Maroc : Jeunes du 9 mars contre jeunes du 20 février

 Réflexions d'un observateur marocain...

 Par Mohamed Hifad, 17/4/2011

La stabilité de la répression !

Le régime marocain érige désormais le mouvement du 20 février comme un épouvantail de l’instabilité. Il vient de mettre sur pied son contre-mouvement par sa jeunesse du 9 mars exactement comme l'a fait Hassan II pour notre génération après les deux coups d’Etat manqués en 1971/72. La jeunesse ouvrière a été remplacée par jeunesse et sport sur le modèle français. La jeunesse de Mohammed VI , les enfants de son entourage, qui partage le même gâteau avec lui ou qu’il a achetée tout simplement comme il a fait pour un grand nombre de citoyens en exploitant leur précarité , est reçue par la commission dite constitutionnelle , fait rapporté par tous les médias du pays et répété à longueur de journée à la manière des médias de Kadhafi .

On ne parle plus de  dissolution des partis du Makhzen coupables avec le régime de tous nos problèmes pendant cinquante quatre ans. Au contraire, le discours royal du 9 mars a détourné en leur faveur le mouvement du 20 février. Chaque parti est invité par la commission et par les médias pour faire et dire ses propositions. Quant aux partis et aux groupes de pression interdits de la rue, ils sont transformés en simples catalyseurs. C’est une tactique digne des arts martiaux : retourner la force de l’ennemi contre lui.-même Les partis du Makhzen, avec son autorisation, sont allés dans les Universités plaider leur cause auprès des étudiants comme si les autres Marocains n’étaient pas concernés…

Si des particuliers essaient de défendre un point de vue opposé auprès des étudiants, ils n’obtiendront pas d’autorisation avec une telle facilité. Le peuple a le droit de s’exprimer non pas sur des places publiques (la police antiémeutes y veille, très nerveuse sur le qui-vive), au sein des locaux des partis de l’Etat ou dans les Universités, mais chez eux. Ils trouveront tôt ou tard le moyen de faire taire par l’argent ces espaces virtuels qui constituent le seul lieu d’expression et de concertation entre les citoyens-ennes. La jeunesse du 9 mars qui est entraînée partout, sera bientôt envoyée à travers le monde pour parler au nom de la jeunesse marocaine.

Hassan II nous a déjà fait ce coup-là après les deux putschs manqués. Seuls les originaires d’une ville marocaine avaient le droit de voyager et de parler aux noms des Marocains avec la bénédiction et les conseils des amis du Maroc au point que pour les étrangers le Marocain est symbolisé par son terbouch rouge, et cette situation n’a pas encore changé car la relève des privilégiés était là toute prête bien avant le 9 mars qui la met brusquement au devant de la scène. Le vin et la drogue couleront bientôt à flot, le foot, la musique et le sexe reprendront bientôt leur place légitime au pays de la stabilité, de la répression et de la poule royale qui couve ses œufs d’or .

Que voulez-vous d’autre ? C’est cette jeunesse qui veut qu’on respecte la spécificité du Maroc , entendre par là la spécificité de la monarchie du Maroc. C’est la jeunesse qui veut qu’on garde l’article 19 et d’ailleurs le représentant du Parti constitutionnel précise que cet article portera un autre numéro pour ceux qui exigent le changement. C’est la jeunesse qui dit que le droit international ne doit pas être supérieur au droit national , adieu donc pour les droits des autochtones pour un autre siècle et si jamais ils survivent encore, Hassan III fera son discours historique et créera sa propre jeunesse.

La racaille de la rue n’a aucun poids : par les soins célestes du Makhzen, elle est analphabète, démunie, sans armes, complètement nue, a son pain et son thé garantis, des bars et des mosquées partout. Que veut-elle de plus ? Le Maroc et son régime sont faits sur mesure pour les ignorants. Pour celui ou celle qui a joui d’un brin de lumière par hasard le Maroc est un enfer sur terre.

Mais que voulez-vous ? Sarkozy, Juppé et le sage Ban Ki Moon et bien d’autres félicitent le Roi pour son discours et son courage .Un scénario bien rodé où rien n’est laissé au hasard. L’ambassade de France a suivi en aidant la jeunesse du 9 mars à faire face à celle du 20 février exactement comme au début du siècle dernier. Éternel retour ?

Cela ne tient qu’à vous citoyens et citoyennes de continuer le combat. Les baltagias et leur progéniture n’ont arrêté ni les Tunisiens , ni les Égyptiens , ni le cours de l’Histoire !

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