Les intellos de service qui ont rédigé (vraiment ?!) la Constitution ne cessent de convaincre le monde de l’avancée imparable de la démocratie et de l’Etat de Droit. Que « le Maroc est une exception » et va surprendre le monde entier. D’aucuns parlaient déjà de la Constitution la plus avancée qui va même jusqu’à laisser loin derrière elle les pays du Nord (sic)…
En effet, les obséquieux rédacteurs, qui crient à haute voix qu’il faut lire la Constitution pour la juger, savent très bien qu’il est fort aisé de berner les Occidentaux dès les premières lignes.
Car dès le Préambule, les chancelleries occidentales ont déjà déposé le feuillet et diffusé la bonne nouvelle à la Une de leur presse. C’est que tout y est : « État de droit démocratique » ; « État moderne, ayant pour fondement les principes de participation, de pluralisme et de bonne gouvernance » ; « société solidaire où tous jouissent de la sécurité, de l’égalité des chances, du respect de leur dignité et de la justice sociale… ». Que l’Etat « s’engage à souscrire aux principes, droit et obligations énoncés dans leurs chartes et conventions respectives » ; et qu’il « réaffirme son attachement aux droits de l’Homme ».
Le lecteur qui tourne la page pour aller loin vers « Article premier », trouve qu’on parle de « monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale ». L’Article premier évoque « la séparation, l’équilibre et la collaboration des pouvoirs », va jusqu’à parler de « la démocratie participative », des « principes de bonne gouvernance », ainsi que de la « responsabilité et de la reddition du comptes ».
A partir de ces valeurs hautement graphiques et sans l’odeur d’un minimum d’exercice sur le terrain, l’élite inculte de l’Etat marocain, s’est précipitée aux portes de l’Europe pour vendre leur marchandise et donner le gage d’une stabilité sans précédent.
Mais les observateurs avertis ne sont pas dupes. Dans les constitutions précédentes, on retrouve le même verbiage le long d’une constante qui va de 1962, 1996 jusqu’en 2011 : (« monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale» ; « Nul ne peut être arrêté, détenu et puni que dans les cas et les formes prévus par la loi. Le domicile est inviolable » ; « Les perquisitions ou vérifications ne peuvent intervenir que dans les conditions et les formes prévues par la loi »…). Pourtant, les années de plomb ont révélé qu’avec toutes les valeurs démocratiques inscrites sur papier, le Maroc reste l’un des pays les plus totalitaires et le plus absolutiste ! L’Histoire atteste de la répression monstrueuse contre les citoyens, en 1965, 1981… et d’une manière invariante on enregistre les arrestations, la torture, les disparitions, les assassinats… et ces prisons-mouroirs de Tazmamart, Agdz, Qal’at Mgouna… !
La Constitution de 2011 est une vitrine, fonctionnant exactement comme l’IER (Instance d’Equité et de Réconciliation) où les victimes de la répression ont témoigné sans que les bourreaux ne soient désignés ni inquiétés. Bien au contraire, ils continuent de trôner aux sommets des institutions, à nouer et dénouer les cartes et les ficelles. La Constitution cosmétique concoctée en un temps record, célèbre l’Impunité et la corruption à grande échelle, en tant que valeurs suprêmes du régime. D’autant plus que le « Titre III » de la Constitution, traitant « De la royauté », est fatalement négateur des valeurs inscrites sur papier. Puisque le roi monopolise tous les leviers du pouvoir, et n’a manifesté aucun effort pour répondre aux revendications légitimes de la rue occupée aujourd’hui par une jeunesse débordante de vie et de maturité, formidablement consciente de son rôle historique pour le changement.
Remarques et florilège du bêtisier de la Constitution :
La Constitution de 1962 a ignoré de noter, avec des majuscules, les indicateurs personnels (lui, il, son..) inhérents au roi. C’est la Constitution de 1996 qui va inaugurer ce mode pour célébrer le monarque de droit divin (Il ; Lui, Son). Mais il arrive curieusement aux constitutionalistes de perdre les pédales et le fil de la majuscule. C’est ainsi que dans leur aveuglement ou dans leur obséquiosité dévoreuse, ni le chef de la commission, l’obéissant Abdellatif Mannouni, ni le prétentieux Mohamed Tozy, ni le tartufe Driss El Yazami, pour ne citer que ces trois-là, n’ont vu leur manquement gravissime au culte de la personnalité ! Car tous les « lui » et les « il » qui sont imposés avec un grand « Lui - Il », vont s’effilocher au fil du texte, dans un certain nombre de passages : « … auprès du Roi jusqu’au jour où il (avec un petit ‘i’) aura atteint l’âge de vingt ans (art. 44) » ; « …par la présente Constitution et qu’il (avec un petit ‘i’) exerce par dahir (art. 42) ». Quant au « Lui » majestueux, on le trouvera dans ce passage, transformé en un petit « lui » : « Le Roi remplit ses missions au moyen de pouvoir qui lui (avec un petit ‘l’) sont expressément dévolus… ».
Mais le plus patent de l’adoration du culte de la personnalité de cette élite va se trouver dans l’Article 43, où l’on trouve le possessif « son » écrit en majuscule. Alors qu’il n’a jamais été écrit ainsi dans la Constitution de 1996 qui porte le même article et les mêmes mots !! Dans ce passage : « … à moins que le Roi ne désigne, de Son vivant,… autre que Son fils aîné… ».
Et sans nous attarder sur le sens de l’injonction et de la menace sémantique que provoque la majuscule suprême dans ce passage : « Le Roi peut, à Son initiative, et après consultation du Chef du Gouvernement, mettre fin aux fonctions d’un ou de plusieurs membres du gouvernement. », nous pouvons dire que la sacralité du roi - inviolable et sacré - (le mot "sacré" a été supprimé) s'est infiltrée dans les lettres majuscules... et donc, on ne peut nous reprocher de ne pas avoir lu la Constitution de 2011. Car à la lumière de ce qui précède, aucun changement ne se profile à l’horizon et les élections prochaines ne profiteront qu’aux opportunistes habituels qui croient appuyer le régime des prestiges, de la corruption et de l’impunité…
Les revendications têtues provenant de la légitimité de la rue ne laisseront jamais faire !
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