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jeudi 6 août 2009

"Exporter le modèle marocain"???

Au Maroc, une alternative à l'Iran
Par Anne Applebaum, 30/6//2009



Traduction de Micha Cziffra pour slate.fr (qui ignore que Western Sahara, en français, se dit Sahara occidental et non pas "ouest saharien"...), révisée par SOLIDMAR


SOLIDMAR a publié une série d’articles commentant le bilan de dix années de règne sans partage de Mohammed VI. Mises à part les louanges obséquieuses d'un Driss El Yazami, le bilan est jugé globalement désastreux sur le plan social et celui du respect des droits humains.
Par souci d’équilibre nous publions l’article élogieux d’Anne Applebaum, journaliste américaine du Washington Post, grande admiratrice et amie du roi du Maroc, paru le 30 juin sous le titre
In Morocco, an Alternative to Iran (Au Maroc, une alternative à l'Iran). Article qui, nous le souhaitons, suscitera ici comme cela a été le cas sur d’autres sites, de nombreux commentaires

Si vous voulez un antidote aux photos de policiers tabassant des manifestants et de filles agonisant dans les rues de Téhéran, faites un tour dans les rues de la capitale marocaine. Vous croiserez peut-être des manifestants. Mais ici, ils ne sont pas en danger. Le jour où j’ai visité la ville, un groupe se tenait devant le parlement et brandissait poliment des pancartes. Il y a aussi des filles, mais elles ne sont pas la cible de tireurs. Et elles ne ressemblent pas aux filles iraniennes. Même si à Rabat la mode est clairement aux longs foulards flottants et aux blue-jeans, de nombreuses marocaines se fondraient sans problème dans le paysage urbain de New York ou de Paris.
Bienvenue au Royaume du Maroc, un pays qui, à la lumière des événements qui se sont déroulés ces deux dernières semaines en Iran, mérite quelques minutes d’attention. A l’opposé de la Turquie, le Maroc n’est pas un pays laïque: le roi revendique sa descendance directe du prophète Mahomet. Par ailleurs, le Maroc n’aspire pas à devenir européen. Bien que le français soit encore la langue utilisée en affaires et dans l’enseignement supérieur, le pays fait bel et bien partie du monde arabe sur les plans linguistique et culturel.
Le Maroc n'est pas un paradis démocratique mais...
Contrairement à la plupart de ses voisins arabes, au cours des dix dernières années, le Maroc a subi un processus de mutation lente mais profonde et est passé de la monarchie traditionnelle à la monarchie constitutionnelle. De véritables partis politiques sont nés, et le pays jouit aujourd’hui d’une presse relativement libre. De nouveaux leaders son entrés sur la scène politique (Marrakech a pour maire une jeune femme de 33 ans). En outre, une série de nouvelles dispositions en matière de droit de la famille visent à concilier la loi de la charia et le respect des conventions internationales sur les droits de l’homme.
On ne peut tout de même pas dire que le résultat soit un paradis démocratique. Un militant des droits humains m’a dépeint un portrait de la corruption électorale qui semble d’une complexité byzantine. En résumé, on fait appel à des «médiateurs» qui s’arrangent pour qu’on vote pour tel ou tel candidat. D’autres m’expliquent que si les manifestants que j’ai vus devant le parlement avaient été des islamistes radicaux ou des chefs de guérilla du Sahara occidental et non pas des membres de syndicats, la police n’aurait sans doute pas été si blasée. Par ailleurs, s’il est vrai que les femmes ont des droits, les contraintes culturelles subsistent. Une infime partie de la population lit les journaux et seule une petite minorité de Marocains dispose d’un accès Internet. Entre 40 et 50 % de la population est illettrée. Ce qui explique que le taux de participation aux élections soit si faible. Du reste, les affiches politiques comportent des symboles, pas des mots.
Mais il y a bien un point sur lequel le Maroc fait véritablement figure d’exception. Il est le seul pays d’Afrique dont le gouvernement a reconnu avoir commis des crimes par le passé et a mis en place une «Commission de la vérité et de la réconciliation» sur le modèle de celle établie en Afrique du Sud et dans des pays d’Amérique latine. Depuis 2004, cette commission a enquêté sur des crimes, organisé des audiences télévisées et dédommagé quelque 23.000 victimes ainsi que leur famille. Les crimes concernés – des arrestations arbitraires, des «disparitions», des actes de torture, des exécutions – ont été perpétrés sous le règne du roi Hassan II, décédé en 1999. C’est à son fils, le roi Mohammed VI, que l’on doit la création de cette commission de la vérité. Et c’est le changement de génération qui a rendu possible cette confession au sujet des graves méfaits du passé. Néanmoins, elle n’a pas été accompagnée d’un changement de régime. Il n’y a pas eu de révolution, pas de violence. Le roi est encore en place et il possède toujours ses voitures de collection.
Cette commission de la vérité a le mérite d’avoir instauré une forme de paix sociale. Tout le monde n’est pas favorable à la monarchie, mais même ses détracteurs s’accordent à dire que la rupture avec le passé est bien réelle. En effet, les citoyens marocains ont le sentiment qu’ils peuvent parler ouvertement, former des groupes de défense des droits civils, critiquer le processus électoral et même se plaindre du roi sans risquer quoi que ce soit. Saadia Belmir – une juge marocaine qui est également la première femme musulmane à siéger au Comité de l’ONU contre la torture – m’a confié que, malgré certains obstacles, «[les Marocains] peuvent désormais construire [leur] avenir sur la base d’une bonne connaissance du passé». Les responsables ont été autorisés à disparaître dans le décor, et c’est évidemment sujet à controverse. Mais les contre-courants teintés de colère et de désirs de vengeance qui auraient pu entacher le règne du jeune roi se font de plus en plus rares.
Est-ce un modèle pour les autres pays? Les Marocains en sont persuadés. Ils ont d’ailleurs discrètement «partagé leurs expériences» avec des pays africains et moyen-orientaux. Saadia Belmir m’a appris qu’un groupe informel tentait de mettre sur pied une commission de la vérité au Togo. D’autres ont évoqué la Jordanie (bien sûr, rien n’est officiel). Tous s’empressent de souligner que leur formule – une mutation lente sous l’égide d’un roi populaire (jusqu’ici) – ne peut guère s’appliquer partout. On pense avec nostalgie au shah d’Iran en se demandant comment la situation de ce pays aurait pu évoluer.
Et pourtant, quand on voit l’arc-en-ciel de vêtements et de visages qui animent les rues du Maroc, une idée vient irrésistiblement à l’esprit: le passage de l’autoritarisme à la démocratie est possible. Même dans un Etat ouvertement islamique, même au sein d’une population métissée, et malgré la présence d’une frange djihadiste. Qui plus est, ici, il est possible de reconnaître les violations des droits humains et d’en parler, comme dans les autres démocraties. Dans une grande partie du monde arabe, la volonté politique est insuffisante pour arriver à un tel changement. Mais le cas du Maroc est bien la preuve que le changement n’est pas purement et simplement impossible.



Premier commentaire
par MJF, SOLIDMAR
J’ai cru d’abord que c’était de l’humour….

Mais bien sûr que la police matraque les manifestants au Maroc !! Il y a même eu des morts , comme le syndicaliste Laarej à Tiflet, l’ étudiant El Gadiri à Marrakech… Bien sûr qu’on trouve des photos de jeunes, de militants aux cheveux blanc, de militantes jetés au sol, traînés par terre et roués de coups de matraque. J’ai même la photo d’un commissaire de police jetant à terre et battant une femme portant un bébé sur son dos, simplement parce qu’elle voulait rendre visite à son mari emprisonné arbitrairement à la prison d’Oukacha ! La police ne frappe pas tous les manifestants, bien sûr, puisque l’arbitraire est la règle. Mais toutes les catégories de citoyens qui osent crier leur colère contre les atteintes aux droits de l’Homme ont droit à la répression : les diplômés chômeurs, même handicapés, même aveugles, qui ne savent pas où courir pour échapper aux coups, les ouvriers, les syndicalistes, les paysans, les très jeunes, les très vieux…Un vieillard de 93 ans , handicapé physique et mental, a été incarcéré pour avoir critiqué le roi. Il est mort deux ans plus tard en prison, loin des siens… Les étudiants de Marrakech torturés, humiliés, obligés de recourir aux grèves de la faim illimitées jusqu’à l’extrême limite de leur survie. Parmi eux l’étudiante Zahra Boudkour en est devenue la figure emblématique : torturée, laissée nue au milieu de ses camarades pendant plusieurs jours, gravement malade à la suite d’un viol à la matraque mais interdite de soin d’un gynécologue, condamnée à deux ans de prison avec ses camarades, pour avoir protesté contre les mauvaises conditions de vie et d’études. Quelles seront les pouvoirs de la nouvelle maire de cette ville pour les sortir de là ?

La torture chère à Hassan II n’a pas disparu. On meurt encore dans les centres secrets au Maroc, même si c’est moins fréquent…L’arbitraire fait partie de la vie du peuple marocain : des membres de la famille royale se croient permis impunément de voler, maltraiter, torturer, terroriser toute une région. (en l’occurrence la région de Khénifra) …Un neveu du roi a tiré sur un policier qui a osé lui demander ses papiers parce qu’il avait grillé un feu rouge… Mais là, la police ne bouge pas !

L’IER (Instance Équité et Réconciliation) aurait pu apporter un changement si les résolutions en étaient appliquées…La vitrine est belle, la réalité l’est moins…Les tortionnaires des années de plomb « fondus dans le décor » ? Mais non, profitant de l’impunité totale, certains d’entre eux sont toujours en bonne place : Laânigri à la tête des compagnies mobiles d’intervention, Ben Slimane à celle de la gendarmerie…

Le mot démocratie n’a malheureusement pas encore sa place au Maroc. Le peuple ne fait plus confiance au régime, et s’il ne vote pas, ce n’est pas par analphabétisme, mais parce qu’il a compris que ça ne sert à rien, puisque tous les pouvoirs sont entre les mains d’une seule personne. Drôle de démocratie…

Alors : exporter le modèle marocain…Il faudrait trouver mieux…

Ces photos n'ont pas été prises en Iran, mais au Maroc. C'était le 27 mai 2008, devant la prison Oukacha à Casablanca , lors d'un sit- in organisé par l'association Ennassir. Un commissaire de police et son adjoint en action contre la dangereuse Fatiha Haddad et son non moins dangereux bébé Bilal. Leur tort : être l'épouse et l'enfant du très dangereux détenus islamiste Saïd Farres, condamné à 20 ans de prison. Qu'en dites-vous, Madame Appelbaum?

1 commentaire:

  1. Je pense que le Maroc changera grâce à la volonté générale de ses citoyens. Il n'est guerre facile à un pays de tracer une ligne de démarcation avec le passé en un laps de temps aussi court. Il faut donner le temps au temps!

    Le Maroc est en mutation profonde. Beaucoup de choses ont changé depuis le règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu Le Tout Puissant lui vient en aide. Nous le Marocains, Nous vivons un nouvel aire de liberté. Nous jouissons de nos droits dans le cadre de la légalité et du respect de la loi. Il ne faut pas oublier que les revendications des droits qui prennent des allures agressives sont aussi condamnables que les agissements incontrôlés de certains responsables.

    D'ailleurs, si une enfreinte à la loi est commise par un responsable, celle-ci n'incombe qu'à ce responsable et c'est à ses supérieurs hiérarchiques de prendre les dispositions requises à son encontre. Mais Dieu merci, les exceptions ne font pas la règle au Maroc!


    Je me demande pourquoi ceux qui manifestent devant le parlement ne demandent pas leur droit à passer des concours - comme monsieur tout le monde- et préfèrent la grève de la faim comme alternative!

    Je me demande pourquoi certains diplômés des petites villes croient que c'est leur droit "sacré" que d'occuper les postes publics sans passer de concours car ils sont "chez eux"!

    Je pense que tout esprit démocratique croit en la légalité des chances devant le travail. Qu'il n'est pas question de privilégier les uns aux dépends des autres!


    La chose la plus reconnue dans l'esprit des marocains, c'est l'espoir d'un demain meilleur, car les marocains ont confiance en leur Roi. Ils savent que les changements viendront inéluctablement. Ils sont convaincus que les changements arrivent doucement mais sûrement.

    Le processus de démocratisation est en court. Il reste certains obstacles à franchir comme la bonne gouvernance, la culture de l'évaluation, de la récompense du mérite et de la lutte contre la corruption - corrompus et corrupteurs.

    En effet, un grand travail reste à faire dans ce sens. Le responsable doit être amené à rendre des comptes au peuple et doit prouver, preuve à l'appui, la propreté de ses mains.

    Le Maroc perd également énormément de temps, d'argent, d'énergie dans des réformes qui ont été mises entre des mains sales! Il faut que cela change. Seul nôtre Roi aimé peut le faire. Nous sommes près à l'aider dans ce sens.

    Vive le Maroc libre. Vive le Roi.

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