Association
de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue
des Suisses 92000 Nanterre
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Point n°65 sur
la campagne de parrainage des prisonniers politiques et d’opinion au
Maroc
Comme promis, l’ASDHOM reprend ses points sur la campagne
de parrainage des victimes de la détention politique au Maroc. Nous consacrerons
ce point aux faits marquants qui ont caractérisé cette période de deux mois qui
nous sépare du dernier point, en termes d’atteintes aux libertés démocratiques,
publiques et individuelles, dont l’État marocain s’est rendu responsable. Ces
faits sont, hélas, nombreux. Nous nous limiterons aux plus significatifs parmi
eux sans pour autant négliger les autres.
L’ASDHOM a profité de cette pause pour
rencontrer en août dernier l’écrivain Gilles
Perrault, le parrain de cette campagne de parrainage. Un bilan de
deux ans et demi de cette action a été fait et l’avenir de cette action a été
évoqué dans le but de la redynamiser et lui donner un nouveau souffle. La soirée
annuelle que l’ASDHOM tient en
novembre, dans le cadre de la Semaine de la Solidarité Internationale (SSI), sera l’occasion pour nous de mettre
sur pied cette nouvelle dynamique en présence de Gilles Perrault. Cette soirée, dédiée aux
victimes de la détention politique au Maroc, sera portée par l’ASDHOM en partenariat, cette année, avec la
mairie de Nanterre et d’autres organisations internationales des droits de
l’Homme.
S’agissant de l’objet qui domine
ce point, l’ASDHOM a été
catastrophée par les informations inquiétantes et préoccupantes en provenance du
Maroc. À commencer par la mort pendant leur détention de quelques
militants.
-
Le 13 août 2014, Mustapha Méziani, militant de l’Union
Nationale des Étudiants du Maroc (UNEM), décède sous « observation médicale »
au CHU de Fès après 72 jours de grève de la faim, entamée fin mai pendant qu’il
occupait pacifiquement le hall de la faculté des sciences pour réclamer son
droit légitime aux études universitaires. Affaibli déjà par les premiers jours
de grève, il va être arrêté et détenu avec ses camarades (tendance Voie
Démocratique Basiste de l’UNEM) à la prison locale Ain Kadous de Fès dans
l’attente de son procès. La justice marocaine lui reproche d’avoir participé aux
évènements violents du 24 avril qu’a connus le campus universitaire Dhar El
Mahraz et qui ont conduit à la mort de l’étudiant Abderrahim Hasnaoui.
L’ASDHOM avait déjà évoqué cette
mort suspecte dans l’un de ses points (voir www.asdhom.org). Ses cinq camarades, Abdennabi Chaoul, Belkacem Benazi, Yacine Lamsih,
Abdelouahab Ramadi et Hicham Boulaft, observent à leur tour une grève
de la faim depuis le 10 août pour se solidariser avec lui et protester contre
leur détention et conditions de détention. Leurs camarades de l’UNEM, organisent en ce moment à
l’université de Fès des manifestations culturelles presque quotidiennement pour
célébrer le 40ème jour de la mort de Mustapha et pour se solidariser
avec les grévistes de la faim d’Ain Kadous. L’état de santé des cinq grévistes
ne cesse de se dégrader (vomissements, évanouissements, perte de poids,
problèmes au niveau de la vue, de l’ouïe et de l’estomac, etc.) ce qui oblige
l’administration pénitentiaire à transporter quelques-uns au CHU de la
ville.
-
Le 28 septembre 2014, Hassana Elouali
Aaleya, militant
sahraoui des droits de l'Homme, membre du Comité contre la torture de Dakhla,
décède, lui aussi, « sous observation médicale » à l’hôpital militaire de Dakhla
au Sahara. Il avait
été condamné à trois ans de prison après les manifestations de 2011 à Dakhla. Il
devait être libéré avec d'autres militants cette semaine. Affaibli par plusieurs
grèves de la faim qu'il a menées avec ses camarades sahraouis emprisonnés et
souffrant d'un diabète, il a été privé des soins nécessaires réclamés sans
cesse. Hassana avait 42 ans et figurait parmi nos listes de victimes parrainées.
Un mouvement de solidarité condamnant cette mort et réclamant une enquête a été,
a été réprimé ces derniers jours à
Dakhla.
L’ASDHOM présente ses sincères condoléances
aux deux familles endeuillées et à leurs camarades. Elle demande qu’une enquête
impartiale soit menée sur les conditions de mort dans les deux
cas.
S’agissant des
atteintes aux libertés publiques en général et aux libertés d’association en
particulier, nous avons assisté ces derniers mois à une escalade manifeste dans
les interdictions, officielles et non officielles, de plusieurs activités
associatives, sans parler de procès politiques intentés à quelques défenseur
(e)s des droits de l’Homme et des menaces proférées et exécutées contre des
militants et activistes démocrates.
L’Association
Marocaine des Droits Humains (AMDH), ONG déclarée d’utilité publique au
Maroc, s’est vue refuser pratiquement toute activité à commencer par ses
colonies de vacances et la tenue de conférences dans des salles
publiques ;
Amnesty
International-Maroc- s’est vue
également refuser l’organisation d’une rencontre qu’elle avait l’habitude de
tenir entre les jeunes de plusieurs nationalités autour de la
Méditerrannée.
La Ligue Marocaine de Défense des
Droits de l’Homme (LMDDH), n’a pas
été, non plus, épargnée par ces interdictions. Des salles lui ont été interdites
d’accès.
Une caravane de solidarité avec les migrants subsahariens avait été interdite
de se rendre à Tanger où des Subsahariens ont été victimes d’agression
conduisant à la mort de certains d’entre eux.
Et que dire de l’interdiction de
la nouvelle association « Freedom
Now- Al Houria Al an » qui a été fondée en avril dernier, pour
défendre la liberté de la presse et d’expression sous toutes ses formes. Une
fois fondée, le ministère de l’Intérieur a refusé de réceptionner son dossier
légal de constitution, ce qui a poussé ses fondateurs à s’adresser au tribunal
administratif en mai dernier. Dans son mémorandum au tribunal, l’avocat du
ministère a brandi une explication pour le moins curieuse : un membre du bureau
exécutif de ladite association, Rida
Benotmane, a été jugé en 2007 dans le cadre de la loi antiterroriste,
et un autre membre, l’ingénieur Ahmed
Benseddik, a retiré son allégeance au
roi.
Des menaces ont été
proférées à l’encontre de Maâti
Monjib, universitaire, historien qui a écrit sur l’affaire Ben Barka, animateur d’un excellent site
électronique « Zaman » et un des fondateurs et responsables de l’association
Freedom Now. Les sécuritaires marocains ont mis leur menaces à exécution en
agressant physiquement le mercredi 24 septembre Hicham Mansouri, chef de projet
de l’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI), alors qu’il sortait d’un restaurant
où il était en compagnie justement de Maâti
Monjib, membre également du bureau d’AMJI.
D’autres
militant(e)s et défenseur(e)s des droits de l’Homme ont été condamné(e)s à des
peines d’emprisonnement pour leur combat pour la justice, la démocratie, la
dignité et l’État de droit au Maroc. C’est le cas de Wafae Charaf, condamnée le 11 août 2014 par
le tribunal de Tanger à un an de prison ferme et de Oussama Housni, condamné le 23 juillet 2014
par le tribunal de Casablanca à trois de prison ferme. Tous les deux sont des
défenseur(e)s des droits de l’Homme et militant(e)s du mouvement 20-Février. Ils
se sont plaints de mauvais traitement et de torture lors de l’arrestation. Un
collectif international auquel l’ASDHOM s’est jointe, a été créé en France
et des actions devant l’ambassade du Maroc à Paris ont été montées en guise de
solidarité.
L’ASDHOM considère ces deux arrestations
comme arbitraires. Leur condamnation à de la prison ferme est un encouragement à
la poursuite de la politique d’impunité dont jouissent les responsables
d’exactions au Maroc. Les autorités marocaines tentent par tous les moyens de
dissimuler leurs actions liberticides qui vont à l’encontre de leur discours en
matière d’engagement du Maroc contre la pratique de la tortue et les traitements
dégradants, cruels et inhumains.
Le discours menaçant
du ministre de l’Intérieur, tenu devant la représentation parlementaire à
l’adresse des ONG marocaines des droits de l’Homme, ne laisse aucun doute sur
cette volonté de les bâillonner encore plus. Il avait clairement laissé entendre
que les autorités marocaines allaient s’occuper de toutes ces ONG qui « servent
un agenda étranger » en faisant allusion à leurs subventions reçues de
l’étranger, et qui « entravent les actions des responsables marocains contre le
terrorisme et la criminalité »…rien que ça !
Nous reviendrons
plus en détail, lors des prochains points, sur les listes des prisonniers
politiques et d’opinion et leurs conditions de détention pour que leurs parrains
et marraines puissent suivre avec nous les informations les
concernant.
Nous terminons ce
point par signaler qu’il y a eu pendant cette période quelques libérations qui
nous réjouissent tout de même. Nous les espérons plus
nombreuses.
- Mouad
Belghouat, alias Elhaqed, le poète du mouvement 20-Février,
a été libéré le 18 septembre 2014 après 4 mois de détention à la prison Ain
Borja de Casablanca ;
- El-Hafed
Toubali, le prisonnier
politique sahraoui, a été libéré sous conditions le 14 août 2014 après 6 mois de
prison passés à la prison de Tiznit ;
-
Mahjoub
Oulad Cheikh, Kamal Trayah et Mohamed Manolo, trois défenseurs
sahraouis des droits de l’Homme, jugés à 3 ans de prison ferme dans le même
dossier que leur camarade Hassana
Elouali, décédé le 28 septembre, viennent de quitter la prison de
Dakhla ;
-
Cheikh
Amaïdan, prisonnier
politique sahraoui, a été libéré le 9 août 2014 après avoir passé 5 ans derrière
les barreaux des prisons d’Ait Melloul et de
Laâyoune ;
-
Ghali
Bouhla, prisonnier
politique sahraoui, a été libéré le 29 juillet 2014 après 3 ans de détention
passés dans les prisons de Laâyoune et d’Ait
Melloul ;
-
Brahim
et Taha Daoudi, deux frères sahraouis, qui
étaient détenus à la prison de Tiznit depuis un an, ont été libérés le 7 août
2014. Leur père, Mbarek Daoudi,
continue quant à lui sa détention préventive de plus de 7 mois à la prison de
Salé1 ;
-
Hassan
Chouiâr, prisonnier
politique sahraoui, a été libéré le 27 septembre 2014 après avoir purgé une
peine d’un an d’emprisonnement à la prison d’Ait Melloul. Deux jours après, la
Cour d’appel d’Agadir le condamne à 5 ans de prison ferme. Retour case
prison ;
Le
bureau exécutif de l’ASDHOM
Paris,
le 3 octobre 2014
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