Solidarité Maroc Archives التضامن المغرب : Zakaria Moumni n'a pas été libéré par grâce royale...

vendredi 13 janvier 2012

Zakaria Moumni n'a pas été libéré par grâce royale...

Un champion en prison

Par MARIE VERDIER, La Croix, 11/1/2011

Zakaria Moumni, Champion marocain de light contact, (boxe thaïe)

En ce jour traditionnel de grâce royale au Maroc, les ONG internationales de droit de l’homme demandent au roi Mohamed VI de libérer et réhabiliter le champion marocain victime d’une détention « inique » depuis 472 jours.

Zakaria Moumni a une volonté de fer. Ce trait de caractère mènera le jeune marocain, fier de son père boxeur et fan de Jean-Claude Van Damme, sur la plus haute marche du podium pour décrocher, à 19 ans, le titre de champion du monde de light contact (boxe thaïe) à Malte en 1999. Cette endurance et cet entêtement, Zakaria Moumni, aujourd’hui 31 ans, les a utilisés sans relâche pour faire valoir ses droits – il aurait dû, avec sa médaille d’or, bénéficier d’un poste d’entraîneur au sein de la fédération sportive – et dénoncer dans les médias la corruption dans le sport marocain.

Le trublion écarté et interdit de championnat dès 2001 gagne la France en 2006, s’installe comme coach sportif, se marie et continue son combat depuis Paris. Mais le 25 janvier 2010, il va trop loin aux yeux des autorités marocaines. Ce jour-là, il crie son mécontentement sous les fenêtres de la résidence royale du château de Betz (dans l’Oise) au moment où le roi Mohammed VI y séjourne. « Nous avions eu l’autorisation de manifester de la part de la préfecture, nous étions deux, Zakaria

et moi », raconte aujourd’hui sa femme française Taline.

Six mois plus tard, le 27 septembre 2010, Zakaria Moumni disparaît à sa descente d’avion à Rabat. Sa femme s’inquiète : « L’aéroport d’Orly a alors confirmé qu’il avait embarqué dans l’avion, mais celui de Rabat l’a démenti. »

Quatre jours plus tard, l’avocat marocain Abderrahim Jamaï découvre que Zakaria Moumni a déjà été jugé le 30 septembre, lors d’un procès expéditif sans avocat, sans témoins ni même plaignants. Il croupit depuis lors dans les geôles marocaines.

« Zakaria Moumni a sous la torture avoué un prétendu délit d’escroquerie », dénonce l’avocat Patrick Baudouin, président d’honneur de la Fédération internationale des droits de l’homme, qui souligne le décalage « choquant » entre une justice « fait du prince » et les discours marocains en faveur de la démocratie. La FIDH, Human Rights Watch et le comité de soutien à Zakaria Moumni, qui regroupe les associations de droits de l’homme marocaines, demandent au roi Mohammed VI de le gracier, en ce jour de commémoration du manifeste de l’indépendance qui donne chaque année lieu à ces grâces royales.

Cette grâce est pour Zakaria Moumni l’ultime recours, puisqu’il a été condamné à trente-six mois de prison ferme en première instance, à trente mois en appel, puis, après recours en cassation, à vingt mois, le 22 décembre dernier. Les supposées victimes – en échange de 1 200 €, Zakaria Moumni leur aurait promis un emploi en France – se sont présentées à ce dernier procès comme simples témoins. « C’est un cas de figure rare que des plaignants ne se constituent pas partie civile et ne réclament pas réparation », souligne Me Baudouin pour illustrer « une mascarade de procès ».

À ses yeux, cette grâce « n’est pas une faveur mais un droit absolu ». Les ONG réclament la libération et la pleine réhabilitation de Zakaria Moumni, champion sportif devenu prisonnier d’opinion comme d’autres cas médiatisés par la presse marocaine, tel le jeune rappeur Mouad Belghouat, figure du

Mouvement du 20-Février, sous les barreaux depuis le 9 septembre dernier, ou le directeur du journal marocain Al-Massae, Rachid Niny, condamné à un an de prison le 9 juin dernier.

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