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vendredi 24 avril 2015

Les brèves d’instruction du juge Ramaël

par Emmanuel FANSTEN, Libération,
Ce livre est né d’une indignation. Lors de l’audience de rentrée de la Cour de cassation, en mai 2010, Nicolas Sarkozy annonce son intention de supprimer la fonction de juge d’instruction, comparant les magistrats à des «petits pois». Aussi anecdotique soit-elle, l’expression signe la brutale reprise en main de la magistrature durant le précédent quinquennat, relayée par certains procureurs zélés. Traumatisé par Clearstream, Sarkozy veut en finir avec ce juge d’instruction jugé trop indépendant. Ayant occupé ce poste pendant près de vingt ans, Patrick Ramaël décide ce jour-là de tenir la chronique d’une mort annoncée. L’ouvrage tiré de ses réflexions apparaît comme un plaidoyer pour la fonction qui reste, malgré ses défauts, le meilleur contrepoids au pouvoir démesuré du parquet, et qui a survécu aux assauts sarkozystes.
Hors procédure est aussi une plongée dans le quotidien d’un juge qui a instruit des centaines d’affaires, avec un fort tropisme pour l’Afrique. Il a notamment enquêté sur l’assassinat de Jean Hélène et la disparition de Guy-André Kieffer, côtoyant cette Françafrique où, dans le sillage des réseaux Foccart, s’activent «des affairistes de plus ou moins grand talent».
A la lecture, une affaire laisse un goût amer : l’enlèvement de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka, le 29 octobre 1965, à Paris. «Une personnalité extraordinaire qui aurait pu changer le destin de son pays», raconte le juge, désigné en 2004 pour reprendre l’instruction ouverte trente ans plus tôt. L’opération à laquelle ont pris part les services secrets marocains et des policiers français continue à faire tache un demi-siècle plus tard.
Ramaël reprend l’enquête depuis le départ, mais se heurte au secret défense et à l’obstruction des autorités marocaines. Une situation ubuesque : le principal suspect de l’enlèvement, condamné à Paris par contumace en 1967, habite aujourd’hui une villa chic de Rabat située… avenue Ben-Barka. En 2007, face à l’inertie des autorités, le juge profite du premier voyage d’Etat de Nicolas Sarkozy au Maroc pour relancer les mandats d’arrêt contre les suspects encore vivants. Cette initiative - qui provoquera un incident diplomatique - lui vaudra des poursuites disciplinaires et une haine tenace de l’ancien président. Aucun des suspects ne sera finalement entendu. Cinquante ans après l’enlèvement de Ben Barka, l’instruction est toujours ouverte.

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