Par Lucie Delaporte, Bakchich, 8/1/2010
L’instituteur Alain Refalo signataire d’une lettre à son inspecteur académique qui a lancé le mouvement des désobéissseurs dans l’école primaire revient dans un livre à paraître sur son combat. Et ce qu’il lui a coûté.
Prendre la plume lui a déjà coûté cher. Qu’importe, Alain Refalo, à l’origine du mouvement des professeurs des écoles « désobéisseurs » du primaire récidive en racontant dans un livre les raisons de son combat contre ce qu’il appelle « la déconstruction de l’école publique ».
En novembre 2008, la lettre qu’il adresse à son inspecteur d’académie où il explique que la réforme de Xavier Darcos alors ministre de l’éducation se ferait sans lui, a cristallisé la contestation des instituteurs et déclenché un vaste mouvement de « résistance pédagogique » chez ses pairs.
Alors qu’une partie des enseignants de l’école primaires est toujours vent debout contre les dernières réformes (comme en témoigne l’importante participation à la dernière journée de grève de novembre), son livre En conscience, je refuse d’obéir à paraître le 14 janvier apporte les clés d’un mouvement parfois difficile à cerner.
Incohérences
Pourquoi s’opposer aux heures de soutien aux élèves en difficultés ? Pourquoi refuser l’allègement des programmes alors que tout le monde ne cesse de se plaindre de leur lourdeur ? En re-contextualisant ces questions, Alain Refalo rappelle des éléments indispensables au débat.
En toile de fond se dessine une profonde inquiétude sur la pérennité même de l’école maternelle - alors que le ministre d’alors déplore que des Bac+5 soient employés à « changer des couches » et que les vertus des jardins d’éveil - payants – sont parallèlement louées par le gouvernement.
La semaine de 4 jours qui aboutit à des journées un peu plus surchargées pour les élèves, mise en place uniquement pour convenir aux adultes, parents et enseignants, est aussi la cible de ses critiques. D’autant que pour les élèves en difficulté les heures de soutien viennent encore allonger ces journées interminables.
Pour Alain Refalo, une autre façon de concevoir l’école est possible, à rebours de l’idéologie dominante sur les bienfaits de l’évaluation permanente et de la compétition entre établissements – la réforme prévoit ainsi la publication des résultats par classe et par école en CM2.
Pour avoir écrit - et chose plus grave rendu publics - ses états d’âme et reconnu que comme beaucoup d’enseignants il prendrait quelques libertés avec le dispositif, cet instituteur a payé cher. Visites d’inspection à répétition, convocations et bien sûr sanctions financières – 2 jours de salaire par semaine - Refalo n’hésite pas à parler de harcèlement.
Convoqué en juillet en commission disciplinaire, il lui est reproché un « refus d’obéissance, manquement à l’obligation de réserve, incitation à la désobéissance collective et attaque publique contre un fonctionnaire de l’Education nationale » - son inspecteur avec qui les rapports s’enveniment.
Au final, après neuf heures d’audition – et pourquoi pas une garde à vue ? – le trublion écope d’une rétrogradation en plus des retenues sur salaire.
Tout cela officiellement pour avoir mis en place un atelier théâtre sur ces heures théoriquement dévolues au soutien individuel. Un récit édifiant.
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