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vendredi 24 juillet 2015

Ali Lmrabet: « Je défends également la liberté des Marocains »

Ali Lmrabet: « Je défends également la liberté des Marocains »
 Ali Lmrabet. Crédit DR

Telquel.ma s’est entretenu avec le journaliste Ali Lmrabet, alors qu’il s’apprête à boucler un mois de grève de la faim. A l’international, il vient d’avoir le soutien de plusieurs personnalités dont un prix Nobel et deux prix Goncourt. 

Le journaliste Ali Lmrabet conclura, le 24  juillet, un mois de grève de la faim entamé suite au refus des autorités de lui livrer ses papiers d’identité. Des pièces dont le journaliste a besoin pour créer son magazine satirique.
Au Maroc, des journalistes, des militants des droits de l’Homme, des politiques ainsi que des universitaires ont annoncé, le 23 juillet, la création d’un Comité de soutien au journaliste Ali Lmrabet. Présidé par l’ancien détenu politique Ahmed Marzouki. Ce comité prévoit un sit-in de protestation le 24 juillet devant le parlement.
D’un autre côté, l’ONG internationale Reporters sans frontières (RSF) vient d’apporter son soutien en relayant une lettre de soutien a Ali Lmrabet qui sera publiée dans le quotidien Le Monde. D’après nos informations, elle sera signée par environ 200 personnalités nationales et mondiales dont le prix Nobel de littérature John Maxwell Coetzee, deux Prix Goncourt, Jonathan Littell et Matthias Enard, Federico Mayor Zaragoza, ex-directeur général de l’UNESCO, Juan Goytisolo, Prix Cervantes 2014 et plusieurs maires et ex-maires de grandes villes européennes.
Quelques heures avant la publication de cette lettre, Telquel.ma s’est entretenu avec le journaliste.

Telquel.ma : Comment vous portez-vous ?

Ali Lmrabet : En raison de ma fatigue extrême et de la canicule qui ne se termine pas, je me suis replié dans un coin plus clément. Je suis à l’Espace solidaire Pâquis de Genève qui se trouve dans une église protestante et où m’accueillent les responsables de cette association et le pasteur Philippe Leu.

Mis a part Mohamed Aujjar (ambassadeur du Maroc à la mission permanente de Genève, ndlr) êtes-vous entré en contact avec un responsable marocain? 

A.L : Non. L’ambassadeur Mohamed Aujjar a premièrement déclaré au journal Le Temps qu’il s’agissait d’un «simple malentendu administratif», d’un « quiproquo » qui allait être résolu rapidement, puis il a déclaré à l’AFP que le Maroc était un « Etat de droit » je devais faire un recours en justice, ce qui a fait ricaner tout le monde ici. Un Etat vous prive sans justifications de votre carte d’identité et de votre passeport puis vous demande d’aller en justice pour les récupérer et attendre peut-être 10 ans, comme Abraham Serfaty, pour s’entendre dire que le ministère de l’Intérieur a raison. Entre temps je serais resté dix ans sans papiers.

 
Mohamed Aujjar, qui n’est pas partie prenante dans cette affaire et ne fait que dire ce qu’on lui dit de déclarer, a même assuré au quotidien Le Temps que je résidais à Barcelone, en Espagne, et que mon passeport pourrait être renouvelé là-bas en l’espace de quelques jours. J’ai prouvé, documents administratifs marocains à l’appui, que je ne résidais plus en Espagne, mais j’ai tout de même envoyé un mail au consul de Barcelone lui demandant s’il était prêt à me renouveler mon passeport et dans l’affirmative de me fixer un rendez-vous. C’était il y a deux semaines, et il ne m’a toujours pas répondu. Une journaliste d’une radio publique espagnole a tenté de joindre ce consul lundi et mardi derniers pour confirmation. En vain. Peut-être qu’on me dira de renouveler mon passeport au Canada.

C’est votre troisième grève de la faim. Estimez vous que vous avez tout tenté avant d’arriver à cette décision?

En l’espace de deux mois, depuis le 20 avril, j’ai frappé sagement à toutes les portes au Maroc. L’AMDH et mes avocats ont écrit au chef du gouvernement, au ministre de l’Intérieur, au ministre de la Justice et des libertés, au délégué interministériel aux droits de l’Homme et au président du Conseil national des droits de l’homme (CNDH).  Aucune réponse. Mon avocat à Tétouan, Lahbib Haji a tenté de joindre le wali de Tétouan, le secrétaire général de la wilaya de Tétouan et le préfet de police de Tétouan pour obtenir au moins une réponse, même verbale pour savoir où se situait le problème. Encore une fois, aucune réponse. Je n’existais pas. J’ai commencé à exister seulement quand je suis arrivé à Genève. C’est à Genève, et non à Tétouan que j’ai appris que je devais aller en justice au Maroc, ou que je devais aller à Barcelone pour renouveler mon passeport.

Quel regard portez-vous sur le soutien que vous recevez à l’étranger et au Maroc ?

Je ne suis pas au fait de ce qui se passe au Maroc, mais les Marocains devraient savoir que je défends également leurs libertés pour que n’importe quel haut fonctionnaire ne les prive pas arbitrairement de leurs pièces d’identité. Quant aux étrangers, tous ceux qui me soutiennent ont lu le dossier que je leur ai fourni et étaient abasourdis.

Que comptez-vous  faire dans les jours qui viennent ?

Je continue ma grève parce que je n’ai pas le choix. Ces fous furieux veulent me voler mon identité. Je rappelle que jusqu’à aujourd’hui il n’y a pas eu un seul communiqué du gouvernement marocain justifiant son refus par une seule preuve, alors que j’en ai fourni une bonne vingtaine qui accréditent ma version. Certains pataugent et veulent me faire patauger avec eux.
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