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samedi 5 mai 2012

Lettre de Philippe Torreton à Jean Ferrat

Jean, j’aimerais te laisser tranquille, au repos dans cette terre choisie. J’aurais aimé que ta voix chaude ne serve maintenant qu’à faire éclore les jeunes pousses plus tôt au printemps, la preuve, j’étais à Antraigues il n’y a pas si longtemps et je n’ai pas souhaité faire le pèlerinage. Le repos c’est sacré ! Pardon te t’emmerder, mais l’heure est grave, Jean. Je ne sais pas si là où tu es tu ne reçois que le Figaro comme dans les hôtels qui ne connaissent pas le débat d’idées, je ne sais pas si tu vois tout, de là haut, ou si tu n’as que les titres d’une presse vendue aux argentiers proche du pouvoir pour te tenir au parfum, mais l’heure est grave ! 

Jean, écoute-moi, écoute-nous, écoute cette France que tu as si bien chantée, écoute-la craquer, écoute la gémir, cette France qui travaille dur et rentre crevée le soir, celle qui paye et répare sans cesse les erreurs des puissants par son sang et ses petites économies, celle qui meurt au travail, qui s’abîme les poumons, celle qui se blesse, qui subit les méthodes de management, celle qui s’immole devant ses collègues de bureau, celle qui se shoote aux psychotropes, celle à qui on demande sans cesse de faire des efforts alors que ses nerfs sont déjà élimés comme une maigre ficelle, celle qui se fait virer à coups de charters, celle que l’on traque comme d’autres en d’autres temps que tu as chantés, celle qu’on fait circuler à coups de circulaires, celle de ces étudiants affamés ou prostitués, celle de ceux-là qui savent déjà que le meilleur n’est pas pour eux, celle à qui on demande plusieurs fois par jour ses papiers, celle de ces vieux pauvres alors que leurs corps témoignent encore du labeur, celles de ces réfugiés dans leurs propre pays qui vivent dehors et à qui l’on demande par grand froid de ne pas sortir de chez eux, de cette France qui a mal aux dents, qui se réinvente le scorbut et la rougeole, cette France de bigleux trop pauvres pour changer de lunettes, cette France qui pleure quand le ticket de métro augmente, celle qui par manque de superflu arrête l’essentiel… 

Jean, rechante quelque chose je t’en prie, toi, qui en voulais à D’Ormesson de déclarer, déjà dans le Figaro, qu’un air de liberté flottait sur Saïgon, entends-tu dans cette campagne mugir ce sinistre Guéant qui ose déclarer que toutes les civilisations ne se valent pas? Qui pourrait le chanter maintenant ? Pas le rock français qui s’est vendu à la Première dame de France. 

Ecris-nous quelque chose à la gloire de Serge Letchimy qui a osé dire devant le peuple français à quelle famille de pensée appartenait Guéant et tous ceux qui le soutiennent ! Jean, l’huma ne se vend plus aux bouches des métros, c’est Bolloré qui a remporté le marché avec ses gratuits. Maintenant, pour avoir l’info juste, on fait comme les poilus de 14/18 qui ne croyaient plus la propagande, il faut remonter aux sources soi-même, il nous faut fouiller dans les blogs… Tu l’aurais chanté même chez Drucker cette presse insipide, ces journalistes fantoches qui se font mandater par l’Elysée pour avoir l’honneur de poser des questions préparées au Président, tu leurs aurais trouvé des rimes sévères et grivoises avec vendu… 

Jean, l’argent est sale, toujours, tu le sais, il est taché entre autre du sang de ces ingénieurs français. La justice avance péniblement grâce au courage de quelques-uns, et l’on ose donner des leçons de civilisation au monde… Jean, l’Allemagne n’est plus qu’à un euro de l’heure du STO, et le chômeur est visé, insulté, soupçonné. La Hongrie retourne en arrière ses voiles noires gonflées par l’haleine fétide des renvois populistes de cette droite “décomplexée”. Jean, les montagnes saignent, son or blanc dégouline en torrents de boue, l’homme meurt de sa fiente carbonée et irradiée, le poulet n’est plus aux hormones mais aux antibiotiques et nourri au maïs transgénique. Et les écologistes n’en finissent tellement pas de ne pas savoir faire de la politique. Le paysan est mort et ce n’est pas les numéros de cirque du Salon de l’Agriculture qui vont nous prouver le contraire. Les cowboys aussi faisaient tourner les derniers indiens dans les cirques. Le paysan est un employé de maison chargé de refaire les jardins de l’industrie agroalimentaire. On lui dit de couper il coupe, on lui dit de tuer son cheptel il le tue, on lui dit de s’endetter il s’endette, on lui dit de pulvériser il pulvérise, on lui dit de voter à droite il vote à droite… Finies les jacqueries ! 

Jean, la Commune n’en finit pas de se faire massacrer chaque jour qui passe. Quand chanterons-nous “le Temps des Cerises” ? Elle voulait le peuple instruit, ici et maintenant on le veut soumis, corvéable, vilipendé quand il perd son emploi, bafoué quand il veut prendre sa retraite, carencé quand il tombe malade… Ici on massacre l’Ecole laïque, on lui préfère le curé, on cherche l’excellence comme on chercherait des pépites de hasards, on traque la délinquance dès la petite enfance mais on se moque du savoir et de la culture partagés… 

Jean, je te quitte, pardon de t’avoir dérangé, mais mon pays se perd et comme toi j’aime cette France, je l’aime ruisselante de rage et de fatigue, j’aime sa voix rauque de trop de luttes, je l’aime intransigeante, exigeante, je l’aime quand elle prend la rue ou les armes, quand elle se rend compte de son exploitation, quand elle sent la vérité comme on sent la sueur, quand elle passe les Pyrénées pour soutenir son frère ibérique, quand elle donne d’elle même pour le plus pauvre qu’elle, quand elle s’appelle en 54 par temps d’hiver, ou en 40 à l’approche de l’été. Je l’aime quand elle devient universelle, quand elle bouge avant tout le monde sans savoir si les autres suivront, quand elle ne se compare qu’à elle-même et puise sa morale et ses valeurs dans le sacrifice de ses morts… Jean, je voudrais tellement t’annoncer de bonnes nouvelles au mois de mai…
 Je t’embrasse. Philippe Torreton ».

1 commentaire:

  1. DEPARDIEU CHEZ LES BELGES

    Des citoyens français se sentent offensés par le choix de Depardieu de s’exiler en terre belge sous prétexte que la raison de cette fuite est strictement financière.

    L’argent est à ce point sacralisé par notre société et les adeptes de ce culte tellement obsédés par ses éclats que TOUT est jugé à travers son prisme. Aux yeux de ces esprits triviaux et mesquins l’argent est la priorité numéro un conditionnant tous les aspects de leur vie sociale, politique, culturelle...

    Depardieu s’est abstrait de l’impôt sur la fortune. Il y a donc baisse de profit pour la France. Moi-même je ne nie pas cette vérité. Il y a effectivement perte fiscale pour le pays.

    Oui et alors ?

    Comme si c’était là l’argument suprême permettant aux “honnêtes gens” d’injurier le “fautif”. L’argent qu’un citoyen soustrait à son état par exil interposé ne donne pas pour autant de droits supplémentaires aux autres membres de la société se considérant lésés (de manière toute subjective d’ailleurs), et surtout pas celui de l’insulter, de le condamner, de le haïr ! Si Depardieu était parti pour la beauté du paysage belge, personne ne lui aurait fait le moindre reproche. Mais dès qu’il est question d’argent, le peuple voit rouge.

    Loin de ces considérations vulgaires au sujet de l’argent, j’aimerais rappeler l’essentiel : ce qui fait la spécificité de notre démocratie, c’est la liberté de s’en extraire volontairement, le choix pour tous de s’exiler afin de trouver mieux ailleurs. Mieux selon des critères personnels, culturels, familiaux, matériels, politiques, idéologiques, etc..

    Je ne vois pas en quoi Depardieu serait un mauvais citoyen parce qu’il trouve avantage de vivre en Belgique... Au contraire il donne l’exemple de l’espoir et du courage en exerçant sa souveraine liberté de trouver asile hors de son pays natal. Peu importe sa justification. Cela ne nous regarde même pas. Et même si la cause de son départ est effectivement l’argent, où est le mal ?

    Le principal est qu’il ait trouvé l’atmosphère belge plus respirable, qu’il se sente plus heureux, plus libre, plus fortuné, plus sage ou plus fou là bas plutôt que chez nous. Que je sache, la constitution française n’exige pas d’explications de la part de ses citoyens en mal d’horizons nouveaux : elle les laisse franchir ses frontières sans entrave ni jugement. Chaque français est libre de quitter sa patrie, quel qu’en soit le motif. C’est cela la grandeur de la république.

    Théoriquement.

    Malheureusement c’est sans compter ces justiciers de la petitesse se donnant le droit de juger leurs concitoyens pour de viles histoires d’argent, leur sens de la justice se bornant minablement à cette seule forme de réalité qu’ils semblent connaître dans l’existence, ou plutôt la forme de réalité qui leur est la plus chère : la réalité bassement économique.

    Raphaël Zacharie de IZARRA

    VOIR LA VIDEO :

    http://www.dailymotion.com/video/xw0thr_depardieu-chez-les-belges-raphael-zacharie-de-izarra_news#.UM92wm_Rvns

    Raphaël Zacharie de IZARRA

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