Point de vue : C’est un refrain malsain
Tristes manœuvres marocaines de bas étage...
Saïd Ayachi,El Watan, 28/1/2015
Une responsable au niveau de la Commission européenne concernée par les
affaires humanitaires, probablement induite en erreur par des
collaborateurs mal intentionnés, vient de faire des déclarations sur de
prétendus détournements importants de l’assistance humanitaire accordée
aux réfugiés sahraouis. Elle base ses assertions sur un rapport vieux de
8 ans, qui a été démenti, arguments à l’appui, et donc déjà rejeté à
son époque, mais que l’on vient de déterrer pour la circonstance.
Ces fausses accusations sont récurrentes depuis au moins deux
décennies, et sont le résultat d’un travail de sape que réalise le Maroc
par l’intermédiaire de fonctionnaires européens embusqués dans les
appareils de la Commission européenne, et recrutés par les «diplomates»
marocains, avec l’objectif de priver les réfugiés sahraouis de toute
assistance humanitaire, ou pour le moins, la ramener à son plus bas
niveau possible.
Et cela dans un but évident : affamer ces mêmes réfugiés sahraouis afin
de les pousser à la rébellion contre leurs propres dirigeants, qui
seront alors contraints de s’occuper à régler en priorité ce problème
existentiel, et les détourner ainsi de leur mission politique de faire
aboutir les revendications justes et légitimes du peuple sahraoui.
Mais alors, pourquoi l’Union européenne se prête-t-elle à ce jeu
ignoble et dangereux ? N’a-t-elle pas comme première condition dans sa
charte d’association avec les pays postulants d’exiger de ceux-ci
d’abord et avant tout le respect des droits de l’homme (DH) ? Or, dès
2006, puis en 2009 et 2013 des rapports officiels de missions déléguées
par le Parlement européen ont établi, sans aucun doute possible, des
violations massives et répétées des droits de l’homme par le Maroc à
l’encontre de la population sahraouie au Sahara occidental.
Cela en plus de tous les autres rapports qui concluent au même résultat
: le Maroc viole les droits de l’homme, de façon caractérisée, dans les
territoires occupés du Sahara occidental (Amnesty International, Human
Rights Watch, Frontline, Fondation Kennedy, département d’Etat
américain, multiples missions de juristes internationaux, nombreuses
observations d’ONG internationales…).
Cela est impossible pour la simple raison que les dons sont reçus et
enregistrés à Oran, transportés à Tindouf avec les documents appropriés,
entreposés dans les magasins du Croissant-Rouge sahraoui sous le
contrôle des ONG étrangères européennes représentant ECHO (Extended Care
Health Option) et des agences spécialisées de l’ONU (HCR et PAM) pour
être enfin distribués aux bénéficiaires selon un monitoring clair et
vérifiable à tout moment.
On ne peut exclure un certain pourcentage de déperdition dû aux
manœuvres de manutention. Comme on peut admettre, ainsi qu’il en est
fait universellement, que certaines familles vendent une modeste partie
de leur quota afin d’acquérir des produits prioritaires que dicte leur
situation familiale du moment : médicaments, trousseaux scolaires, frais
de transport, etc. Mais cette pratique, connue et admise à travers le
monde chez tous les réfugiés, reste marginale et exceptionnelle. Il est
d’ailleurs intéressant de noter que les rapports annuels du PAM ont, par
le passé, signalé que le taux de déperdition des denrées alimentaires
chez les réfugiés sahraouis est l’un des plus bas du monde et que, de
l’avis du HCR, les camps de réfugiés sahraouis sont les mieux organisés
du monde.
Alors que cache cette énième menace de la Commission européenne et de sa division ECHO à l’encontre des réfugiés sahraouis ?
C’est un refrain malsain que nous entendons chaque début d’année, afin d’opérer une revue à la baisse de l’enveloppe dédiée aux réfugiés sahraouis, décision que rien ne peut justifier, sauf à l’expliquer par des manœuvres marocaines de bas étage, facilitées par des complicités inacceptables.
A chaque fois, on aurait connu la situation du pire, n’était des responsables européens sages qui savent raison garder. Et c’est ainsi que, déclarant se baser sur de nobles sentiments et s’organisant pour mener des opérations d’assistance, on verse, à force de pressions et de manipulations intolérables, dans des contrevérités honteuses et un abominable chantage humanitaire portant atteinte à la dignité des personnes que l’on est censé secourir. C’est pour ce droit à la dignité que combattent les Sahraouis, et que, pour rien au monde, il n’y à y déroger.
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