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samedi 14 novembre 2009

Douce France : L'argent des expulsions expliqué à mon beauf


Par Lucie Delaporte,Bakchich, 21/10/2009

En moyenne, chaque "procédure d’éloignement" coûte 20970 euros.


Bruno, mon beauf, est vraiment embêté. Les expulsions de sans papiers, relancées par la riche idée du ministre desdites expulsions, Eric Besson, de remplir des charters vers l’Afghanistan, il ne sait pas bien quoi en penser. D’un côté, renvoyer dans leur pays d’origine des pauvres gars qui vivent et travaillent en France depuis des années, il ne trouve pas ça très sympa. « Et en même temps », me dit-il, « si on le fait pas, ça créé un appel d’air, et toute l’Afrique débarque demain matin ». Et ça, ça lui fout les jetons.
Pour t’éclairer, Bruno, tu ferais bien de jeter un œil sur les dessous de ce qu’on appelle pudiquement les « procédures d’éloignement ». Tu vas voir, ça déplace les perspectives. D’abord, chaque expulsion coûte en moyenne – selon un rapport du sénateur UMP, Pierre-Bernard Reymond - 20.970 euros. En plus des billets d’avions - c’est la compagnie spécialiste du voyage d’affaires Carlson Wagonlit qui a décroché ce joli marché - il faut compter deux à trois « escortes » policières qui font l’aller-retour, le séjour en centre de rétention (et pourtant c’est pas des quatre étoiles !) à quoi s’ajoute la mobilisation des services des préfecture, des tribunaux administratifs etc.
Je te vois venir, Bruno. Tu es déjà en train de multiplier ce chiffre par les 30 000 expulsions annoncées en 2009. En fait, c’est un peu plus compliqué que ça. Comme le gouvernement gonfle les chiffres de ces reconduites, c’est en fait beaucoup moins. Enfin bref, au final, selon les calculs de notre sénateur UMP, notre politique « d’éloignement » coûte 415,2 millions d’euros. Près d’un demi-milliard chaque année pour renvoyer des types qui en général reviennent dès qu’ils le peuvent. Est-ce bien raisonnable ?
D’autant que cette somme ne recouvre pas la totalité des frais engagés. Tu ne sais sans doute pas, Bruno, que depuis un an, les consulats des pays d’émigration traînent des pieds pour délivrer des laissez-passer à leurs ressortissants, indispensables aux expulsions. Il faut dire que pour certains pays comme le Mali, l’argent des migrants est vital pour leur économie (jusqu’à trois fois l’aide au développement). Le deal proposé par la France - un peu d’aide au développement et vous acceptez sans broncher les expulsions - leur paraît un poil déséquilibré. Du coup, un petit système bien opaque s’est mis en place.

Un certain nombre de services consulaires ont fait comprendre au gouvernement français qu’il devait mettre un peu d’huile dans les rouages pour que la machine à expulser ne se bloque pas. « Ça se monnaye souvent en dessous de table », raconte Jean-Claude Amara, porte parole de « Droits devant !! », l’association de défense des sans-papiers. Selon les pays, chaque laissez-passer se négocie, en « frais de dossiers » et « taxes » diverses, de quelques dizaines à quelques centaines d’euros.
« Pour tenir un chiffre, on est prêt à faire n’importe quoi », commente l’avocat spécialiste du droit des étrangers Sohil Boudjellal. Tu vois, Bruno, les expulsions c’est un vrai business. Et pas des plus reluisants.

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