ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la
torture) et Western Sahara Ressources Watch
(WSRW)
Communiqué de
presse
Pour publication immédiate
Une occupation « verte »
est avant tout une
occupation
La COP 22 s’ouvre aujourd’hui à Marrakech. Selon l’ACAT et
Western Sahara Ressources Watch (WSRW), les déclarations du roi Mohammed VI pour
faire la promotion de projets écologiques au Sahara occidental ne doivent pas
faire oublier les violations du droit international commises sur ce territoire
et l’exploitation illégale des ressources naturelles par le Maroc dont sont
victimes les Sahraouis, parfois avec la complicité d’entreprises
internationales.
La nouvelle édition de la Conférence des Etats parties à
la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)
est une occasion majeure pour le royaume de promouvoir son image de bon élève en
matière de développement durable. Un développement terni par les violations
graves du droit international sur lesquelles il repose.
Il y a un an, lors de son discours devant ses pairs réunis
pour la COP21, Mohammed VI présentait le Maroc comme « l’un des acteurs
majeurs de la transition énergétique dans le monde », justifiant ainsi que
son pays ait été choisi pour accueillir la COP22. Les projets du royaume
chérifien en matière d’énergie renouvelable seraient louables s’ils ne
s’ancraient pas dans une illégalité flagrante.
En effet, une part importante des parcs éoliens mis en
place ces dernières années sont implantés frauduleusement hors du territoire
marocain, dans ce qu’il est coutume d’appeler la dernière colonie d’Afrique : le
Sahara occidental [1]. Une exploitation [2] lucrative des ressources
énergétiques à laquelle les Sahraouis s’opposent et dont ils ne tirent guère de
profit.
Un des piliers et moteurs de l’occupation est
l’exploitation des ressources du territoire sahraoui, ressources halieutiques,
agricoles, fossiles, minérales, énergies éolienne et solaire… Le Sahara
occidental regorge de richesses que le royaume chérifien, puissance occupante,
spolie illégalement au vu et au su de tous.
L’illégalité fondamentale de cette exploitation réside
dans le fait que le Maroc n’a tout simplement pas le droit d’être présent,
d’agir, de passer des accords sur le territoire du Sahara occidental sans que
les Sahraouis n’y consentent et que cette exploitation ne se fasse à leur
profit. Cela vient d’être rappelé par le Comité des droits de l’homme des
Nations unies qui a exigé que le Maroc recueille le « consentement préalable,
libre et éclairé [du peuple sahraoui] pour la réalisation de projets de
développement et d’opérations extractives » [3].
Selon Hélène Legeay, responsable des programmes Maghreb à
l’ACAT, « alors que l’exploitation des ressources du Sahara occidental par
le Maroc est de plus en plus critiquée, tant par les Nations unies que par les
partenaires économiques du Maroc, ce dernier tente de profiter de la COP22 pour
« écoblanchir » son occupation du Sahara occidental à travers la promotion des
projets écologiques menés dans les territoires
occupés. »
« Le roi nous alerte sur le fait que « la crise
climatique est l’ultime injustice qui frappe les plus vulnérables, mais les
violations du droit international dont sont victimes quotidiennement les
Sahraouis sont aussi des injustices flagrantes d’autant plus condamnables
qu’elles s’effectuent grâce à la complicité active d’entreprises internationales
qui participent au pillage des ressources, avec le soutien de leurs Etats, amis
du Maroc. »
L’ACAT et WSRW rappellent aux États qui participent à la
COP22 que l’Accord de Paris lie intimement la lutte contre les changements
climatiques avec le respect des droits fondamentaux parmi lesquels les droits
des peuples autochtones.
Les signataires de l’Accord de Paris doivent garder en
tête le fait qu’un développement, aussi écologique qu’il soit, n’est ni propre
ni durable dès lors qu’il piétine les droits fondamentaux rappelés par l’Accord
de Paris.
Un exemple : l’exploitation des phosphates au
Sahara occidental
Au Sahara occidental, l’exploitation des énergies
renouvelables bénéficie davantage au gouvernement et aux colons marocains qu’au
peuple sahraoui. Pour ne citer qu’un exemple, l’essentiel de l’énergie produite
par le parc éolien de Foum el-Oued, situé en territoire occupé, alimente
l’Office chérifien des phosphates, une entreprise qui se livre depuis des
décennies au pillage du phosphate, sans que le peuple sahraoui n’ait jamais
consenti ni à l’exploitation de son phosphate ni à celle de son énergie éolienne
[4]. La majorité des emplois au sein de l’OCP sont occupés par des Marocains et
les revenus de la vente du phosphate à l’étranger bénéficient essentiellement au
Maroc [5]. Il en va d’ailleurs de même de l’exploitation des autres ressources,
notamment agricoles, ce qui a poussé le Tribunal de l’Union européenne à annuler
en partie l’accord de libéralisation conclu entre l’Union européenne et le Maroc
en matière de produits agricoles et de la pêche au motif qu’il ne pouvait pas
s’appliquer au territoire occupé.
Contact presse :
•
ACAT : Pierre Motin, 01 40 40 40 24 / 06 12 12 63 94 pierre.motin@acatfrance.fr
•
WSRW : Eric Hagen, erik@wsrw.org
Notes aux rédactions :
•
[1] Le Sahara occidental est considéré par l’ONU depuis 1963 comme
un territoire non autonome qui, en tant que tel, a droit à l’autodétermination.
Depuis plus de 40 ans, les Nations unies, à travers notamment de nombreuses
résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, réclament
l’organisation d’un référendum d’autodétermination qui permettrait aux Sahraouis
de décider ou non de devenir un État indépendant. Cette perspective qui
constitue pourtant un des droits fondamentaux garantis par la Charte de l’ONU et
par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques s’éloigne
chaque jour davantage, tandis que l’occupation marocaine s’intensifie. Depuis
1975, le Maroc occupe 80% du territoire sahraoui qu’il a massivement colonisé de
sorte à compromettre tout processus d’autodétermination.
•
[2] La Charte des Nations unies, le Pacte international relatif au
droit civils et politiques, les résolutions de l’Assemblée générale des Nations
unies sur les investissements économiques réalisés dans les territoires
autonomes exigent que l’exploitation des ressources se fasse avec le
consentement et au bénéfice des autochtones du territoire occupé. L’article 73
de la Charte de l’ONU dispose que « les Membres des Nations Unies qui ont ou qui
assument la responsabilité d'administrer des territoires dont les populations ne
s'administrent pas encore complètement elles-mêmes reconnaissent le principe de
la primauté des intérêts des habitants de ces territoires. Ils acceptent comme
une mission sacrée l'obligation de favoriser dans toute la mesure possible leur
prospérité… » http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/60/111
•
[3] Comité des droits de l’homme, Observations finales concernant
le sixième rapport périodique du Maroc, 2 novembre 2016, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CCPR%2fC%2fMAR%2fCO%2f6&Lang=en
• [4] WSRW, Electrifier le pillage, 2016, http://wsrw.org/files/dated/2016-11-02/poweringplunder_fr_web.pdf
• [5] WSRW, Observations and topics to be included in the
list of issues, On the occasion of Morocco’s
2015 periodic report on the implementation of the International Covenant on
Civil and Political Rights http://tbinternet.ohchr.org/Treaties/CCPR/Shared%20Documents/MAR/INT_CCPR_ICO_MAR_22691_E.pdf
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