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vendredi 24 février 2017

Simulacre de procès pour les accusés de Gdeim Izik


Après seulement quatre jours d’audience étalées entre décembre et janvier, les irrégularités constatées posent un sérieux doute sur l’équité du procès et l’impartialité des magistrats. 
gdeim_izik

ACAT , 23 / 2 / 2017

 Le nouveau procès des 24 militants sahraouis arrêtés dans le cadre du démantèlement du camp de Gdeim Izik en 2010 a débuté le 26 décembre dernier. Après seulement quatre jours d’audience étalées entre décembre et janvier, les irrégularités constatées posent un sérieux doute sur l’équité du procès et l’impartialité des magistrats.
Ils avaient été condamnés à de lourdes peines pour leur participation présumée au meurtre de onze agents de sécurité marocains tués dans le cadre du démantèlement de Gdeim Izik. La Cour de cassation marocaine ayant cassé leur condamnation pour manque de preuve – entre autre l’absence de certitude sur les décès, ils sont rejugés devant la Cour d’appel de Rabat.

Alors que les avocats des familles des onze agents décédés ont pu jusqu’à présent s’exprimer en toute quiétude, les plaidoiries des avocats des accusés font l’objet d’un traitement bien différent : interruptions répétées par le président du tribunal, le procureur et les avocats des parties civiles qui n’hésitent pas à interrompre sans être rappelés à l’ordre ; refus d’écouter les arguments juridiques soulevés par les avocats notamment lorsqu’ils évoquent la torture subie par leurs clients ou encore revendiquent l’application du droit international humanitaire au motif que le Sahara occidental est un territoire occupé , refus de recevoir les conclusions écrites. 

S’ajoutent à cela le cantonnement des accusés dans une cage en verre d’où ils ne peuvent entendre les débats, le refus de leur délivrer papiers et crayons pour qu’ils puissent prendre des notes au motif qu’ils pourraient s’en servir comme armes, le refus de laisser entrer leurs familles à quelques exceptions près alors que des dizaines de journalistes marocains sont autorisés à photographier et filmer les audiences et les accusés, sans leur consentement. Ces mêmes médias marocains qui multiplient depuis des semaines les articles et émissions présentant les accusés comme des terroristes ou encore de dangereux meurtriers, au mépris de la présomption d’innocence.
C’est dans ce contexte hostile que les militants sahraouis et leurs avocats bataillent pour faire valoir leurs arguments, face à des magistrats qui ne cachent pas leur parti-pris, leur hostilité et le peu de cas qu’ils font des engagements internationaux pris par le Maroc en matière de droit de l’homme et de droit humanitaire. En seulement quatre jours d’audience, l’obligation d’impartialité essentielle à la garantie de l’équité du procès a déjà été sérieusement mise à mal.
Seule exception à cette partialité, les magistrats ont ordonné que les accusés soient soumis à une expertise médico-légale concernant les allégations de torture. Cette mesure, réclamée depuis des années par les accusés, intervient toutefois avec plus de six ans de retard et l’expertise a été confiée à des médecins marocains qui, au-delà de leur partialité éventuelle, n’ont pas été formés à la documentation spécifique de la torture.
Suspendu le 25 janvier, le procès reprendra le 13 mars. Entre temps, le Maroc a fait savoir au Comité contre la torture des Nations unies qu’il n’a aucunement l’intention de respecter sa décision condamnant le Royaume pour la torture de Naâma Asfari et pour son emprisonnement sur la base d’aveux forcés.
Tout ceci laisse augurer que les accusés vont à nouveau être condamnés à l’issue d’un simulacre de procès.

Contexte

Le Sahara occidental est considéré par les Nations unies comme un territoire non autonome tel que défini à l’article 73 de la Charte des Nations unies. Il est en outre occupé par le Royaume du Maroc depuis 1975. Une occupation illégale, le Maroc n’étant pas reconnu par les Nations unies comme la puissance administrante. En situation d’occupation, comme en Palestine, le droit international humanitaire s’applique et notamment les Conventions de Genève.
Les 24 accusés ont été arrêtés, torturés et condamnés à de lourdes peines sur la base d’aveux signés sous la torture en raison de leur participation au camp de protestation sahraoui de Gdeim Izik en 2010. Les condamnations ont été prononcées le 16 février 2013 par le tribunal militaire à l’issue d’un procès inique marqué notamment par le refus d’entendre les témoins cités par la défense et d’ordonner une expertise médico-légale concernant les allégations de torture. Les noms des victimes que les accusés sont présumés avoir tuées n’ont même pas été mentionnés lors du procès.
Le 27 juillet 2016, la Cour de cassation a cassé le jugement et renvoyé les accusés devant la Cour d’appel de Rabat. Cela constitue une violation du droit international humanitaire qui fait obligation à la puissance occupante de détenir et juger les Sahraouis dans le territoire occupé. Les tortures, détention arbitraire et procès inéquitable infligés aux accusés sont aussi des violations graves du DIH et devraient faire l’objet d’une enquête immédiate.
Source de l'appel urgent : Victimes

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