Cher, très cher Sahara
Par Fahd Iraqi, Tel Quel n°368, 27 Avril 2009
1200 milliards de dirhams dépensés depuis le début du conflit, 3% de PIB perdu chaque année… Grands agrégats et petits détails du coût économique d’une cause sacrée. Pour faciliter la lecture du dossier, les chiffres, qui correspondent tous à des estimations d’experts marocains et internationaux, ont été convertis sur la base moyenne de “un dollar = dix dirhams”Depuis novembre 1975, date du déclenchement de la Marche Verte, le Sahara est le sujet tabou par excellence.
Jusqu’au début des années 1980, il était dangereux de prononcer ou d’écrire le mot Polisario, sans y adjoindre le vocable “mercenaires”, ou “ennemis de l’intégrité territoriale”. Les choses ont heureusement évolué depuis, mais le Sahara reste toujours ce sujet tabou, un peu secret, difficile d’accès. Le but de ce dossier n’est pas de briser le consensus politique autour de la marocanité du Sahara, mais simplement d’expliquer le coût du Sahara, en dirhams et en occasions perdues (la priorisation de l’effort de guerre aux dépens du développement des secteurs vitaux du pays, le coût du non-Maghreb, etc.). Pour mieux mesurer les efforts fournis pour récupérer notre très cher Sahara. Et le garder. Novembre 1975. Une femme donne les dernières consignes à son époux, qui vient de s’inscrire sur la liste des participants à la Marche Verte. “Et surtout fais attention ! Je veux que notre maison au sud fasse le coin et qu’elle soit bien ensoleillée”. L’anecdote est assez révélatrice sur les motivations profondes qui ont amené une partie des 350 000 Marocains à répondre à l’appel de Hassan II. Des motivations qui, de toute évidence, ne se limitent pas au seul volet patriotique. “Les participants étaient sans aucun doute volontaires. Mais beaucoup étaient surtout intéressés par le bénéfice matériel qu’ils espéraient tirer de la reconquête du Sahara. D’ailleurs, les gens pleuraient quand ils n’étaient pas acceptés sur la liste des marcheurs et accusaient les autorités de se livrer à un trafic des places”, nous raconte Fouad Abdelmoumni, militant associatif, lycéen à l’époque de la Marche Verte. Armés d’un exemplaire du Coran, de drapeaux nationaux et d’une série de photos du roi, les marcheurs reviendront néanmoins bredouilles. C’est que la randonnée dans les territoires sahariens n’a duré que quelques kilomètres. Et la reconquête du Sahara, coup de génie hassanien, répondait avant tout à un objectif politique : pacifier une fois pour toutes l’opposition de gauche et profiter des hésitations de l’Espagne franquiste. Les rêves de richesse étaient simplement remis pour plus tard.
Par Fahd Iraqi, Tel Quel n°368, 27 Avril 2009
1200 milliards de dirhams dépensés depuis le début du conflit, 3% de PIB perdu chaque année… Grands agrégats et petits détails du coût économique d’une cause sacrée. Pour faciliter la lecture du dossier, les chiffres, qui correspondent tous à des estimations d’experts marocains et internationaux, ont été convertis sur la base moyenne de “un dollar = dix dirhams”Depuis novembre 1975, date du déclenchement de la Marche Verte, le Sahara est le sujet tabou par excellence.
Jusqu’au début des années 1980, il était dangereux de prononcer ou d’écrire le mot Polisario, sans y adjoindre le vocable “mercenaires”, ou “ennemis de l’intégrité territoriale”. Les choses ont heureusement évolué depuis, mais le Sahara reste toujours ce sujet tabou, un peu secret, difficile d’accès. Le but de ce dossier n’est pas de briser le consensus politique autour de la marocanité du Sahara, mais simplement d’expliquer le coût du Sahara, en dirhams et en occasions perdues (la priorisation de l’effort de guerre aux dépens du développement des secteurs vitaux du pays, le coût du non-Maghreb, etc.). Pour mieux mesurer les efforts fournis pour récupérer notre très cher Sahara. Et le garder. Novembre 1975. Une femme donne les dernières consignes à son époux, qui vient de s’inscrire sur la liste des participants à la Marche Verte. “Et surtout fais attention ! Je veux que notre maison au sud fasse le coin et qu’elle soit bien ensoleillée”. L’anecdote est assez révélatrice sur les motivations profondes qui ont amené une partie des 350 000 Marocains à répondre à l’appel de Hassan II. Des motivations qui, de toute évidence, ne se limitent pas au seul volet patriotique. “Les participants étaient sans aucun doute volontaires. Mais beaucoup étaient surtout intéressés par le bénéfice matériel qu’ils espéraient tirer de la reconquête du Sahara. D’ailleurs, les gens pleuraient quand ils n’étaient pas acceptés sur la liste des marcheurs et accusaient les autorités de se livrer à un trafic des places”, nous raconte Fouad Abdelmoumni, militant associatif, lycéen à l’époque de la Marche Verte. Armés d’un exemplaire du Coran, de drapeaux nationaux et d’une série de photos du roi, les marcheurs reviendront néanmoins bredouilles. C’est que la randonnée dans les territoires sahariens n’a duré que quelques kilomètres. Et la reconquête du Sahara, coup de génie hassanien, répondait avant tout à un objectif politique : pacifier une fois pour toutes l’opposition de gauche et profiter des hésitations de l’Espagne franquiste. Les rêves de richesse étaient simplement remis pour plus tard.
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