septembre, Rachid, qui prononçait, pour le compte de son frère, Mohammed VI, un discours, s’est acharné,  onze minutes durant, à apporter du crédit aux paroles du Général défunt.

Les fondamentaux des  bons discours, sont connus depuis la nuit des temps. Il ne suffit pas d’arriver sur une tribune, un papier en poche. Il faut  encore une diction irréprochable, une maîtrise parfaite de la langue, découlant d’une pratique assidue de la lecture, un minimum d’implication dans l’exercice de haranguer les autres, une excellente connaissance des dossiers  et un zeste de confiance en soi. Autant d’ingrédients qui, lorsqu’ils sont réunis, accrochent l’auditoire.
De tout cela le représentant marocain n’avait pas un gramme, à cette soixante-septième assemblée des nations Unies. Au demeurant, les participants à la conférence ne s’y étaient pas trompés. Ils avaient à l’écrasante majorité, déserté la salle.

Dès les premiers mots, l’homme est mal à l’aise. Le trac qui lui vrille les tripes, crispe ses traits. Le sourire enjôleur a disparu. L’heure semble grave et la souffrance réelle. Le visage s’allonge singulièrement et se fait asymétrique, les sourcils se froncent et le regard se fait noir.
D’entrée de jeu, il veut impressionner. Il va vite en besogne, histoire de donner l’illusion d’une assurance et d’expédier le plus rapidement la tâche.
Mais aller vite suppose une connaissance parfaite de son texte. Ce  n’est pas le cas. Alors il bégaie, accélère, ralentit, se reprend, corrige et passe aux mots suivants. Un flot insupportable. Il y manque l’essentiel : le phrasé, la ponctuation, le rythme,  l’emphase. Bref tout ce qui habille un discours,  lui donne du sens, de l’âme et fait son agrément..
A trop se presser, notre ami se précipite, avale des mots, les déforme, les transforme.  A tout bout de champ, il semble mener un combat. Grands moments de solitude ! Un paragraphes en chasse un autre, sans transition aucune.
Dans la foulée, d'étranges néologismes qu’aucun dictionnaire ne reprendra jamais, naissent dans la bouche de ce piètre orateur.   Il trébuche sur un mot, un verbe, une phrase, se rattrape in extremis et finit par en triompher. Qu'il croit !  Car la langue arabe est une vieille dame millénaire. Digne et intraitable. Belle lorsqu’on la maîtrise, ses subtilités innombrables, pardonnent rarement à celui qui ne pratique pas une lecture régulière. Comme cette vocalisation, typique des écritures abjads, qui précise les voyelles par des signes diacritiques. Un A, un O, ou un I et votre phrase change de sens ou pire,  heurte l’oreille !  
Notre homme hésite, tergiverse, vacille. Dans sa fuite en avant, il choisit la voyelle A, pour un complément d’objet.  Lourde erreur, c’était un sujet. Il fallait donc choisir un O.  Il jette un regard vers l’assistance clairsemée, voire rarissime. Ouf ! Sauvé par le vide. Il reprend son chemin de croix, visage bouffi et tendu. Moments pénibles qui nous renvoient à l’image du cancre de la classe, convoqué au tableau pour une récitation qu’il n’a pas apprise !


Sur le banc marocain, face à ce désastre pourtant annoncé, chacun essaie de se donner un minimum de contenance.

Fassi-qui-rit  triture son stylo et regarde ailleurs après avoir, les premiers instants de ce calvaire, encouragé, en vain, son maître du regard.

El Otmani, doit se dire qu’il habite dans un drôle de ministère, celui des « Affaires étranges », depuis l’institution de la «doublette», cette pratique voulue par la démocratie marocaine et qui voudrait que chacun des ministres dits de souveraineté,  soit doublé d’un autre issu du palais. En bon  psychologue, il fait mine de ne rien entendre de ce charabia et se plonge dans la rédaction réelle ou simulée d’un mystérieux rapport, peut-être une psychanalyse du cas marocain. Qui sait si cela pourrait rapporter gros, un jour ?!

Derrière, le trio de pseudo diplomates  qui ne servent à rien et se servent au passage, attend impatiemment que sonne l’heure de la récréation,  alors que notre ami poursuit sur son chemin cahoteux  en évoquant des dossiers chauds du moment.  Un navrant guide bleu de banalités, émaillé de nouvelles fautes de syntaxe et de grammaire et où il est question  de démocratie de respect des droits de l’homme, d’égalité des chances et de vie digne autant de concepts que persistent à ignorer le régime marocain, lorsqu’il s’agit de les appliquer à ses citoyens.

Onze minutes et Trente-deux fautes plus tard, celui que les intimes ont l’habitude de surnommer « Le Petit Prince » est sorti encore plus petit de son expérience onusienne. Il n’aura pas non plus, grandi son pays, ni offert à ses compatriotes une raison particulière d’être fier de sa prestation. Mais lequel d’entre nous, en espérait autant ? 

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