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dimanche 19 juillet 2015

Le Courrier : Ali Lmrabet vit son 25e jour de grève de la faim

Doumane Un jour, le retour de Demain, Demain magazine et Doumane...
 Par Christophe Koessler

Ali Lmrabet garde le moral même s’il est très affaibli. Pendant sa grève de la faim, son plus proche collaborateur a été condamné à trois mois de prison ferme au Maroc. CKR
Ali Lmrabet garde le moral même s’il est très affaibli. Pendant sa grève de la faim, son plus proche collaborateur a été condamné à trois mois de prison ferme au Maroc.
CKR
PLACE DES NATIONS • Le journaliste Ali Lmrabet n’a toujours pas obtenu le renouvellement de ses papiers d’identité au Maroc après plus de trois semaines de jeûne volontaire.
Hier, la célébration de la fête musulmane de l’Aïd el-Fitr n’a pas été synonyme de fin du jeûne pour le marocain Ali Lmrabet. Depuis maintenant vingt-quatre jours, l’un des journalistes les plus connus du Maroc mène une grève de la faim sur la place des Nations à Genève (notre édition du 25 juin dernier). 
Allongé à l’ombre des arbres bordant la place – la police genevoise lui ayant interdit de demeurer sur l’esplanade elle-même –, Ali Lmrabet reçoit pendant la journée des visiteurs de tous horizons qui viennent lui témoigner leur solidarité. La nuit, il trouve refuge à l’Espace Solidaire Pâquis, où il pense établir ses quartiers la semaine prochaine.
Amaigri, affaibli et souffrant de vertiges, Ali Lmrabet garde pourtant le moral et continue de lutter pour obtenir le renouvellement de ses papiers d’identité. Le Royaume du Maroc le lui refuse depuis le mois d’avril dernier. Officiellement, pour des raisons administratives. «Le Ministère compétent me dit que je n’habite pas réellement là où je réside pourtant, à Tetouan», rappelle le reporter, qui avait été interdit d’exercer son métier dans son pays entre 2005 et 2015.
Les nouvelles tracasseries concernant ses documents d’identité ont débuté juste après que le journaliste a annoncé en avril dernier son intention de rouvrir deux journaux satiriques à Rabat. Ceux-ci avaient été fermés au milieu des années 2000. A cette époque, après avoir questionné le budget royal dans un article, Ali Lmrabet avait été condamné à quatre ans de prison. Il a finalement passé huit mois à l’ombre.
Un collaborateur condamné
Le 3 juillet, soit dix jours après le début de sa grève de la faim, l’un de ses plus proches collaborateurs, Khalid Gueddar, a été condamné à trois mois de prison ferme par le Tribunal de première instance de Kenitra pour «état d’ébriété sur la voie publique» pour une affaire qui remonte à… 2012. Ali Lmrabet soupire: «Je venais de lui demander d’aller lui-même de l’avant avec nos projets de nouveaux journaux puisque je suis bloqué ici. Visiblement nos téléphones sont sur écoute.»
Si Ali Lmrabet regrette l’absence de réaction du gouvernement marocain à son jeûne volontaire, il se réjouit des innombrables marques de sympathie reçues. De même que des nombreux articles de journaux publiés en France, en Suisse et en Espagne en particulier, qui exposent la situation dramatique de la liberté de la presse dans son pays. A Barcelone, où Ali Lmrabet avait exercé son métier durant plusieurs années, le parlement catalan a voté à l’unanimité une motion de soutien en sa faveur. Une lettre ouverte écrite au roi du Maroc a aussi été signée par une centaine de personnalités politiques, écrivains journalistes universitaires et des ONG provenant de toute l’Europe. Au Maroc, une circulaire de ce type réunit également de nombreux soutiens. En Suisse, les autorités cantonales et fédérales sont pour l’heure demeurées silencieuses. Seul Rémy Pagani, conseiller administratif de la Ville de Genève, lui a apporté son soutien.
Ambassadeur embarrassé?
Une tempête dans un verre d’eau? On pourrait le croire, à entendre l’ambassadeur marocain auprès de l’ONU, Mohamed Auajjar, qui confiait le 9 juillet au quotidien Le Temps: «Monsieur Lmrabet est face à un litige administratif en réalité très simple à résoudre.» Le diplomate conseille au journaliste d’avoir recours à la justice marocaine ou de se déplacer à Barcelone où on lui délivrerait un passeport en deux ou trois jours. Ali Lmrabet sourit à cette déclaration: «La justice marocaine n’est pas indépendante, tout le monde le sait. Quant à l’Espagne, je n’y suis plus résident depuis longtemps. J’ai un document du Consul général à Barcelone qui l’atteste car j’en ai eu besoin pour mon déménagement au Maroc.» Le journaliste assure avoir tenté de joindre à plusieurs reprises l’ambassadeur Auajjar sans succès. Hier, à l’heure où nous mettions sous presse, le diplomate n’a pas non plus retourné nos appels.
Christophe Koessler
Source : Le Courrier

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