Le 05 Aout 2011, la Coordination de soutien au mouvement du 20 février à Bruxelles a organisé une activité sur « lemouvement du 20 février : réalités et perspectives » ; j’ai été invité dans ce cadre à faire un exposé sur ce thème via internet. J’ai préparé à cette occasion un texte que je n’ai pu exposer qu’en partie à cause du temps imparti. On trouvera ci-dessous l’intégralité du texte légèrement retouché.
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I) Merci pour l’invitation à participer à ce débat très important, qui à mon avis doit être ouvert partout, non seulement au Maroc, mais également par nos citoyenNEs résidant à l’étranger et plus particulièrement en Europe.
Tout d’abord je me félicite, avec vous, de l’impact combien positif du mouvement du 20 février (M20F) sur nos concitoyenNes dans les pays occidentaux : vos activités et vos manifestations à Bruxelles, à Paris, à Madrid, à Barcelone, en Hollande, en Italie, en Allemagne, aux USA, au Canada et ailleurs nous réchauffent le Cœur.
L’une des conséquences heureuses du M20F c’est qu’il a permis de rassembler nos militantEs démocrates et plus généralement nos militantEs anti-makhzen dans un même combat pour instaurer un régime démocratique au Maroc. C’est pour nous une renaissance salutaire du mouvement démocratique marocain à l’étranger qui a joué, rappelons-le, un rôle essentiel dans le combat contre le despotisme hassanien des années de plomb.
Votre action à l’étranger, et notamment à Bruxelles capitale de l’Union Européenne, nous réconforte, surtout quand elle est conjuguée avec celle des démocrates des pays d’accueil ; nous sommes alors assurés que notre voix sera entendue en Europe ; ceci est d’autant plus important que les gouvernements des pays occidentaux continuent – pour des raisons d’intérêt économique doublées d’analyses de courte vue – à avoir une attitude partiale et à appuyer le pouvoir despotique marocain au dépens des démocrates, de la démocratie et de la liberté au Maroc. Alors les amis, en avant, continuez votre travail, je pense qu’avec le M20F nous sommes cette fois sur la bonne voie, celle menant à la liberté, l’égalité, la solidarité, la démocratie et la justice sociale, celle menant au développement économique, social et culturel et à la dignité – bafouée durant des siècles – pour notre peuple.
II) Quelle explication pour l’émergence du M20F.
Je pense que ce mouvement trouve son explication :
- D’abord dans les contradictions internes de la société marocaine ; depuis des siècles, le peuple marocain n’a cessé de mener un combat historique contre le Makhzen, véritable obstacle à tout progrès politique, économique, social et culturel ; cette lutte est devenue plus aigue depuis la fin du protectorat.
Le Souvenir des années de plomb, et des violations graves qui les ont caractérisées et qui restent gravées à jamais dans la mémoire populaire, est là pour nous rappeler cette lutte acharnée entre Makhzen et démocrates d’où malheureusement il est sorti vainqueur, momentanément bien sûr, puisque nous le savons, nous militants, que les peuples finissent par vaincre et avoir le dernier mot.
- Ensuite dans l’impact sur notre pays, et sur nos jeunes en particulier, du « Printemps arabe » et surtout des révolutions tunisiennes et égyptiennes qui ont eu un grand écho, puis un énorme impact d’autant plus que nous les avons suivies au jour le jour à travers notre solidarité et notre soutien militant organisé : ce fut d’abord le Réseau Marocain de soutien aux démocrates tunisiens (créé en octobre 2005 et réactivé en décembre 2010 suite à l’immolation du jeune Bouazizi) qui a été développé en Réseau Démocratique marocain de solidarité avec les peuples dont le 1er objectif était la solidarité avec le peuple, égyptien mais dont le rôle permanent est la solidarité avec les peuples, tous les peuples dans leur combat contre l’impérialisme, le sionisme et les réactionnaires ennemis de la démocratie et des droits humains.
C’est la conjonction de ces deux facteurs, interne et externe, qui ont permis l’émergence du mouvement du 20 février (M20F), d’abord sur la toile internet avec les discussions lancées par les jeunes de projets de revendications, de programmes et de moyens d’action ; la date de la première grande manifestation nationale a été fixée d’abord au 27 février puis avancée au 20 février, pour contrecarrer les critiques malveillantes du pouvoir traitant les jeunes qui ont lancé l’initiative d’agents du Polisario du fait que la 1ère date choisie, le 27 février, coïncidait par hasard avec l’anniversaire de la proclamation en 1976 de la RASD.
III) Le mouvement du 20 février en marche
Deux dates importantes à retenir avant le 20 février :
- Le 12 février, une grande manifestation a été organisée à Rabat devant le parlement par le Réseau démocratique Marocain de solidarité avec les peuples pour fêter cette première victoire du peuple égyptien, qu’est la chute le 11 février du Dictateur H.Moubarak, auquel d’ailleurs nous souhaitons un procès juste, qui devrait si justice il y a, être incarcéré pour le restant de sa vie.
Le plus important dans cet évènement c’est la transformation, d’ailleurs organisée, du sit-in en forum de débat auquel ont participé trois à quatre cents personnes avec pour thème : que faire au Maroc ? Après quelques 3 heures de débat la décision était unanime : descendre dans la rue et marcher ensemble et partout au Maroc, le 20 février.
- Le 17 février, une conférence de presse a été organisée par le mouvement marocain des droits humains au siège de l’AMDH, pour appuyer le M20F avec la participation de représentants des jeunes du 20 février et également du coordinateur du réseau démocratique marocain de solidarité avec les peuples qui jouait provisoirement le rôle de coordination nationale d’appui au M20F.
Durant cette conférence, les jeunes du 20 février sont descendus pour la 1ère fois du virtuel pour mettre pied sur terre ; on découvrait alors certains de leurs visages et surtout leur plateforme d’action datant du 14 février qu’ils ont présentée avec fougue et rigueur aux journalistes très nombreux eu cette journée du 17 février ; cette plateforme a été reprise par la presse ; elle a été également publiée en Arabe et en Français par le mensuel de l’AMDH, Attadamoune, paru fin février.
Le Mouvement du 20 février, avant son passage à l’action, a été farouchement combattu par le pouvoir Makhzenien et les forces réactionnaires qui le soutiennent et qui n’ont pas hésité à qualifier les jeunes du M20F d’agents du Polisario et de l’Algérie, de mécréants, d’athés, de mangeurs de Ramadan, d’homosexuels etc.… On a eu recours à la désinformation pour déstabiliser le mouvement, puisqu’ils sont arrivés jusqu’à annoncer le 19 février à la télévision gouvernementale que les manifestations du 20 février ont été annulées par le M20F lui-même.
Malgré cela les manifestations du 20 février ont connu un énorme succès :
- Quelques 60 villes ont connu des marches ou d’autres types de manifestations ; quelques 300.000 personnes sont descendues dans la rue.
Beaucoup d’hésitants y compris des membres influents de partis gouvernementaux étaient là, à défiler avec les jeunes !!
- Les manifestations se sont déroulées généralement de manière pacifique même si le pouvoir n’a pas manqué de gâcher la fête : quelques fins de manifestation (notamment à AL Hoceima, Sefrou, Larache) se sont terminées par l’usage de la violence, des violences d’origine douteuse qui se sont soldées par la mort de cinq jeunes incendiés dans une banque d’Al Hoceima et par le tabassage à mort du jeune Kamal Chaib à Sefrou.
Deux réunions successives du Réseau Démocratique Marocain de Solidarité avec les peuples, le 20 et 23 février au siège de l’AMDH, ont permis de constituer le Conseil National d’Appui au Mouvement du 20 février (CNAM20) regroupant des dizaines d’organisations politiques, syndicales, des droits humains, des femmes, des jeunes, culturelles et associatives diverses ainsi d’ailleurs que des personnalités ; le CNAM20 a appelé immédiatement à la constitution dans toutes les villes des CLAM20 : Conseils locaux d’appui au mouvement du 20 février.
Ainsi donc le M20F avait dès sa naissance deux ailes pour voler vers la démocratie :
- Le mouvement des jeunes du 20 février qui existe dans la plupart des localités ; c’est un mouvement constitué essentiellement de jeunes, mais souvent ouvert aux militants non jeunes dans plusieurs villes.
- Les Conseils National et locaux d’appui aux mouvements des jeunes du 20 février, mais ayant également pour objectif déclaré de participer aux manifestations décidées par le mouvement des jeunes du 20 février.
Depuis le début, un débat a été et reste ouvert pour trouver la voie vers la coopération organisée puis la fusion des deux ailes dans le cadre du M20F.
- Le 5 mars s’est tenue la 2ème AG du CNAM20 avec la participation de 99 organisations à caractère national. Une grande décision était prise : la 2ème journée nationale militante du M20F aura lieu le 20 Mars.
Le Pouvoir ne pouvait rester inactif devant le succès inattendu pour lui des marches du 20 février, de leur impact médiatique et populaire, devant l’organisation réussie du CNAM20 et surtout devant la détermination du M20F à continuer le combat et redescendre le 20 mars dans la rue ; il fallait faire quelque chose, et ce furent la 1ère réunion, très médiatisée du CES (Conseil Economique et Social), l’embauche de quelques milliers de diplômés enchômagés, la création du Conseil National des Droits de l’Homme (en remplacement du CCDH) la création du médiateur en remplacement de Diwane Al Madalim ; mais ce fut surtout le discours royal du 09 mars annonçant l’amendement de la constitution avec l’annonce des 5 constantes intangibles (que sont la monarchie, la commanderie des croyants, le caractère islamique de l’Etat, l’unité nationale et l’intégrité territoriale et le choix démocratique) et des sept fondements à respecter par le comité de rédaction des amendements présidé par Manouni et constitué de 18 autres personnes toutes désignées, sans consultations préalables, par le Roi.
L’offre royale concernant la constitution était considérée comme inattendue et très avancée par ceux qui ont toujours soutenu le pouvoir, d’où leur enthousiasme affiché, et comme insuffisante, décevante tant sur la forme, que sur le contenu par le M20F qui n’a pas manqué de le faire savoir.
Le 13 mars, et avant même la journée nationale militante programmée pour le 20 mars, des marches ont été organisées dans quelques villes, notamment à Casablanca. Et ce fut la répression farouche et surtout gratuite, qui d’ailleurs a été dénoncée par la presse nationale et également par l’opinion internationale, ce qui a créé les conditions d’un recul du pouvoir et du grand succès des deux journées militantes nationales du 20 mars (avec 100 marches nationales) et du 24 avril (avec 110 marches au niveau national et également des marocains à l’étranger) auxquelles ont participé plus d’un demi-million de manifestantEs chacune.
La lutte sur le terrain est devenue quasiment irréversible. Et ce furent après le 20 février, le 20 mars, et le 24 avril :
- Les grandes manifestations à l’occasion du 1er mai et auxquelles ont participé les militantEs du M20F.
- Les manifestations du 08 mai qui ont eu pour thème la dénonciation de l’acte terroriste du 28 avril à Marrakech au Café Argana, tout en continuant à dénoncer le despotisme et la prévarication (« Al Fassad »).
- Les manifestations quasi hebdomadaires avant le référendum du 1er juillet et après le référendum, et qui continuent jusqu’à maintenant, et qui vont continuer encore malgré les vacances d’été et malgré le Ramadan.
- Parmi les marches à caractère national, six journées militantes nationales ont été organisées par le CNAM20 en se basant sur les décisions des coordinations locales du mouvement des jeunes du 20 février.
Ce furent, outre les 3 journées militantes nationales citées ci-dessus, les journées du 22 mai, du 26 juin et du 17 juillet ; une autre journée nationale militante a été organisée le 05 juin à l’initiative autonome du CNAM20 pour protester contre la répression des marches du 15, 22 et 29 mai.
Notons que le M20F a connu plusieurs moments difficiles et des goulots d’étranglement qui auraient pu freiner ou briser sa marche, mais qu’il a dépassés avec succès. On pourra notamment évoquer :
- La répression directe (le 13 mars, le 15,22 et 29 mai).
-L’instrumentalisation des « baltagias », ces forces auxiliaires non régulières commanditées par les services de police.
- L’attentat terroriste du 28 avril à Marrakech.
- Les mesures à caractère social déjà évoquées et auxquelles on pourra ajouter l’accord du 26 avril suite au dialogue social.
- les deux discours royaux du 9 mars et du 17 juin présentant le projet de constitution amendée et appelant les marocainEs à voter oui pour ce projet.
- le Référendum du 1er juillet, avec les moyens de tout bord et souvent illicites utilisés pour arriver au résultat déclaré de 73.5% de participants et 98.5% de Oui pour le Référendum ; ce résultat analysée objectivement montre en fait que près de 60% de citoyenNEs marocains en âge de voter au Maroc et à l’étranger n’ont pas participé au vote.
En fait le M20F continue, et tous les goulots d’étranglement ont été dépassés, y compris celui du Référendum. Puisque d’une part deux jours après, le dimanche 3 juillet les marches ont continué de plus bel en avançant toujours – à côté de revendications politiques et sociales générales, de la libération des prisonniers politiques, de la vérité et de la justice pour ce qui concerne les martyrs du M20F, des libertés publiques, de la lutte contre l’impunité – celle d’une constitution démocratique de par la méthodologie de son élaboration, son contenu et son adoption ; tout s’est passé pour le M20F comme si les mesures du pouvoir dans le domaine constitutionnel étaient un simple coup d’épée dans l’eau.
IV) Comment caractériser brièvement le M20F ?
C’est d’abord un mouvement démocratique populaire, en ce sens qu’il vise la chute de la domination séculaire du makhzen et l’édification d’un régime démocratique, avec les fondements de l’état de droit, d’une société de dignité et de citoyenneté respectueuse des droits humains pour touTEs.
C’est un mouvement complexe qui a deux composantes, ou comme dit plus haut deux ailes :
- Le mouvement des jeunes du 20 février ; ce sont eux qui ont pris l’initiative d’abord sur le réseau internet puis sur le terrain à partir du 20 février.
- Le mouvement d’appui au mouvement des jeunes du 20 février le CNAM20 (Conseil National) et les CLAM20 (Conseils locaux).
Le CLAM20 a été constitué formellement le 23 février lors d’une 1ère AG ; il a tenu deux autres AG le 05 mars et le 11 juin ; lors de cette dernière AG le CNAM20 a adopté deux documents importants : d’une part une déclaration finale où figuraient notamment les revendications du Conseil national et d’autre part une plateforme appelée « fondements de l’action du CNAM20) ; ces deux documents ont permis de voir plus clair dans l’action du CNAM20.
Rappelons par ailleurs qu’une réunion importante a eu lieu le 17 avril à Rabat entre le comité de suivi du CNAM20 et les représentants des CLAM20 et qui ont permis d’améliorer la communication entre le centre et les régions.
Notons également que dans l’avenir et à partir de la 4ème AG du CNAM20 y seront représentés outres les représentants des organisations nationales membres du CNAM20, ceux des divers CLAM20.
V) Quelles perspectives pour le M20F
Notons tout d’abord qu’il est heureux que le M20F se soit débarrassé d’une certaine tendance au mimétisme des expériences tunisiennes et égyptiennes ; l’expérience de Maydane Attahrir subjuguait nos jeunes qui voulaient la reproduire dès le 1er jour ; ils n’ont pas cessé au départ de vouloir organiser une grande manifestation nationale qui devait se terminer par un grand sit-in continu jusqu’à la satisfaction des revendications du M20F.
Or si nous avons en commun avec toutes les expériences arabes l’objectif de nous débarrasser du despotisme et du « Fassad » (prévarication), chaque pays a sa spécifité quand il s’agit des modes de lutte. Je pense que pour le Maroc nous nous acheminons vers un combat qui – après avoir duré près de 6 mois –pourrait durer encore plusieurs mois avant de donner des résultats qualitatifs.
Il est donc clair qu’on ne peut reproduire l’expérience tunisienne ou égyptienne au Maroc, non seulement parce que chaque pays à son histoire et ses spécifités de lutte, mais également parce que, après l’Egypte il y a eu les expériences sanglantes de Libye, du Yemen, du Bahreïn et de Syrie, et il y a eu les actions impérialistes visant à briser l’élan populaire pour contrôler la marche des mouvements pour le changement et sauvegarder leurs intérêts et ceux de leurs alliés dans la région. Surpris au départ, les dirigeants des pays occidentaux, ont appris à prévoir et à prévenir pour sauvegarder leurs intérêts et ceux de leurs alliés dans la région : Israël et les régimes réactionnaires arabes ; ce qui peut passer par la promotion de changements superficiels sans répercussions négatives sur les intérêts vitaux de l’occident et ses alliés de la région, Israël en tête.
Le mouvement du 20 février est devenu en quelques mois une grande force politique et un véritable levier pour le changement démocratique ; c’est déjà le plus grand mouvement politique qu’à connu notre pays depuis le combat contre le protectorat et pour l’indépendance tant par le nombre de ses partisans, des villes participantes, que par sa durée. C’est aussi un mouvement qui a permis de briser le tabou de la peur et de se réapproprier la rue comme cadre principal du combat politique et social ; de nombreux acquis ont déjà été arrachés par ce jeune mouvement ; mais l’essentiel reste à faire.
L’atteinte des objectifs du M20F est tributaire du respect et du développement de ses fondements et des conditions de succès en tant que mouvement démocratique, de masse et populaire, indépendant, combatif et pacifique, pluriel et unifié :
- Le Caractère démocratique du M20F est reflété par deux aspects :
Premièrement, dans le fonctionnement interne du mouvement où tout le monde doit veiller à l’égale participation de tous, sans hégémonie, ni exclusion. Les décisions doivent continuer à être prises par consensus en respectant la tendance générale ; et si parfois on est obligé de recourir au vote il faut qu’il soit nettement majoritaire ; c’est en tout cas ce qui est décidé par le CNAM20 où le résultat du vote n’est acceptable que s’il y a une majorité dépassant les 80%
Deuxièmement, le caractère démocratique du mouvement signifie que le mouvement a pour objectif d’en finir avec le Makhzen comme régime anti-démocratique et de le remplacer par un régime démocratique qui doit se baser sur une constitution démocratique, revendication de base du M20F et qui reste d’actualité malgré le Référendum du 1er Juillet.
- Le caractère de masse et populaire du M20F devra être renforcé et développé pour aboutir à des résultats qualitatifs, jusqu’à présent, le mouvement a pu être présent dans sa sortie de fin de semaine dans 40 à 110 villes, en mobilisant quelques centaines de milliers de citoyenNEs ; je pense que le M20F devra arriver à mobiliser quelques millions de citoyenNes avec quelques 200 manifestations pour arriver au seuil critique permettant d’arracher les revendications du mouvement.
Pour cela, il va falloir mobiliser plus et mieux les habitants des quartiers populaires, les salariés, qu’ils soient syndiqués (comment impliquer de manière active les centrales syndicales notamment l’UMT et la CDT ?) ou pas, la paysannerie laborieuse, le mouvement estudiantin (n’est-il pas temps que l’UNEM puisse rejouer son rôle actif dans le mouvement populaire ?) les lycéens, les femmes, les enchômagés – toutes catégories comprises – les intellectuels démocrates, le mouvement des droits humains.
- L’indépendance du M20F devra être préservée et consolidée tant vis-à-vis du Makhzen que des composantes du mouvement ; l’indépendance ne veut pas dire neutralité politique ; elle signifie simplement que les décisions, les programmes, les moyens de lutte sont adoptés démocratiquement en prenant en considération la volonté collective de ses membres et non les dictats d’une partie de ses composantes ;
L’indépendance est une question sensible, parce que les ennemis du M20F mettent souvent en exergue tel ou tel aspect de notre action, de nos slogans, de nos comportements pour dénigrer notre mouvement ; nous devons être vigilants sur cette question.
- Le Caractère combatif et pacifique du M20F ; il est évident qu’on ne pourra pas vaincre le Makhzen – avec ses énormes moyens politiques, économiques, et culturels, avec le soutien apporté par l’impérialisme et avec son expérience séculaire dans l’oppression et la répression de tout mouvement populaire aspirant à la démocratie – sans mener un combat acharné multiforme et une combativité croissante.
Toutefois le M20F a opté pour le caractère pacifique de son combat (« Haraka silmya, la hajra, la janwiya » = « mouvement pacifique, ni pierre, ni couteau ») ; d’abord pour éviter toute effusion de sang et d’autre part pour ne donner aucun alibi aux tenants de la manière forte au sein du pouvoir qui veulent en découdre avec le M20F qui menace leurs énormes intérêts acquis à l’ombre du despotisme et du «Fassad ».
- Le caractère pluriel et unitaire du M20F ; notre mouvement est pluriel : il regroupe en pratique des organisations et groupes politiques de la gauche radicale (Voie Démocratique, PADS, PSU, CNI, groupes trotskystes ou marxistes léninistes, étudiants basistes radicaux de tendances diverses, islamistes de Al Adl Wal Ihsane, du parti de la Nation, d’Al Badil Alhadari, des tendances à l’intérieur du PPS et de l’USFP,…) des organisations syndicales ; la grande majorité des organisations des droits humains, des organisations de jeunes, de femmes, des associations diverses et des personnalités démocratiques. Ce caractère pluriel est une richesse pour le M20F car il permet de drainer un large soutien populaire au combat anti-makhzen et pour la démocratie.
Nous avons pu jusqu’à présent sauvegarder l’unité sur le terrain et dans la pratique du M20F. or le pouvoir makhzénien qui n’a lésiné sur aucun moyen pour abattre notre mouvement (par la désinformation médiatique, le dénigrement, la répression directe par les forces de sécurité et indirecte par les baltagis, la récupération des opportunistes, les manœuvres politiques, les concessions à caractère social) axe actuellement ses efforts contre l’unité de notre mouvement ; il cherche directement ou par média ou groupes interposés à diviser notre mouvement et nous affaiblir pour nous écraser par la suite. Oui bien sûr il y a de grandes divergences, idéologiques et politiques entre composantes de notre mouvement ; mais nous sommes tous d’accord sur la plateforme du 14 février et nous pouvons l’améliorer collectivement pour y intégrer d’un commun accord d’autres composantes comme l’égalité homme femme (c’est déjà un acquis pour le CNAM20), la revendication de la liberté de croyance, la liaison entre combat pour la démocratie et lutte contre la domination impérialiste.
Nous avons l’obligation par notre sagesse et notre perspicacité de sauvegarder l’unité de notre mouvement contre les diviseurs de tout bord, même s’ils sont bien intentionnés ; nous n’avons pas peur de nos divergences ; nous pouvons en discuter en long et en large mais toujours dans la perspective de renforcer notre unité et en écartant toute velléité de division ; car si l’union fait notre force, notre division fait la force de nos ennemis. Alors attention à tout ce qui peut nous diviser, restons ultra vigilants sur cette question.
Notons que la division ne vient pas seulement des divergences politiques et idéologiques entre composantes du M20F (revendication de la monarchie parlementaire ou autre, participation ou pas aux élections législatives, manifester dans les quartiers populaires ou pas, slogans à choisir, etc…). Mais peut provenir également de la faiblesse ou de l’absence d’organisation ; nous devons dans l’avenir nous préoccuper beaucoup plus de cette question pour aboutir au renforcement du mouvement dont le caractère national doit être renforcé par une meilleure coordination inter-régionale.
VI) Pour terminer, Permettez-moi chers amiEs de revenir sur votre rôle, en tant que citoyenNEs marocains militants à l’étranger, tant à l’égard de la communauté marocaine migrante qui doit être soustraite à l’influence du makhzen et acquise à la perspective du combat pour la démocratie au Maroc, qu’à l’égard de l’opinion démocratique en Europe que vous aurez par votre travail de proximité à conquérir pour la cause du peuple marocain et mobiliser dans le combat contre ceux des dirigeants européens qui ont choisi, contre toute logique démocratique, de défendre le despotisme au Maroc.
Merci pour votre attention
*Abdelhamid AMINE est Vice-Président de l’AMDH et Coordinateur adjoint du CNAM20
http://fr.lakome.com/opinion/62-chroniques-dopinion/795-le-mouvement-du-20-fevrier-realites-et-perspectives.html
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