Samy Raouf, 31/3/2016
Les
propos de Ban Ki Moon, lors d’une visite en Algérie début mars dans un
camp de refugiéEs sahraouis, ont provoqué une crise diplomatique entre
le Maroc et l’ONU...
Affirmant que les acteurs du conflit n’ont fait «
aucun progrès réel dans les négociations devant aboutir à une solution
juste et acceptable par tous, fondé sur l’autodétermination du peuple du
Sahara occidental », il aurait appuyé la thèse de l’occupation.
En réaction, le pouvoir marocain a demandé le retrait du contingent civil et administratif de la Minurso, créée en 1991 pour assurer le respect du cessez-le-feu et organiser le processus référendaire, sans cesse repoussé. Il annule, par ailleurs, la contribution accordée à son financement et menace de retirer les contingents marocains engagés dans les opérations de maintien de la paix (environ 2 300 casques bleus principalement engagés au Congo). Cette décision présentée comme irrévocable remet de fait en cause les missions de la Minurso.
En réaction, le pouvoir marocain a demandé le retrait du contingent civil et administratif de la Minurso, créée en 1991 pour assurer le respect du cessez-le-feu et organiser le processus référendaire, sans cesse repoussé. Il annule, par ailleurs, la contribution accordée à son financement et menace de retirer les contingents marocains engagés dans les opérations de maintien de la paix (environ 2 300 casques bleus principalement engagés au Congo). Cette décision présentée comme irrévocable remet de fait en cause les missions de la Minurso.
Un des porte-parole de Ban Ki Moon a rappelé que « le statut du territoire du Sahara Occidental reste à définir. C’est un territoire non autonome ».
Signe de la gravité de la crise, le Conseil de sécurité s’est réuni
pour appeler au maintien des missions de la Minurso, sans condamner
explicitement la décision des autorités marocaines. Outre le soutien de
la France au pouvoir marocain, Mohamed VI, en visite à Moscou, signait
en pleine crise, une déclaration avec Poutine, « sur un partenariat
stratégique approfondi » où il est aussi stipulé que « la Russie et le
Maroc ne soutiennent aucune tentative d’accélérer la poursuite du
processus politique ».
Le Maroc qui revendique pour le Sahara
occidental une autonomie formelle dans le cadre de la souveraineté
nationale, a été confronté à divers revers. La Cour de justice de
l’Union européenne a invalidé nombre d’accords agricoles avec l’UE, en
raison de leur application dans un territoire non autonome. Depuis
plusieurs années, un conflit est ouvert sur la proposition d’étendre les
missions de la Minurso à l’observation de la situation des droits de
l’homme. Une telle prérogative impliquerait une remise en cause de
l’impunité de la répression qui s’exerce contre les populations
sahraouis et leurs défenseurs dans la partie administrée par le Maroc.
Tortures et expulsions
Ainsi,
à titre d’exemple, nombre de prisonniers politiques sahraouis sont en
grève de la faim depuis plus de trois semaines après avoir été condamnés
à de lourdes peines (de 20 ans jusqu’à la perpétuité...) par un
tribunal miliaire sur la base d’aveux extorqués sous la torture. Et les
expulsions répétées d’ONG comme Amnesty et Human Rights Watch démentent
l’ouverture du pouvoir.
Par ailleurs, l’envoyé spécial de l’ONU,
Christopher Ross, a évoqué les bases d’une solution politique, avec le
soutien d’une partie de l’administration américaine, qui serait plus que
l’autonomie et moins que l’indépendance... Cette option fédéraliste
heurte la légitimation nationale-chauvine de la monarchie qui a scellé
son sort avec la défense de l’intégrité territoriale, et où le pillage
des ressources est un des ressorts clefs du soutien de l’armée au
pouvoir. D’où le refus « d’accélérer le processus politique ».
La
crise est loin d’être finie. C’est l’ONU qui a la responsabilité sur
l’autorisation, la conception et la structure des missions de maintien
de la paix et non une des parties du conflit. Le rapport du secrétaire
général qui doit faire l’objet d’un vote fin avril peut s’avérer
problématique pour le pouvoir, même si ce dernier compte sur le soutien
indéfectible de l’État français.
En tout état de cause, la crise a
eu pour effet de remettre un projecteur international sur une lutte de
décolonisation peu visible. Et contrairement au passé, cette question ne
joue plus le rôle sur le plan interne de neutralisation des conflits
sociaux. Il a fallu la mobilisation de tout l’appareil sécuritaire pour
organiser une contre-manifestation aux propos de Ban Ki Moon, et cela
sans que ce climat ait un quelconque impact sur l’agenda de différentes
mobilisations sociales et syndicales.
C’est dans ce contexte qu’il
faut redonner du souffle à la solidarité internationale avec le peuple
sahraoui. La campagne actuelle de soutien aux grévistes de la faim
pourrait en être un point d’appui.
Samy Raouf
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