Doumane
Un jour, le retour de Demain, Demain magazine et Doumane...
Par Christophe Koessler
PLACE DES NATIONS • Le journaliste Ali Lmrabet n’a toujours pas obtenu le renouvellement de ses papiers d’identité au Maroc après plus de trois semaines de jeûne volontaire.
Hier, la célébration de la fête musulmane de l’Aïd el-Fitr n’a pas
été synonyme de fin du jeûne pour le marocain Ali Lmrabet. Depuis
maintenant vingt-quatre jours, l’un des journalistes les plus connus du
Maroc mène une grève de la faim sur la place des Nations à Genève (notre
édition du 25 juin dernier).
Allongé à l’ombre des arbres bordant la place – la police genevoise lui ayant interdit de demeurer sur l’esplanade elle-même –, Ali Lmrabet reçoit pendant la journée des visiteurs de tous horizons qui viennent lui témoigner leur solidarité. La nuit, il trouve refuge à l’Espace Solidaire Pâquis, où il pense établir ses quartiers la semaine prochaine.
Allongé à l’ombre des arbres bordant la place – la police genevoise lui ayant interdit de demeurer sur l’esplanade elle-même –, Ali Lmrabet reçoit pendant la journée des visiteurs de tous horizons qui viennent lui témoigner leur solidarité. La nuit, il trouve refuge à l’Espace Solidaire Pâquis, où il pense établir ses quartiers la semaine prochaine.
Amaigri, affaibli et souffrant de vertiges, Ali Lmrabet garde
pourtant le moral et continue de lutter pour obtenir le renouvellement
de ses papiers d’identité. Le Royaume du Maroc le lui refuse depuis le
mois d’avril dernier. Officiellement, pour des raisons administratives.
«Le Ministère compétent me dit que je n’habite pas réellement là où je
réside pourtant, à Tetouan», rappelle le reporter, qui avait été
interdit d’exercer son métier dans son pays entre 2005 et 2015.
Les nouvelles tracasseries concernant ses documents d’identité ont
débuté juste après que le journaliste a annoncé en avril dernier son
intention de rouvrir deux journaux satiriques à Rabat. Ceux-ci avaient
été fermés au milieu des années 2000. A cette époque, après avoir
questionné le budget royal dans un article, Ali Lmrabet avait été
condamné à quatre ans de prison. Il a finalement passé huit mois à
l’ombre.
Un collaborateur condamné
Le 3 juillet, soit dix jours après le début de sa grève de la faim, l’un de ses plus proches collaborateurs, Khalid Gueddar,
a été condamné à trois mois de prison ferme par le Tribunal de première
instance de Kenitra pour «état d’ébriété sur la voie publique» pour une
affaire qui remonte à… 2012. Ali Lmrabet soupire: «Je venais de lui
demander d’aller lui-même de l’avant avec nos projets de nouveaux
journaux puisque je suis bloqué ici. Visiblement nos téléphones sont sur
écoute.»
Si Ali Lmrabet regrette l’absence de réaction du gouvernement
marocain à son jeûne volontaire, il se réjouit des innombrables marques
de sympathie reçues. De même que des nombreux articles de journaux
publiés en France, en Suisse et en Espagne en particulier, qui exposent
la situation dramatique de la liberté de la presse dans son pays. A
Barcelone, où Ali Lmrabet avait exercé son métier durant plusieurs
années, le parlement catalan a voté à l’unanimité une motion de soutien
en sa faveur. Une lettre ouverte écrite au roi du Maroc a aussi été
signée par une centaine de personnalités politiques, écrivains
journalistes universitaires et des ONG provenant de toute l’Europe. Au
Maroc, une circulaire de ce type réunit également de nombreux soutiens.
En Suisse, les autorités cantonales et fédérales sont pour l’heure
demeurées silencieuses. Seul Rémy Pagani, conseiller administratif de la Ville de Genève, lui a apporté son soutien.
Ambassadeur embarrassé?
Une tempête dans un verre d’eau? On pourrait le croire, à entendre l’ambassadeur marocain auprès de l’ONU, Mohamed Auajjar, qui confiait le 9 juillet au quotidien Le Temps: «Monsieur Lmrabet est face à un litige administratif en réalité très simple à résoudre.»
Le diplomate conseille au journaliste d’avoir recours à la justice
marocaine ou de se déplacer à Barcelone où on lui délivrerait un
passeport en deux ou trois jours. Ali Lmrabet sourit à cette
déclaration: «La justice marocaine n’est pas indépendante, tout le
monde le sait. Quant à l’Espagne, je n’y suis plus résident depuis
longtemps. J’ai un document du Consul général à Barcelone qui l’atteste
car j’en ai eu besoin pour mon déménagement au Maroc.» Le
journaliste assure avoir tenté de joindre à plusieurs reprises
l’ambassadeur Auajjar sans succès. Hier, à l’heure où nous mettions sous
presse, le diplomate n’a pas non plus retourné nos appels.
Christophe Koessler
Source : Le Courrier
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