Au nom de sa sœur refoulée vers la mort
Abdelaziz Mokhtari accuse l’État français d’avoir refusé un visa à Aïcha, atteinte d’un cancer et décédée au Maroc.
Par SONYA FAURE, Libération.fr, 31/5/2010
Il ouvre un énorme classeur et en sort une à une des pochettes de couleurs différentes : «Voilà Copé, voilà Kouchner, Rama Yade, et là Hortefeux…» Dans un espoir un peu fou, peut-être naïf, certainement désespéré, Abdelaziz Mokhtari a envoyé ses lettres à une dizaine de politiques français. Il les a alertés sur la situation ubuesque et tragique de sa sœur, marocaine comme lui, Aïcha. Aïcha Mokhtari souffrait d’une forme rare de tumeur au genou, elle est morte le 15 août 2009, à 52 ans. Faute d’avoir obtenu un visa pour venir se soigner en France, selon son frère. Il veut aujourd’hui amener l’administration française devant les tribunaux.
Homonymes.
Le frère, conseiller de clientèle à la BMCI, une filiale du groupe BNP Paribas, écrit alors au ministère de l’Immigration, et le chef de cabinet de Brice Hortefeux, Pierre Castoldi, lui fait une réponse curieuse :«Aucune demande de visa au nom de Mme Aïcha Mokhtari n’a été récemment enregistrée […] depuis la dernière demande de visa […] qui a fait l’objet d’un refus le 10 avril 2007.» Aïcha n’a pourtant jamais fait de demande de visa en 2007, selon sa famille, et le courrier signifierait que le consulat n’a pas gardé la trace de sa demande d’avril 2008.

Aïcha va de plus en plus mal, elle mange peu, ne dort plus. Elle est hospitalisée trois fois en réanimation. Les Mokhtari saisissent la commission de recours contre les refus de visa d’entrée en France. Plus de dix mois plus tard, en mai 2009, nouveau refus. Aïcha meurt cet été-là, après une bataille administrative d’un an et demi.

Contacté par Libération, le ministère de l’Immigration préfère le silence : «Nous ne pouvons commenter l’affaire puisqu’un recours en responsabilité est en cours.» Le Quai d’Orsay a sa propre lecture de l’affaire. Pour lui, pas d’erreur, pas d’homonymie. Après avoir rappelé que «427 visas médicaux ont été délivrés au Maroc en 2008, un taux de délivrance de près de 80%», le service de communication du ministère envoie par mail des «éléments de langage» déjà employés par l’ambassade de France à Rabat, devant les journalistes marocains. «La demande de visa de Mme Mokhtari a été traitée par le consulat général de France à Fès avec toute l’attention nécessaire. Comme son dossier comportait des insuffisances, principalement liées aux modalités de prise en charge financière de l’intéressée, celles-ci ont été signalées à plusieurs reprises à la famille.»
Abdelaziz Mokhtari et la sénatrice Alima Boumediene, qui a elle-même envoyé de multiples pièces aux ministères et consulats, assurent au contraire que le dossier était complet. Abdelaziz sort une feuille de son classeur : l’attestation d’Isaaf Mondial assistance témoignant de l’existence d’un contrat au nom d’Aïcha garantissant ses frais médicaux à hauteur de 30 000 euros. La commission de recours aurait également motivé son refus selon le principe que «les soins pouvaient être prodigués au Maroc». Aïcha n’a pourtant pas été soignée.
«Autisme».
«Il est clairement établi qu’on a privé cette femme d’une possibilité de survivre, estime l’avocat William Bourdon. L’obsession sécuritaire adossée à l’interconnexion des fichiers conduit mécaniquement à ce genre d’erreurs, pour une affaire d’homonymie. Celle-ci était tellement évidente qu’elle était facile à corriger. C’est ce qui rend l’affaire encore plus révoltante.» «La politique migratoire est rentrée dans une forme d’autisme», poursuit la sénatrice Alima Boumediene.
Au Maroc, l’affaire a suscité de nombreux articles, «127 en tout, et 5 reportages télé», précise le frère d’Aïcha Mokhtari, qui a également déposé plainte contre plusieurs ministres marocains pour non-assistance à personne en danger.
«Il y a eu une campagne de presse largement injuste envers la France», estime le Quai d’Orsay. Dans les journaux, les mots sont durs : «Hortefeux, Aïcha et le racisme», titre le Journal hebdomadaire. Ce journal indépendant (qui a fermé depuis) qualifiait d’«ignoble» le comportement du ministre dans l’affaire Mokhtari. L’hebdomadaire Tel Quel, lui aussi indépendant, préférait braquer sa critique sur les institutions marocaines : «C’est bien plus facile de penser que la France doit être tenue pour responsable que de pointer la déficience du système de santé marocain et l’absence d’un système de couverture maladie universelle.»
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Ce que Abdellaziz Mokhtari a déjà obtenu par son combat (NDLR)
Les modalités des visa ont été modifiées depuis 2 Mois .
Le consul à Fès a été révoqué le 31.03.2009 par décret présidentiel .
C'est incroyablle!!!
RépondreSupprimerTu es au maroc et tu comptes porter plainte contre la France!!!
Pourquoi tu n'attaques pas le maroc qui ne fait rien pour ta mère!!!
C'est la meilleure celle là!!!
Porte aussi plainte contre la France parce que notre pays n'est pas assez développé!!
Wa wjahkoum kasseh ya khouya...