Par Salah Elayoubi, 26 Août 2012
La semaine qui s’achève nous aura apporté l’enseignement
qu’au Maroc, la vie est un long fleuve, dont le lit charrie les
dictateurs de père en fils, sans assurance jamais, que les rejetons,
malgré tout ce que peut prétendre la génétique moderne, ne soient
meilleurs, ni plus intelligents que leurs géniteurs. Exception marocaine
oblige !
En moins de trois jours, nous avons eu droit au déroulement complet
de la panoplie de la dictature, entre beaux discours, allégeance
prétendue du peuple et coups de trique.
Lundi, le roi a entamé la semaine par un discours qu’il semblait,
découvrir pour la première fois, preuve s’il en était, que les promesses
qu’il contient, resteront une fois de plus lettre morte.
Mohammed VI y découvre que son pays compte beaucoup de jeunes et des
résidents à l’Etranger. Il omet de préciser que pendant plus d’une
décennie, il a envoyé aux premiers ses sicaires réprimer leurs
manifestations d’indignation et aux seconds, ses corrompus de tous
bords, encadrer leurs associations vidées de toute substance, pour en
faire les caisses de résonance du régime mafieux de Rabat.
Les promesses n’engageant que ceux qui veulent bien y croire, la
monarchie marocaine promet tout et tient son contraire depuis si
longtemps, qu’elle en a perdu toute crédibilité, d’autant que la crise
économique qui n’aura épargné aucun pays interdit pour un bon moment,
de croire à la véracité de tout projet de redressement.
Tant de balivernes bégayées, n’auront donc trompé personne, le seul
but de l’exercice étant de faire naviguer les esprits de nos
compatriotes, d’illusions perdues en espérance prochaine.
Mardi, à Rabat et plus précisément dans l’enceinte du Méchouar,
dont la légende véhiculée par le Makhzen voudrait qu’il soit heureux,
se déroulait une cérémonie dont le monde entier nous envie la
bouffonnerie. Une sorte de « Djellaba-party », donnée par le locataire
des lieux. Il s’agissait de se déguiser tout comme le feraient des
enfants, un mercredi après-midi. Sauf que là, il n’était plus question
de gigoter au rythme de la danse du canard, déguster des nougats et
siroter des jus de fruits, mais de rendre un hommage appuyé et éhonté à
un seul homme, sous la forme d’une prosternation qui n’a rien à envier à
celle due aux divinités. Et pour mieux s’apparenter à un corps divin,
l’acteur principal de cette abomination, s’était paré d’une tenue jaune
canari, qui rendrait jaloux l’astre solaire lui-même.
Détail révoltant, l’allégeance est déclamée au nom du peuple
marocain, province par province, au fur et à mesure que les élites
s’inclinent face au roi. Une pure escroquerie qui n’aura pas échappé à
la majorité écrasante de nos compatriotes révoltés par cette pratique
moyenâgeuse, menée en leur nom, sans qu’ils n’en aient expressément
donné mandat à l’un ou l’autre des participants !
Ce cérémonial au goût de ridicule n’aura pas, le moins du monde,
gêné le chef du gouvernement marocain qui s’y est prêté avec le zèle
suspect qu’on lui connaît, lorsqu’il s’agit de rendre grâce au
monarque. Il y a quelques mois, pourtant, notre homme s’offusquait de la
perpétuation de ce genre de pratiques indignes du vingt et unième
siècle.
Voilà le PJD confronté donc à son impuissance et définitivement rangé
à l’ombre de la dictature, sur un socle pitoyable de lâcheté et de
compromission.
Si quelqu’un nourrissait encore des doutes sur la fatuité de la
monarchie, son inutilité ou sa propension à vivre au-dessus de nos
moyens, il n’aurait qu’à visionner les images de ce mardi frappé du
sceau de l’indécence et de la honte.
Rien moins qu’un bon millier de serviteurs, aura été nécessaire pour
encadrer un aréopage d’ « Homoflexus », cette race d’hommes serviles,
incompétents, pour la plupart corrompus et à la nuque particulièrement
souple, voulue par le régime pour servir ses pompes.
Côté pile de la caméra, une noria de voitures, de limousines, de
camions, de provisions, de boissons et une débauche de moyens techniques
et matériels auront été nécessaires pour l’accomplissement de cet
événement, dont le Maroc aurait du faire l’économie.
Quand le trésor public doit faire l’aumône auprès des instances
internationales, le roi convoque ses thuriféraires à des cérémonies dont
le faste et les dépenses somptuaires nous valent les critiques et les
quolibets du monde entier. Une fortune partie en fumée, des heures de
service et des bras qui auraient pu servir utilement ailleurs !
Ce diplomate français me rappelait, combien il lui était pénible,
lorsqu’il était en poste à Rabat, de se rendre à ce genre d’événements
qu’il jugeait particulièrement indécent, m’expliquant comment il usait
de prétextes, afin de ne pas assister aux festins qui suivaient et
dont il savait pertinemment qu’ils étaient financés par le peuple,
lequel n’y était jamais convié !
Le mercredi, fut le point d’orgue de ces trois jours mémorables,
lorsqu’une poignée de citoyens indignés ont décidé de mener, face au
parlement, une parodie d’allégeance, histoire de dénoncer celle de la
veille.
Mais les dictateurs sont réputés détester la caricature et la
parodie. Elles dissipent l’aura de sacralité et d’intouchabilité dont
ils aiment à s’entourer.
Le militant Younès Derraz, frappé, jeté à terre, piétiné et délesté de son sac à dos par des policiers chapardeurs
Plus de discours, ni de belles paroles. Le masque est tombé
brutalement et le rideau s’est levé sur la sauvagerie habituelle
orchestrée par des policiers voyous qui, non contents de tabasser
indistinctement tous ceux qui se trouvaient sur leur passage, s’en sont
également pris à leurs biens, confisquant, à tour de bras, sacs,
appareils photo, et téléphones portables. Une pratique désormais
largement courue par les forces de l’ordre à chaque reprise en main de
manifestations ou d’émeutes ! Même au jeu du gendarme et du voleur, le
Maroc fait exception.
En moins de trois jours, le régime marocain aura donc réussi
l’exploit de mettre en lumière ses mensonges, ses turpitudes et ses
errements et raviver la flamme de la contestation qui s’était assoupie
le temps d’un été. A lire la presse et la toile, il n’aura pas, non
plus échappé à la communauté internationale qu’il a décidément beaucoup
de peine à se départir de ses méthodes héritées d’un autre âge. Une
preuve de plus qu’il a, depuis longtemps, atteint son degré de Peter !
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