Torture au Maroc : Communiqué de presse
du cabinet JUSCOGENS
Par un arrêt rendu ce 25 septembre 2012, la cour européenne des
droits de l’homme a condamné fermement la pratique systématique de la
torture au Maroc.
Au delà des images charmantes que l’on a du Royaume du Maroc, pays de
vacances idylliques, la réalité de la torture systématique a été
dévoilée par la cour européenne des droits de l’homme.
A l’occasion d’un arrêt EL HASKI c/ BELGIQUE, la cour européenne est
arrivée à une conclusion accablante contre le Maroc. Après une analyse
fouillée des informations données par des rapports d’instances de
l’Organisation des Nations-Unies et d’organisations non-gouvernementale
de défense de droits de l’homme (Fédération Internationale des Droits de
l’Homme, Human Rights Watch et Amnesty International), la plus haute
instance judiciaire européenne a considéré qu’il existe une pratique
systématique de la torture au Maroc, et que le système judiciaire (juges
et procureurs), en refusant de voir le problème et de juger les
tortionnaires, se rendent complices des actes de barbarie commises à
grande échelle au Royaume Chérifien du Maroc.
La cour considère ainsi:
“la torture est un fléau exceptionnellement grave en raison, d’une part, de sa barbarie et d’autre part de son effet corrupteur sur le processus pénal, qu’elle est pratiquée en secret, souvent par des interrogateurs expérimentés qui savent parfaitement comment ne pas laisser de traces visibles sur leur victime et que, bien trop souvent, ceux-là même qui sont chargés de garantir l’absence de torture – juges, procureurs, médecins – se font les complices de sa dissimulation. Elle a retenu que dans un système de justice pénale où les tribunaux sont indépendants du pouvoir exécutif, où les affaires sont jugées de manière impartiale et où les allégations de torture font l’objet d’investigations sérieuses, il serait concevable que l’on exige d’un accusé qu’il démontre par des preuves solides que les éléments à charge présentés contre lui ont été obtenus par la torture ; en revanche, dans un système pénal complice des pratiques même qu’il est censé empêcher, un tel niveau de preuve est totalement inapproprié” (Cour Européenne des Droits de l’Homme, EL HASKI c/ BELGIQUE, 25 septembre 2012, § 86).
Et:
“ La Cour considère pour sa part que, dès lors que ces déclarations émanaient de suspects interrogés au Maroc dans le cadre des enquêtes et procédures consécutives aux attentats de Casablanca du 16 mai 2003, les rapports susmentionnés établissaient l’existence d’un « risque réel » qu’elles aient été obtenues au moyen de traitements contraires à l’article 3 de la Convention. Il en ressort en effet que des mauvais traitements aux fins d’aveux ont été largement pratiqués à l’encontre de ces suspects.“ (Cour Européenne des Droits de l’Homme, EL HASKI c/ BELGIQUE, 25 septembre 2012, § 98).
Au delà de la dénonciation sans équivoque de la pratique marocaine de
torture (viols systématique en utilisant une bouteille, brûlures de
cigarettes, chocs électriques, pendaison par les pieds et les mains,
bastonnades…), la décision européenne a pour conséquence que la
coopération judiciaire avec le Maroc ne peut plus continuer.
Le Maroc a trahi la confiance mutuelle qui régit cette coopération et
tous les États européens doivent maintenant revoir leur manière de
travailler avec le Maroc, particulièrement dans la lutte
anti-terroriste.
Il est à noter que Juan MENDEZ, Rapporteur Spécial des Nations-Unies
contre la Torture, était au Maroc la semaine passée, et que le 22
septembre 2012, à l’occasion d’une conférence de presse donnée à Rabat,
il à sévèrement critiqué les autorités marocaines pour cette pratique
systématique de la torture et la complicité du système judiciaire
marocain, laissant impunis les auteurs de ces crimes terribles. Le
Rapporteur Spécial a également encouragé le Maroc à continuer
d’améliorer la situation des droits de l’homme.
Gageons que le Maroc entendra enfin ces critiques et mettra en œuvre
les moyens nécessaires afin que cette pratique cesse, que les bourreaux
soient punis, et que les aveux obtenus sous la torture ne soient plus
utilisés comme preuve en justice, au Maroc ou dans d’autres pays.
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