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mardi 1 novembre 2011

Maroc :: Le pouvoir du roi contesté

Par Farid Belkhatir et Luc Vancauwenberge31 /10/2011


Khadija Ryadi est la présidente de l’AMDH, l’Association marocaine des droits humains, l’organisation des droits de l’homme la plus importante du pays. L’AMDH soutient le Mouvement du 20 février, qui conteste l’omnipotence du Roi. Khadija Ryadi était dernièrement à Bruxelles où nous l’avons rencontrée. Extraits.

« Dans les années 90, nous avons connu quelques améliorations. Mais, après le 11 septembre 2001, le Maroc s’est inscrit dans la stratégie américaine de la lutte contre le terrorisme avec arrestations illégales, enlèvements, torture, notamment au centre de Temara…1 La situation s’est vraiment dégradée après les attentats de 2003 à Casablanca. Malgré les beaux discours sur le nouveau Maroc démocratique et moderne, la réalité est toute différente. Il n’y a pas d’élections libres, transparentes et démocratiques qui permettraient au peuple marocain de jouir du droit à l’autodétermination stipulé dans la déclaration des Droits de l’homme. Le Maroc n’est pas un État de droit, la justice y est instrumentalisée par l’État. »

L’AMDH et le Mouvement du 20 février

« Comme le Mouvement du 20 février, nous revendiquons depuis longtemps une Constitution démocratique. Ce qui implique la séparation des pouvoirs (aujourd’hui, le roi détient tous les pouvoirs), l'égalité entre femmes et hommes, la constitutionnalisation de la langue amazigh (berbère)2. Nous partageons aussi les autres revendications du mouvement : la lutte contre la corruption et la déliquescence de l’économie, contre les inégalités, le chômage, la cherté de la vie, l’accès aux services sociaux, éducatifs, médicaux. Nous voulons l’application de la Déclaration universelle des Droits de l’homme et sa primauté sur le droit national. La Constitution évoque cette primauté mais la vide de tout contenu en stipulant que les conventions internationales des Droits de l’homme prévalent sur les lois nationales tant qu’elles n’empiètent pas sur la Constitution et les constantes nationales. Ce qui permet de contourner l’application de ces droits. »

La réforme constitutionnelle proposée par le roi

« Le roi Mohamed VI, arrivé au pouvoir en 1999, a toujours refusé de changer la Constitution. S’il y a consenti aujourd’hui, c’est sous la pression populaire. C’était une des revendications du Mouvement du 20 Février. Mais attention, la réforme qui a été imposée est loin de répondre à la demande d’une constitution démocratique.

On trouve néanmoins quelques points positifs dans cette nouvelle Constitution : les droits et libertés y sont pour la première fois mentionnés. Mais, malheureusement, on n’y retrouve aucune garantie d’application. Les juges peuvent dorénavant s’organiser de manière autonome. Mais, le jour où ils ont voulu créer leur propre organisation, on leur a interdit l’accès à la salle, malgré que toutes les démarches juridiques aient été accomplies.

De nouveaux pouvoirs ont été attribués au roi, tels que la présidence du Conseil de sécurité et du Conseil suprême scientifique (conseil des Ulémas : pouvoir religieux avec un pouvoir législatif à travers les fatwas).

L’AMDH n’a jamais été invitée à un débat à la radio ou la télévision, bien que nous ayons écrit au Premier ministre pour protester contre le fait que l’AMDH n’est pas programmée dans les débats médiatisés concernant la Constitution.

Nous avons publié notre rapport sur les violations observées par nos sections lors du référendum. On l’a présenté lors d’une conférence de presse le 12 juillet. Un réseau d’associations (plus de 20) a aussi opéré l’observation du vote, et est arrivé à des conclusions similaires à celles de l’AMDH.

Enfin, le résultat du référendum ne semble pas crédible à beaucoup de Marocains : 98 % auraient voté « oui », avec un taux de participation de 72,65 %... »

Les forces politiques du Mouvement du 20 février

« Le mouvement est porté par les jeunes, qui apportent ainsi un démenti ferme à ceux qui prétendaient que les jeunes ne s’intéressent pas à la politique. Au début, ce sont les ONG des droits humains qui ont soutenu le mouvement, puis le mouvement amazigh (berbère), et les partis de gauche non présents au gouvernement. Par la suite, il y a eu aussi les islamistes qui ne sont pas au Parlement.

Pendant les années 70, le pouvoir utilisait les islamistes contre la gauche. Puis, cela a été l’inverse. Maintenant, ces deux tendances se retrouvent dans la rue ensemble, ce qui fait peur au pouvoir.

Maintenant que les manœuvres du pouvoir pour arrêter le mouvement par des moyens politiques (la réforme constitutionnelle) ou la répression ont échoué, il fait tout pour faire éclater le mouvement.

Mais il tient bon. Et il s’est poursuivi après le référendum du 1er juillet. D’ailleurs, les manifestations du 3 juillet ont été une des grandes mobilisations du Mouvement du 20 février. C’était une réponse claire au chiffre de 98 % annoncé par le ministère de l’Intérieur. »


Pour plus d'infos, surfez sur www.mamfakinch.com

1. C’est dans ce centre que le Belge Ali Aaraas serait détenu et torturé. Voir www.ptb.be/weekblad/artikel/carte-blanche-tout-faire-pour-sauver-le-ressortissant-belge-ali-aarrass.html • 2. Jusqu’à présent, seul l’Arabe est la langue officielle alors qu’une grande partie de la population est berbérophone.

Le rôle de l’Europe

« Vous avez un rôle immense. Lorsque nous voyons les manifestations devant l’ambassade, cela nous fait énormément plaisir : l’État marocain est très sensible aux critiques européennes. L’immigration a toujours joué un rôle important, par son nombre et son poids économique. De plus, les possibilités de créer des réseaux sont plus grandes en Europe, avec des ONG, des partis, etc...
Tout le monde sait que les États européens ont des intérêts dans les pays d’Afrique du Nord, qu’ils ont peur de perdre par l’instauration d’une vraie démocratie.
Les gens du sud de la Méditerranée n’acceptent plus d’être traités comme des peuples de seconde zone, ni de la part des régimes de leurs pays ni de la part de l’Europe. Les gouvernements européens tournent le dos au principe d’universalité des droits dès que cela concerne les peuples d’Afrique.
Il faut tout faire pour bloquer le soutien politique inconditionnel de l’Europe envers le Maroc. Démentir ceux qui affirment que “le Maroc a opéré sa transition démocratique”, ou encore “le Maroc c’est déjà mieux que d’autres pays voisins”… »
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/maroc-le-pouvoir-du-roi-conteste.html

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