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samedi 18 août 2012

« La princesse des pauvres » s’en est allée !

Par  Salah Elayoubi
 
La « Princesse des pauvres » s’en est allée. Comme elle avait vécu. Dans la discrétion ! Sans bruit,  elle a tiré la porte derrière elle, après avoir perdu son ultime bataille, celle qui l’opposait à la maladie. Jusqu’au bout, la tante de Mohamed VI, aura gardé ce regard espiègle et moqueur qui savait se faire dur, lorsqu’elle avait vent qu’une injustice touchait ses compatriotes. 
A la fin de sa vie, souffrance oblige, c’est tout juste si ses yeux, d’habitude si pétillants,  s’étaient faits un peu moins rieurs.
La princesse était la cadette des enfants de Mohamed V. A la mort de ce dernier, Hassan II prend en charge le destin de sa demi-sœur, née à Madagascar, le 8 avril 1954, alors que la famille y est en exil. Le changement est brutal. La fillette pleure son père et Hassan II qui prétend le remplacer, est despotique et la terrorise, à l’instar de tous les autres membres de la famille. Il n’est pas rare de le voir ordonner à ses « esclaves du feu » des corrections mémorables aux récalcitrants ou aux rebelles, quand il ne s’en chargeait pas lui-même, à coups de ceinturons, de gifles, de coups de poings ou de pieds.
L’exceptionnelle intelligence de la fillette s’accommode mal du despotisme et lui permet de faire le distinguo entre éducation et cruauté. Elle concevra de cette période une profonde aversion pour toute forme d’injustice et de violence.
Son mariage avec Driss El Ouazzani, qui « passait par là »,  lui permet d’échapper à l’emprise de son frère et du protocole du palais. Il demeurera son autre blessure, malgré la naissance d’une petite fille.
Sa silhouette toute de noire vêtue et sa casquette à visière frappée de l’emblème de la Fédération des Sports Equestres,  ne hanteront  plus les allées de Dar Essalam, ce magnifique club qu’elle a monté de toute pièce, dans un coin reculé du Golf  royal.
Toujours ce souci de ne pas déranger le grand frère, ce monstre de susceptibilité et d’ombrage.
Elle affectionnait tant son club où elle passait le plus clair de son temps, entre les affaires courantes de la Fédération, la gestion de ses écuries ou celle de sa ferme équestre de Sidi Berni, l’organisation de grands événements comme la semaine du cheval ou la saison des concours hippiques.
C’est en partie grâce à ce travail patiemment conduit, loin de tout protocole, avec une poignée de fidèles, que le Maroc a pris sa place comme pays d’élevage de chevaux d’exception, malgré la suspicion, les doutes, le peste équine et le reste !
Nul n’oubliera ces moments de kermesse, lorsque le club équestre de Dar Essalam s’ouvrait à la semaine du cheval ou lorsque la caravane des concours hippiques atteignait les villes marocaines.
Il n’était alors pas rare, de la voir déambuler, le plus naturellement du monde, parmi la foule des amoureux du cheval, dont beaucoup ignoraient, alors que le maître d’œuvre de cette fête exceptionnelle était ce petit bout de femme d’à peine un mètre soixante.
Lors de la semaine du cheval, c’est dans son petit Club-house cosy,  du centre équestre de Rabat, qu’il fallait se trouver, pour l’entendre entonner, dissimulée derrière un pilier,  la chanson des vieux amants, de jacques Brel, des trémolos plein la voix, trahissant alors, le spleen qui s’emparait d’elle à l’évocation de ce refrain nostalgique :
« Mon amour,  mon doux,  mon tendre,  mon merveilleux amour,
de l’aube claire,  jusqu’a la fin du jour,  je t’aime encore,  tu sais ! »  
Mais c’est en enfourchant un autre cheval de bataille que la défunte a gagné ses lettres de noblesse et mérité amplement,  le titre de « Princesse des pauvres ».
Acquise à la cause des damnés de son pays, « Lalla Mina » a été de tous les combats, volant au secours des orphelins, des mères célibataires, des femmes battues, violées, ou répudiées. Elle doit la réussite de son action caritative,  à la propension qu’elle a toujours eu à déléguer aux autres les prérogatives qu’elle savait ne pouvoir assumer, une autre démonstration de son intelligence. Et même si certains de ceux ou celles qu’elle avait choisis, en ont profité pour se tailler une carrière ou « manger au râtelier », le résultat est plus que probant : des centaines de mères célibataires, de veuves,  de divorcées et d’orphelins ont été sauvés des griffes de la misère, de la prostitution, de l’anathème, de la délinquance,  voire de la mort, grâce au combat courageux de cette hyperactive du social. Par ricochet, des milliers d’autres ont pu accéder à un minimum de dignité humaine.
Contrairement à tant d’autres membres de sa famille, épris des objectifs et des feux de la rampe, aucune caméra n’est jamais venue humilier qui que ce soit en saisissant ces moments où la Princesse tendait la main à un destin brisé, une vie qui chavirait ou une existence au bord du chaos. Son bureau résonne encore de  tant de coups de téléphones à cet  agent d’autorité despotique, ce policier véreux, de tant de séances  de conciliations entre époux au bord de la rupture, de froissements discrets de dirhams ou de chèques qui passaient discrètement de sa poche à celle d’interlocuteurs, menacés par la faim ou la banqueroute.
Si le Maroc avait été un pays démocratique, la Princesse aurait eu droit à sa légende, quand tant d’autres s’en sont confectionnés une, factice, à coup de marketing et de mensonges.
Elle s’est éteinte après en avoir inspiré plus d’un !
Puisse-t-elle continuer depuis là où elle repose jusqu’à ce que la justice et la dignité qu’elle a tant défendues, embrassent, à tout jamais, sa patrie.
Salah Elayoubi
URL courte: http://www.demainonline.com/?p=20223
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Tous les hypocrites de la création se sont donnés rendez-vous après s'être assurés auparavant de la présence de la caméra aux obsèques de celle que beaucoup d'entre eux fuyaient pour ne pas avoir à s'impliquer dans ses actions caritatives !
Et puis il y a tous ces neveux présents à cette inhumation et qui, par la prédation, la débauche, la corruption et le pillage auxquels ils se livrent corps, sont une véritable insulte à ce moment de recueillement qu'elle aurait sans doute voulu plus humble !!!!!

http://youtu.be/7Cv_ei-pz5Q

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