« Chaque fois qu’un homme a fait triompher la dignité de l’esprit, chaque fois qu’un homme a dit non à une tentative d’asservissement de son semblable, je me suis senti solidaire de son acte » Peau noire, masque blanc
Vingt
ans après le génocide des Tutsis et le massacre d’opposants, déclenché
le 6 avril 1994 au Rwanda, la justice française vient pour la première
fois de juger et de condamner un Rwandais séjournant en France. « N’est-il pas grandement temps d’oser regarder le passé en face ? »
interpelle un collectif de rescapés, chercheurs, écrivains, chanteurs,
journalistes et militants associatifs. Dans une lettre ouverte à Alain
Juppé, ministre des affaires étrangères à l’époque du massacre, ils
pointent des contradictions et omissions dans son discours qui
dédouaneraient les dirigeants français de toute responsabilité. « Nous souhaitons que l’État qui nous représente ait la dignité de reconnaitre ses erreurs », écrivent-ils.
Monsieur Alain Juppé,
Nous, habitants de Bordeaux, et citoyens attentifs au respect de la
mémoire des victimes du génocide des Tutsis au Rwanda, constatons que
depuis 20 ans vous tenez, concernant ce crime, un discours qui entre en
contradiction avec la réalité des faits. Il suscite de graves
interrogations sur votre rôle à l’époque, ainsi que sur celui de notre
État, auxquelles nous vous invitons à répondre.
Vous étiez ministre des affaires étrangères d’avril 1993 à avril
1995. Au cours de cette période, au Rwanda, se mettait en place et se
réalisait un génocide : en 1994, il y a 20 ans, plus de 800 000
personnes furent assassinées pour la seule raison que la mention Tutsi
figurait sur leurs cartes d’identité. Les forces armées rwandaises (FAR)
et les milices civiles réalisèrent les massacres. Ce crime, organisé et
rapide, dura 3 mois !
L’État français, jusqu’en 1994, était particulièrement proche des
autorités rwandaises. La présence militaire sur place est un des aspects
les plus visibles de cette proximité : de 1990 à la fin du génocide,
trois opérations françaises se déployèrent au Rwanda, et il n’y eut que
quelques mois au cours desquels notre armée ne fut pas présente en
nombre sur le territoire de ce petit pays. Depuis 20 ans, des
historiens, des écrivains, des journalistes, des associations, ainsi que
des organisations internationales [1],
accusent les autorités françaises d’avoir une responsabilité coupable
dans la réalisation du génocide, ou d’avoir été complices de celui-ci.
Environ 10 ans après les faits, des responsables politiques français
commencèrent à parler « d’erreur criminelle » (B. Kouchner), puis
« d’aveuglement » (N. Sarkozy), pour qualifier les décisions prises par
notre État à cette époque [2].
Mais votre position est toute autre. Selon vous, la France n’a rien à
se reprocher, bien au contraire. Vos arguments sont clairs, vous les
développez par exemple sur votre blog, dans un article mis en ligne le
1er mars 2010.
Concernant les accusations dirigées contre vous, vous vous contentez
de les balayer d’un revers de la main, au seul motif qu’elles ne
seraient « évidemment qu’un tissu d’allégations mensongères ». Mais
lorsque vous exposez votre vision des événements, force est de constater
que vous omettez et contredites des faits avérés, afin de produire un
discours dédouanant les dirigeants français de toute responsabilité.
Selon vous, M. Juppé, « le gouvernement français a tout fait pour
réconcilier le gouvernement du président Habyarimana, légalement élu, et
le leader du front patriotique rwandais (FPR) », « bref le processus de
paix semblait bien engagé... jusqu’à l’attentat du 6 avril 1994 qui a
évidemment ruiné les efforts de la diplomatie française. » Vous offrez,
en quelques phrases, un vernis démocratique au régime de Juvénal
Habyarimana, arrivé en pouvoir en 1973 par un coup d’État, et vous
légitimez ainsi l’aide que lui offraient les autorités françaises.
Mais vous fermez les yeux sur tous les éléments qui montraient la
préparation du génocide : le massacre des Bagogwe en 1991 ; celui des
Tutsis dans le Bugesera, dans la région de Kibuye et dans le nord-ouest
en 1992 et 1993 ; ainsi que les nombreux rapports, français [3] et internationaux, qui en attestent. Les plus notables, publiés en 1993, sont celui de quatre ONG [4], dont la FIDH, et celui de la commission des droits de l’Homme de l’ONU [5].
Ils interrogent déjà sur la possibilité de qualifier ces massacres de
génocide. Ils démontrent également qu’ils sont encadrés par les
autorités administratives et l’armée rwandaise, à une époque où les
forces militaires françaises collaborent étroitement avec celles-ci.
Devant la multitude de ces voyants rouges [6],
n’aurait-il pas été de votre devoir de dénoncer les crimes du régime et
d’appeler à suspendre notre coopération, plutôt que de les camoufler
derrière le paravent des accords d’Arusha ?
Ce processus de paix, bien engagé selon vous, était pourtant qualifié par le président Habyarimana de « chiffon de papier » [7].
Pouviez-vous réellement ignorer que l’État français enfreignait ses
clauses, notamment en poursuivant les fournitures d’armes au régime
raciste de Kigali bien après sa signature définitive (le 04 août 1993) :
la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda (MINUAR)
intercepta, sur l’aéroport de la capitale, une livraison en janvier 1994 [8] ; selon Edouard Balladur, la dernière autorisation d’exportation de matériel de guerre date du 6 avril [9] ?
Enfin, et c’est beaucoup plus grave, Human Rights Watch révèle, après
une enquête menée en 1995, qu’au moins cinq livraisons d’armes en
provenance de la France et à destination des forces génocidaires ont eu
lieu via l’aéroport de Goma, à la frontière zaïroise [10].
Elles s’effectuèrent après le 17 mai, alors que plus personne ne
pouvait ignorer qu’un génocide était en cours, et que l’ONU venait de
décréter un embargo sur les armes.
Les témoignages qui étayent ces conclusions sont-ils tous, eux aussi,
mensongers ? Vous admettiez pourtant, durant le génocide, ne pas
connaitre les décisions de l’Elysée concernant les ventes d’armes [11].
N’est-ce pas plutôt ces dernières qui ruinèrent les efforts de la
diplomatie française, si ces efforts ont existé ? Et l’Etat français ne
doit-il pas se reprocher cette aide aux génocidaires ?
Par ailleurs, vous écrivez : « loin de se taire sur tout ce qui s’est
alors passé au Rwanda, le gouvernement français a, par ma voix,
solennellement dénoncé le génocide dont des centaines de milliers de
Tutsis étaient les victimes ». C’est vrai, vous avez dénoncé le
génocide, et vous étiez le premier responsable politique français à le
faire, à un moment où il devenait impossible de nier son existence, et
où l’État devait corriger sa position. C’était le 16 mai 1994, cinq
semaines après le début des massacres, alors que certains médias
français employèrent le mot de génocide dès le 11 avril [12], et que l’ordre d’opération d’Amaryllis [13],
daté du 8 avril, mentionnait que « les membres de la garde
présidentielle ont mené […] l’arrestation et l’élimination des opposants
et des Tutsis ». Les autorités françaises savaient. Elles étaient les
mieux placées pour connaître exactement ce qui se passait au Rwanda,
bien avant le 16 mai.
Mais quand, devant l’évidence des faits, vous dénoncez les
responsables des massacres, c’est pour mieux mentir sur leur chronologie
en prétendant, le 18 mai à l’assemblée nationale, qu’ils sont la
conséquence d’une nouvelle attaque du FPR [14]. Or le FPR, en 1994, n’est intervenu qu’après le début du génocide [15],
et il était la seule force sur place à mettre fin à celui-ci. Présenter
les choses comme vous le faisiez, n’était-ce pas une manière de
détourner les accusations qui visaient ses véritables auteurs ?
De plus, le 16 juin, dans une tribune accordée au journal Libération [16],
vous parlez des « responsables de ces génocides » au Rwanda, au
pluriel, laissant entendre qu’il y aurait eu un second génocide, commis
par une autre partie que vous ne nommez pas. Cette thèse, que plus
personne n’ose sérieusement soutenir aujourd’hui, permettait de
dédouaner les responsables des tueries, en prétendant qu’ils ne
faisaient que se défendre... Vous repreniez ainsi l’argument
qu’employaient les génocidaires pour exterminer la population civile
Tutsi. Quels éléments pouvaient être suffisants pour vous permettre
d’évoquer un second génocide, alors que le rapport de l’ONU d’août 1993 [17]
ne vous avait, lui, pas alerté ? Oseriez-vous encore, M. Juppé, laisser
entendre qu’en 1994 plusieurs génocides étaient commis au Rwanda ?
Nous l’avons vu, les autorités françaises connaissaient la nature et l’ampleur des massacres, dès le commencement de ceux-ci [18].
Pouviez-vous ignorer qu’un génocide était en cours lorsque vous
receviez à Paris, le 27 avril, le ministre des affaires étrangères du
gouvernement intérimaire rwandais, ainsi que l’idéologue extrémiste
Jean-Bosco Barayagwiza ? Ce dernier est l’un des fondateurs de la RTLM,
la radio appelant aux tueries, qui fut un outil fondamental du génocide [19].
Il a été condamné à 32 ans de prison par le Tribunal Pénal
International pour le Rwanda. La réception de ces personnes au Quai
d’Orsay, mais aussi à l’Elysée et à Matignon,« rendait le génocide
respectable », pour employer les mots de l’historienne Alison Des Forges [20]. La Belgique et les USA leur avaient fermé leurs portes, la France fut le seul pays occidental à traiter avec eux.
Cette réception, M. Juppé, vous la taisez. Vous ne pouvez pas même la
justifier par une condamnation verbale des responsabilités portées par
vos hôtes. Celle-ci n’a pas existé...
Vous écrivez enfin « Ce que je sais, c’est que la communauté
internationale a fait preuve d’une passivité, voire d’un « aveuglement »
scandaleux. […] le conseil de sécurité a été incapable de prendre la
moindre décision... sauf celle de ramener les effectifs de la MINUAR de
2548 à 270 hommes (21 avril 1994) » ; « Devant la carence de la
communauté internationale […], la France a été la seule à avoir un
sursaut de courage. J’ai longuement expliqué, à l’époque, l’initiative
qui a abouti à l’opération Turquoise ». Là encore, vous contredisez les
faits. La France ne s’est nullement opposée à la passivité de la
communauté internationale que vous dénoncez. Elle y a participé, en
votant la résolution 912 du conseil de sécurité de l’ONU, réduisant
l’effectif de la MINUAR à 270 hommes, le 21 avril 1994, 14 jours après
le début du génocide.
Vous avez vous même déclaré, lors du conseil des ministres restreint
du 13 avril 1994, être favorable à la suspension de la MINUAR [21],
à un moment où le pire pouvait encore être évité. Ce n’est que dans un
second temps, au mois de juin, alors que le génocide touche à sa fin,
que l’État français prend la décision d’intervenir. Ce n’est pas un
moment anodin : Kigali menace de tomber aux mains du FPR, qui s’oppose
militairement aux forces armées rwandaises et stoppe l’extermination des
Tutsis.
Faut-il rappeler que l’opération Turquoise, qualifiée d’ « humanitaire », était lourdement armée [22] et composée en grande partie de l’élite des forces spéciales [23] ?
Et que la France a imposé unilatéralement, sans l’accord du conseil de
sécurité, une « zone humanitaire sûre » dans laquelle les tueurs ne
seront pas désarmés, les responsables ne seront pas arrêtés, et depuis
laquelle la RTLM, qui appelait aux massacres, pourra continuer à émettre
sans souffrir de tentative de brouillage ni de neutralisation [24] ?
Les forces françaises avaient pourtant le devoir d’interrompre le
génocide et d’arrêter les coupables, notamment à partir du 28 juin, date
de sa reconnaissance par l’ONU : la France est signataire de la
Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de
génocide, et l’opération « humanitaire », placée dans le cadre du
chapitre VII [25] de la charte de l’ONU, pouvait recourir à « tous les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs humanitaires énoncés » [26]. Mais les objectifs militaires sur place étaient tout autre, comme en témoignent des propos d’officiers [27], ainsi que l’ordre d’opération de Turquoise appelant à inciter les autorités locales à rétablir leur autorité [28].
Il s’agit bien ici des autorités qui ordonnaient et organisaient le
génocide ! Si l’opération Turquoise a permis par endroits de sauver des
vies, elle a ailleurs, comme à Bisesero, du 27 au 30 juin, laissé les
tueurs finir librement leur besogne [29].
Elle a créé un véritable sanctuaire, défendu militairement, dans lequel
les responsables du génocide ne pouvaient être inquiétés, puis elle a
organisé leur fuite vers le Zaïre [30].
Continuez-vous à prétendre, M. Juppé, contre l’évidence des faits,
que l’État français s’est opposé à la passivité de l’ONU devant le
génocide des Tutsis ? Et que l’opération Turquoise n’était qu’une
opération humanitaire, dont le but était de lutter contre ce génocide ?
Aux premiers jours du génocide, les extrêmistes hutu se retrouvaient à
l’ambassade de France. Les discussions devant aboutir à la formation du
gouvernement génocidaire s’y tinrent en partie, avec la participation
de l’ambassadeur J.-M. Marlaud, donc sous votre responsabilité directe [31].
Durant la même période, tout près de l’ambassade, Madame Agathe
Uwilingiyimana, première ministre dite hutu modérée, favorable aux
accords de paix, se faisait assassiner, comme beaucoup des responsables
politiques partageant ses opinions. Vous n’avez jamais eu un mot pour
dénoncer ces assassinats ! Mais vous avez traité, comme nous l’avons vu,
avec le gouvernement génocidaire, le reconnaissant de fait et lui
offrant la caution de la France.
En 1998, lors de votre audition par la mission d’information
parlementaire, vous avez évoqué ces faits par un euphémisme
particulièrement surprenant, parlant du « départ des hutus modérés » [32].
Plus qu’une maladresse, n’était-ce pas là, encore une fois, une manière
de dédouaner les criminels avec qui vous traitiez, et de refaire le
passé ?
Vingt ans après, alors que notre justice vient pour la première fois
de juger, et de déclarer coupable de génocide, un Rwandais séjournant en
France, n’est-il pas grandement temps d’oser regarder le passé en
face ? Nous souhaitons que l’État qui nous représente ait la dignité de
reconnaitre ses erreurs. C’est la seule attitude qui puisse nous
paraitre respectable, aujourd’hui, devant la souffrance immense générée
par le génocide des Tutsis.
Le mandat que vous aviez à l’époque, les décisions que vous avez
prises, la manière dont vous les avez défendues jusqu’à présent, font de
vous un acteur majeur de la politique française au Rwanda. Les
mensonges de ceux qui nous gouvernaient en 1994, concernant l’aide
fournie à la réalisation du génocide des Tutsis, nous concernent au plus
haut point. Votre discours, qui entre en contradiction avec les faits
avérés, pourrait être qualifié de révisionniste. Il nous paraît
inacceptable qu’un homme tenant des propos sur un génocide visant à
tromper ses concitoyens puisse représenter la population bordelaise.
C’est également notre dignité qui est en jeu ! Nous vous invitons donc,
encore une fois, à répondre avec clarté et honnêteté aux questions que
nous vous posons.
AUBRY Patrick, réalisateur, Pessac
BOURREAU Pierre, chercheur en informatique, Bordeaux
CATTIER Emmanuel, Commission d’Enquête Citoyenne pour la vérité sur l’implication française dans le génocide des Tutsi
CLARKE Bruce, plasticien
COURTOUX Sharon, membre fondateur de l’association Survie
DELTOMBE Thomas, éditeur et journaliste
DIA Thierno I., analyste de l’image, Bordeaux
DIOP Boubacar Boris, écrivain
FANON MENDES FRANCE Mireille, membre de la Fondation Frantz Fanon
GALABERT Jean-Luc, psychologue
GAUTHIER Alain, président du CPCR
GODARD Marie Odile, maître de conférences en psychologie à Amiens
GOUTEUX Bruno, journaliste et webmaster
GRANDCHAMP Simon, ingénieur, Bordeaux
GRENIER Etienne, avocat, Bordeaux
HANNA Gilbert, syndicaliste et journaliste à la clé des ondes, Bordeaux
KAYIMAHE Vénuste (rwandais et rescapé, écrivain, employé au Centre d’échanges culturels franco-rwandais à Kigali de 1975 à 2000)
LAINÉ Anne, cinéaste, présidente d’Appui Rwanda
DE LA PRADELLE Géraud, professeur émérite
LE COUR GRANDMAISON Olivier, universitaire
LEMOINE Benoît, président de Survie Gironde, Bordeaux
MABON Armelle, historienne
MESTRE Claire, médecin et anthropologue, Bordeaux
MOREL Jacques, auteur de La France au coeur du génocide des Tutsi
MUGICA Romain, psychologue, Gradignan
MUKANTABANA Adélaïde, Rwandaise et rescapée, Bègles
NDIAYE Abdourahmane, économiste, Bordeaux
NONORGUES Marie-Paule, avocate, Bordeaux
LES OGRES DE BARBACK, artistes
OUEDRAOGO Dragoss, anthropologue, cinéaste, réalisateur, Bordeaux
PETITDEMANGE Cécile, étudiante à Sciences Po Bordeaux
ROBERT Nicolas, infirmier, Bordeaux
DE SAINT-EXUPÉRY Patrick, auteur de L’inavouable, la France au Rwanda (Ed. des Arènes, 2004), Complices de l’inavouable, la France au Rwanda (Ed. des Arènes, 2009), La fantaisie des Dieux, Rwanda 94 (Récit graphique en bd, avec Hippolyte, Ed. des Arenes, 2014)
SITBON Michel, éditeur et journaliste
SOW Cheikh, militant d’éducation populaire et artiste, Bègles
TARRIT Fabrice, président de Survie
TOBNER Odile, ancienne présidente de Survie
TOULABOR Comi, directeur de recherche à Sciences Po Bordeaux
TRYO, artistes
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