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vendredi 8 janvier 2010

Zahra :" devenir le symbole de la libération " du Maroc



Par Ahmed BENANI, Lausanne, 9/1/2010

Ma pauvre Zahra, dans quel bourbier vous vous êtes mise: Vous êtes née sous le régime de la tyrannie absolue, celui que génère un pouvoir monarchique de droit divin. Et du fond de votre prison, vous étudiez le droit, parce que vous pensez que l'individu de droit peut donner corps au fonctionnement autonome de la communauté marocaine. 
Or ce pouvoir correspondant à cette liberté contractuelle des individus n'existe pas au Maroc. L'Etat, les partis, les syndicats, les élites et même les masses vous laissent pourrir dans votre geôle infâme parce que vous n'existez pas, vous n'êtes pas citoyenne, la citoyenneté politique n'existe pas dans le royaume de M6. Vous avez droit à ma compassion, à ma solidarité,tâchez de rester en vie, c'est l'essentiel. Du royaume des lâches, finiront bien par émerger quelques personnes pour renverser l'ordre archaïque, des voleurs, des tartuffes, des musulmans sujets du roi et d'un Allah absent, pour ouvrir un cours nouveau de l'Histoire des Femmes et des Hommes libres. Maudissez les Alaouites de toutes vos forces, réfutez leur système de toute votre énergie, vous verrez poindre la lumière; dites-vous bien qu'il n'y a ni Allah, ni Watan, ni Malik, mais trente-cinq millions de sujets qui sont en train de sortir de leur névrose collective pour retrouver leur autonomie et leur liberté.
Un homme peut vous aider, s'il accepte de sortir de sa léthargie et qu'il prenne les commandes d'un puissant mouvement constitutionnel nouveau pour que la monarchie soit réduite à un décorum, cet homme c'est Moulay Hicham; il sait en conscience ce qui lui reste à faire pour vous, vos semblables et son pays.
Solidairement avec vous. Je vous souhaite, parce que femme, de devenir le symbole de la libération de notre pays.


Que l’on ne se méprenne pas sur ma petite chronique
par AB, 9 janvier2009
J’entends déjà les sarcasmes de mes détracteurs, revoilà Ahmed BENANI qui nous remet son antienne sur l’absolutisme de la monarchie marocaine ! Je passe outre, mais dois cependant deux ou trois explications sur cette monarchie de doit divin et son chant du cygne !
M6, Monarque de droit divin, qu’est-ce que cela veut encore dire en 2010 !
Pas grand-chose en vérité. La notion de doit divin se délite après avoir servi. Elle a habillé l’inversion de signe entre religion et politique au lieu du pouvoir. Cette monarchie a très longtemps été ou feint d’être au-dessous de la religion, à son service ; aujourd’hui elle passe au-dessus, elle instrumentalise le religieux et d’abord à son propre profit, comme source de légitimation quasi éternelle. M6 est commandeur des croyants (amir al moumine[1]) cf. articles 19  et 23[2] de la constitution. Et comme on est un peuple de 35 millions d’imbéciles, le roi, ses idéologues, ses oulémas, gèrent le sacré de sorte à nous maintenir dans la névrose collective ou la fatalité, c’est selon.
« Tout pouvoir vient de dieu », formule d’une affligeante banalité, mais constamment invoquée elle acquiert une signification toute particulière dans le contexte makhzénien ; elle se charge effectivement de la revendication d’un lien immédiat, permanent et exclusif avec le Ciel. Naturellement que ce Ciel est dissocié du terrestre et n’a d’autre communication avec lui que par le truchement du souverain terrestre M6, et la boucle est bouclée. Après 38 ans de cette mythologisation sous Hassan II, M6 nous rejoue la même dramaturgie, il prétend remplir une fonction qui l’emmène aux antipodes de l’ici-bas et de l’au-delà. Il est l’acteur d’une nécessité qui n’a rien au-dessus d’elle, celle de la conservation du corps politique et de son cadre immuable, le makhzen. Il se pose comme l’instance garante de l’intérêt vital de la communauté des sujets. On est avec cet ordre là, celui de l’altérité divine, dans la clôture du domaine humain !
« Il y a encore quelque part des peuples et des troupeaux, mais pas chez nous, mes frères. Chez nous, il y a des Etats. Etat ? Qu’est-ce que cela ? Allons, ouvrez vos oreilles, je vais vous parler de la mort de peuples. L’Etat, c’est le plus froid de tous les monstres froids. Il ment froidement ; et voici le mensonge qui s’échappe par sa bouche : « Moi, l’Etat, je suis le peuple »[3].
L’Etat au Maroc, chacun sait ce qu’il est en réalité et c’est cette réalité qu’il s’agit de transformer.
La symphonie que nous commençons de jouer, au niveau de la société civile, par la lutte des femmes, le refus du patriarcat islamique totalement anachronique, les progrès de la sécularisation et les percées encore timides de la démocratisation, fait que nous réfutons de plus en plus la divinisation du pouvoir.
S’il est impossible de renverser l’ordre établi d’un coup de baguette magique, nous savons que nous avançons tout de même. La constitution dans ses articles 20 et 21[4] fixe les règles de la succession monarchique, j’ai cru comprendre que le prince Moulay Hicham réfutait les règles de la primogéniture et s’inscrivait dans un combat pour l’établissement d’une monarchie constitutionnelle. Où est Moulay Hicham aujourd’hui ; je le comptais parmi mes amis et le compte encore ; dans ma petite chronique au sujet de Zahra, je lui signifiais également qu’il est temps qu’il se manifeste de manière forte et significative. M’entendrez-vous, prince-citoyen !



[1] ARTICLE 19: Le Roi, Amir Al Mouminine. Représentant Suprême de la Nation, Symbole de son unité, Garant de la pérennité et de la continuité de l'Etat, veille au respect de l'Islam et de la Constitution. Il est le protecteur des droits et libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités.
Il garantit l'indépendance de la Nation et l'intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques.

[2] ARTICLE 23: La personne du Roi est inviolable et sacrée
[3] Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, Paris, Gallimard, 1971, pp.61-63.
[4] ARTICLE 20: La Couronne du Maroc et ses droits constitutionnels sont héréditaires et se transmettent de père en fils aux descendants mâles en ligne directe et par ordre de primogéniture de SA MAJESTE LE ROI HASSAN II, à moins que le Roi ne désigne, de son vivant, un successeur parmi ses fils, autre que son fils aîné. Lorsqu'il n'y a pas de descendants mâles en ligne directe, la succession au Trône est dévolue à la ligne collatérale mâle la plus proche et dans les mêmes conditions.
ARTICLE 21: Le Roi est mineur jusqu'à seize ans accomplis. Durant la minorité du Roi, un Conseil de régence exerce les pouvoirs et les droits constitutionnels de la Couronne, sauf ceux relatifs à la révision de la Constitution. Le Conseil de régence fonctionnera comme organe consultatif auprès du Roi jusqu'au jour où il aura atteint l'âge de vingt ans (20) accomplis.
Le Conseil de régence est présidé par le premier président de la Cour Suprême. Il se compose, en outre, du président de la Chambre des Représentants, du président de la Chambre des Conseillers, du Président du Conseil régional des oulémas des villes de Rabat et Salé et de dix personnalités désignées par le Roi intuitu personae.
Les règles de fonctionnement du Conseil de régence sont fixées par une loi organique.

Ahmed Benani est professeur d'histoire, chargé d'un cours sur « L'islam dans l'espace européen », à l'Université de Lausanne et de Genève (DESS), président de l'Observatoire international des affaires de la Palestine, membre fondateur des comités de lutte contre la répression au Maroc, co-auteur (avec Mondher Kilani) de  Islam et changement social, 1998.

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