Anne Farthouat,Novethic, 27/8/2010
Aujourd'hui classé en situation de raréfaction au regard des normes internationales, le Maroc s'est doté d'une nouvelle stratégie de gestion de la ressource. Mais les projets pharaoniques ne suffiront pas, il faudra certainement revoir les pratiques agricoles et touristiques pour éviter la pénurie.
Le royaume de Mohammed VI s’assèche. Son potentiel en eau douce n’excède pas les 730 m3/an/hab pour un seuil de rareté fixé par l’ONU à 1000 m3. Et les perspectives sont inquiétantes : les marocains pourraient bien voir les capacités nationales chuter à 530 m3/an/hab d’ici 2030. En cause, une agriculture toujours plus gourmande en eau, couplée à un accroissement exponentiel de la population urbaine et à un développement du tourisme dans des régions parfois très arides.
En avril 2009, le gouvernement présentait donc une nouvelle stratégie nationale, s’engageant à « faire des économies de 2,5 milliards de m3/an [à partir de 2030], à travers la gestion de la demande en eau et à dégager une ressource en eau additionnelle de 2,5 milliards de m3/an à travers l'action sur l'offre. » Un programme ambitieux, estimé à 83 milliards de dirhams (7,4 milliards d’euros).
Une ressource mal répartie et des projets controversés
Défi majeur à relever, l’inégale répartition des ressources en eau douce isole encore le sud du Maroc. Les deux bassins hydrauliques du nord du pays concentrent 90% des eaux disponibles sur 10% du territoire. Une disparité que le gouvernement entend pallier en acheminant 800 millions de m3 d’eau des bassins du nord vers ceux du sud d’ici 2030. D’après Majid Benbiba, directeur de la recherche et de la planification de l’eau au Secrétariat d’Etat à l’eau et à l’environnement, « même s’il reste des difficultés techniques non résolues, en particulier sur la définition du tracé, ce projet de transfert intéresse nombres d’investisseurs, notamment étrangers. » Des investisseurs qui auront à débourser plus de 24 milliards de dirhams pour qu’un tel édifice voie le jour.
D’autres projets de grande envergure sont sur la table. Parmi eux, la construction d’une soixantaine de grands barrages, qui viendront s’ajouter aux 128 construits depuis 1960. Décriés par les écologistes, ces barrages devraient porter la capacité de stockage à près de 9 milliards de m3 d’eau d’ici 2030. Pour Majid Benbiba, la polémique relayée par les associations de protection de l’environnement au sujet du surdimensionnement de ces ouvrages et de leurs conséquences écologiques n’est pas fondée. « Nos barrages ne sont pas surdimensionnés, au contraire. En mars 2010, par exemple, le taux de remplissage a dépassé les 98% et il y a parfois eu des déversements, explique-t-il. 30 milliards de m3 d’eau douce ont d’ailleurs été perdus. Effectivement, le déboisement des alentours et l’érosion des sols génèrent de l’envasement au fond des barrages, et donc une perte de capacité, mais nous tenons compte de ces paramètres dans la conception des futurs édifices. »
Un fort potentiel d’économie dans le secteur agricole
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