Un groupe de 300 de jeunes réunis à
Suruç à l’appel de la Fédération Sosyalist Gençlik Derneği (Association,
Jeunesse Socialiste) pour aller à Kobanê, afin de contribuer à sa
reconstruction, a été victime d’un attentat à la bombe.
Une bombe (probablement “humaine”) a
explosé le 20 juillet, aux environs de 12h, lors de la conférence de
presse. De nombreuses caméras qui tournaient à ce moment-là ont filmé
l’explosion qui a fait 32 morts et une centaine de blessés.
(Attention, cette vidéo peut heurter les personnes sensibles)
Le Premier Ministre Davutoglu a déclaré : “L’enquête s’oriente vers un attentat de l’Etat Islamique” et le Sous-préfet de Suruç: “L’attentat pourrait avoir été commis par l’Etat Islamique”. Quant au Président Erdogan, il n’a pas trouvé utile d’interrompre son voyage à Chypre.
Plusieurs manifestations de protestation
à l’attentat de Suruç se sont déroulées à Istiklal et dans plusieurs
autres quartiers d’Istanbul, ainsi que dans de nombreuses villes du
pays, parfois dispersées avec violence par la police.
Les victimes sont majoritairement des
jeunes. L’attentat a provoqué une large vague de colère. Les soutiens de
Kobanê réagissent dans les médias et les réseaux sociaux, comme les
participants rescapés de l’attentat.
Loren Elva, militant LGBT, est
hospitalisé, souffrant de brûlures et de surdité. Encore sous le choc de
la violence de l’explosion Loren affirme :
Nous allions à Kobanê refleurir les espoirs détruits, construire une bibliothèque, un parc pour les enfants.
Mais il a les idées claires, il exprime sa colère et sa détermination :
Je ne suis pas bien, je ne serai pas bien, ne soyez pas bien !
Ces paroles qui appellent les gens à la prise de conscience et à réagir, sont devenus spontanément des hastags : #iyideğilim, #iyiolmayacagım, #iyiolmayin
Merve Kanak écrit de Suruç :
La nuit est tombée sur Suruç. Ils ont tué les gens avec lesquels on a chanté dans le bus. Ils ont tué les gens avec lesquels on a dansé. Les gens avec lesquels on a papoté, les confrères que nous étions surpris de voir là bas, il les ont tués. Il ont tué les gens avec lesquels on a pris le petit déj à Amara, rigolé, mangé une pastèque. Ils ont tué les gens avec lesquels on a discuté théorie, politique. Les gens qui avaient des idéologies différentes mais qui étaient réunis par la réalité de la Révolution, ils les ont tués.
Nous étions tous des gens bien. Nous allions réaliser un rêve. Nous avions 3 sacs remplis de jouets pour les enfants, vous me comprenez ?
Nous avons marché attentivement pour ne pas marcher sur les cadavres de nos camarades, vous me comprenez ?
J’ai compris pourquoi les “agit” (chants funebres) kurdes sont si tristes, vous me comprenez ?
C’est un soir difficile pour ceux qui sont restés en vie par hasard. Juste une question alors, c’est mieux de mourir, ou vivre ?
Avant de partir pour Suruç, Aydan Ezgi Sancı avait posté ce message sur son réseau [traduit par Etienne Copeaux]:
Aujourd’hui, des centaines de jeunes venus de Turquie et du Kurdistan du nord ont pris la route pour participer à la reconstruction de Kobanê. En cet anniversaire de la révolution de Rojava [le Kurdistan syrien] défendue corps et âmes par nos camarades, il s’agit d’un pas important dans la construction et le renforcement d’une culture. Nous avons combattu ensemble, ensemble nous reconstruirons.
Vous souvenez vous de cette image qui avait fait le tour d’Internet en décembre 2014 ?
Témoignant de la violence policière,
cette photo prise lors de l’arrestation d’un militant, pendant une manif
pour Kobanê, était devenue une icône représentative la répression
policière. Le flic pas content que l’homme continue à scander le slogan
“Stop aux tortures !” lui écarte -et déchire- la bouche avec une haine
quasi palpable sur la photo….
Vous avez dit torture ?
Cet homme s’appelle Cebrail Günebakan.
La violence policière n’avait pas réussi à arrêter ce jeune militant. La
violence fanatique l’a fait. Il est une des personnes décédées par
la bombe explosée aujourd’hui à Suruç.
.
.Dans cet attentat on ne peut lire qu’un
avertissement et vengeance de Daech envers les soutiens de Kobanê. Des
rumeurs sur le fait que les membres circuleraient relativement
facilement en Turquie, que les blessés seraient transportés et soignés
dans les hôpitaux turcs, traversent le pays. Et les aides d’arsenal révelés appuient ces rumeurs.
Plus le soutien et la résistance
s’élargit plus le risque de riposte de la part de Daech est palpable.
Plus Daech affrontera les soutiens de Kobanê en Turquie avec une
violence croissant, plus ces derniers se radicaliseront et élargiront
leur rangs… Effet boule de neige, sur une boule de feu…
32 vies de plus, enlevées par l’utilisation systématique de la
violence -d’état et des fanatiques- pour faire taire ceux qui
revendiquent une véritable démocratie, une véritable égalité, une
véritable paix. La solidarité internationale est de mise aussi contre
toutes les formes d’oppression et tous les intégrismes !
Quoi qu’il arrive les 32 jeunes morts à Suruç ne seront pas oubliés…
Koray Çapoğlu, Cebrail Günebakan,
Hatice Ezgi Sadet, Uğur Özkan, Nartan Kılıç, Veysel Özdemir, Nazegül
Poyraz, Kasım Deprem, Alper Sapan, Cemil Yıldız, Okan Pirinç, Ferdane
Kılıç, Yunus Emre Şen, Çağdaş Aydın, Alican Vural, Mehmet Ali Vural,
Osman Çiçek, Mücahit Erol, Mehmet Ali Barutçu, Aydan Ezgi Şalcı, Ali
Rıza Aslan, Nazlı Akyürek, Serhat Devrim, Ece Dinç, Emrullah Akalın,
Murat Yurtgül, Erdal Bozkurt, İsmet Şeker.
Vous pouvez trouver les portraits de ces jeunes dans l’article d’Etienne Copaux : Les jeunes victimes de Suruç ont un nom et un visage.
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