Le courrier de l'Atlas, 6/2/2012
Entre les déclarations rassurantes du gouvernement et les témoignages diffusés par les médias électroniques, difficile de se faire une opinion objective de la situation dans cette ville du nord-est marocain.
Dans un communiqué officiel publié hier dimanche par la MAP* (agence officielle d'information), le gouvernement fait état d’un retour au calme dans la ville de Taza, suite à de violents affrontements entre forces de l’ordre et manifestants sur fond de revendications sociales, « que certains ont tenté d’exploiter de manière tendancieuse dans le but d'aggraver la situation dans la ville, tout en présentant des données erronées à l'opinion publique ».
Le communiqué rapporte que « le gouvernement œuvre à traiter les causes sociales à l'origine de ces incidents, réaffirme que le dialogue responsable reste le moyen idoine pour répondre aux revendications légitimes et rappelle que manifester de manière pacifique est un droit garanti par la loi ».
Toutefois, des médias marocains font état d’une recrudescence des violences, prenant à contrepied le communiqué officiel du gouvernement. C’est ainsi que le site d’information Hespress, citant des militants du Centre marocain des droits de l’Homme – section de Taza, rapporte que les forces de l’ordre ont encerclé le quartier d’El Koucha pour intervenir de manière qualifiée de « brutale et injustifiée », d’après des témoins cités par Hespress.
A l’origine de ces heurts, des slogans décriant les forces d’intervention, après la visite d’un comité mandaté par le PPS (Parti du Progrès et du Socialisme – membre de la coalition gouvernementale), dans l’optique d’entamer le dialogue avec les manifestants et de jeter la lumière sur certains comportements « abusifs » attribués aux forces de l’ordre.
État de siège ?
Toujours selon Hespress, dans une vidéo mise en ligne par le site, des manifestants ont brièvement bloqué samedi soir la route secondaire reliant Taza à Fès, afin de barrer la route aux renforts provenant de cette dernière.
Adil El Bakhchouch, membre de la section locale du Centre marocain des droits de l’Homme, affirme avoir été arrêté d’une manière qu’il a qualifiée « d’abusive » pour être ensuite relâché après cinq heures d’interrogatoires portant sur « son activisme politique ».
D’autres vidéos mises en lignes par Hespress ainsi que par le site Lakome.com rapportent des témoignages troublants. En plus de vidéos montrant les forces de l’ordre intervenant de façon extrêmement brutale, plusieurs femmes attestent de cas de violation de domicile par les forces de l’ordre, ce qui constitue une infraction flagrante de la loi en l’absence d’un mandat signé par le procureur du roi.
Amine Baha, militant au sein du Mouvement du 20 février, qui rentre d’une visite de terrain à Taza, rapporte l’arrestation de 22 jeunes « dont au moins quatre n’ont participé ni aux émeutes ni aux manifestations ». Interrogeant des riverains, ces derniers se disent « indignés par le comportement des autorités ».
Des affirmations rejetées en bloc par le communiqué officiel du gouvernement diffusé hier soir, pour qui « certains organes de presse, notamment électroniques, ont inventé des événements et amplifié ces incidents en véhiculant de fausses informations, induisant ainsi en erreur l'opinion publique ».
Pourtant, l’un de ces sites (Lakome.com) a diffusé le témoignage vidéo de Khalid Boukarîi, un parlementaire qui, suite à une visite à Taza, a confirmé les cas de violation de domicile commis par les forces de l’ordre avec dégradation des biens des habitants. Un témoignage d’autant plus inquiétant que ce parlementaire appartient au PJD, parti dont est issu l’actuel chef de gouvernement…
*voir ci-dessous
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