L’année écoulée à la même période, suite à l’opposition de la France
d’élargir le mandat de la Minurso à la protection des droits de l’homme,
j’ai publié un article dans le même prestigieux quotidien El Watan,
pour m’indigner de cette attitude de la France, eu égard à son statut de
membre permanent du Conseil de sécurité, avec toutes les conséquences
en termes de responsabilité pour la paix et la sécurité internationales,
et de berceau des droits de l’homme.
Une fois encore, la France se distingue par sa position, guidée par des
relents colonialistes et un esprit revanchard et persiste dans son
attitude de vouloir protéger à tout prix son précarré marocain, en
faisant fi des règles du droit international et de la volonté d’un
peuple (sahraoui) de faire valoir son droit légitime à
l’autodétermination. Paris persiste dans l’erreur par arrogance, en
empêchant le Conseil de sécurité cette fois-ci de prendre une position
ferme vis-à-vis de la décision du Maroc de renvoyer la composante civile
de la Minurso, de fermer son bureau de la composante militaire à
Dakhla, et suspendre sa contribution à son fonctionnement. Une décision
qui n’a même pas suscité une réaction, à la hauteur de sa gravité et des
risques qu’elle engendre pour la stabilité et la sécurité de la région.
Considérée comme une opération de la nouvelle génération, dont la
direction générale revient au Conseil de sécurité, en vertu de la
Résolution 690 (1991), la Minurso comporte trois composantes : l’unité
militaire qui a pour mandat de surveiller le cessez-le-feu, la réduction
de la consignation des forces, selon les résultats du référendum, ainsi
que le retrait des troupes du Maroc ou du Front Polisario.
L’unité
civile est affectée, pour l’essentiel, à l’organisation et au contrôle
du référendum. L’unité de sécurité, composée des agents de la police
civile, assure l’ordre dans les centres d’établissement des listes
électorales, les bureaux de vote et supervise les forces de police
existantes. Ces trois composantes sont dirigées par le représentant du
SG de l’ONU.
A cet égard, la décision d’expulser le personnel civil de la Minurso
constitue une violation flagrante du mandat de la Minurso et de la
légalité internationale.
De tels agissements de l’occupant marocain qui instrumentalise
sciemment l’incident avec le SG de l’ONU, lors de sa visite au mois mars
dernier dans les territoires sahraouis libérés, visent en réalité à
confiner la Minurso dans la surveillance du cessez-le-feu et de vider le
mandat de la mission de l’ONU de son essence, à savoir l’organisation
du référendum d’autodétermination au Sahara occidental.
Ce n’est un secret pour personne que, malheureusement, la Minurso n’a
jamais pu s’acquitter de la totalité des missions dont elle a été
investie par le Conseil de sécurité de l’ONU, elle s’est juste bornée,
depuis sa création, à surveiller le cessez-le-feu et à instaurer des
mesures de confiance, et ce, malgré les multiples pertinentes
résolutions de l’ONU appelant à l’autodétermination pour le peuple du
Sahara occidental.
Cette situation donne lieu à des OMP à deux niveaux : les opérations de
«rang supérieur» nées dans les régions que les grandes puissances et
leurs alliés principaux considèrent comme importantes, et les
«opérations de bas niveau» menées ailleurs par l’ONU et les
organisations régionales.
En effet, on note une certaine sélectivité des membres du Conseil de
sécurité dans le choix des crises qui méritent une intervention
coercitive habilitée, au titre du chapitre VII de la Charte de l’ONU,
car l’expérience a montré que le comportement des Etats membres du
Conseil est guidé, en grande partie, par le souci de préserver et de
défendre leurs intérêts, alors qu’il a été constaté que les efforts de
l’ONU ne mènent à rien s’ils ne sont pas basés sur un ferme soutien
diplomatique et militaire des États membres, et plus particulièrement
celui des grandes puissances qui doivent faire preuve d’objectivité et
de neutralité concernant le conflit du Sahara occidental dont la
solution juste et pacifique sera d’un grand apport pour la paix et la
sécurité dans la région.
Aussi, devant la situation de danger qui menace la paix et la sécurité
régionales, il est urgent que la communauté internationale assume ses
responsabilités et exerce les pressions nécessaires sur la partie
marocaine pour parachever le processus de décolonisation du Sahara
occidental, inscrit sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU
depuis 1963. De même qu’il est primordial de mettre fin au pillage
illicite par le Maroc des ressources naturelles de ce territoire et
assurer une protection des Sahraouis contre l’oppression marocaine à
travers l’élargissement des prérogatives de la Minurso à la protection
et au suivi de la situation des droits de l’homme, à l’instar d’autres
opérations de maintien de la paix.
La prorogation périodique du mandat de la Minurso, qui est un organe
intégré à l’ONU doté de la qualité d’organe subsidiaire du Conseil de
sécurité, en application de l’article 29 de la Charte, n’est pas un
objectif en soi, mais celle-ci vise plutôt à organiser un référendum
d’autodétermination pour le peuple sahraoui, alors que le statu quo est
favorable au Maroc qui poursuit l’occupation du Sahara occidental et le
pillage illégal des ressources naturelles de ce territoire.
En conclusion, je dis et je maintiens que je ne suis pas de nature
pessimiste, bien au contraire, mais tout porte à croire que le combat du
peuple sahraoui pour l’autodétermination et l’indépendance sera plus
rude vu l’attitude obstinée et irresponsable du Maroc, qui profite de
la complicité de certains Etats. La récente missive adressée par le
président de la République arabe sahraouie, Mohammed Abdelaziz, au
Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, rappelle la responsabilité de
l’ONU dans la décolonisation du Sahara occidental et l’organisation du
référendum d’autodétermination, de même que le rappel du droit du peuple
sahraoui à recouvrer ses droits, y compris par les armes contre une
éventuelle agression marocaine, conforte notre analyse.
Par Abdelouahab Saïdani
Universitaire
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